Réalisé par Clara Laperrousaz et Laura Laperrousaz. France. Drame. 1h35 (Sortie le 13 décembre 2017). Avec Ana Girardot, Clément Roussier, Océane, Margaux, Agathe Bonitzer, Teresa Madruga et Paulo Calatré.
Avec le Festival ArteKino, les films de jeunes réalisateurs et réalisatrices européens sont mis en ligne et projetés, bien sûr, dans les cinémas et à la Cinémathèque française.
Les spectateurs sont encouragés à voter pour leur film préféré, manière agréable d’encourager des cinéastes qui, souvent, sortent leur premier film. Dans la sélection française, "Soleil battant" offre une parenthèse lumineuse.
La terre du Portugal est presque rouge. Rouges aussi, les cheveux des deux petites filles qui jouent sous le soleil et barbotent dans l’eau. Avec leur mère (Ana Girardot), elles dansent devant la maison, secouant leurs robes à fleurs identiques.
Les rires s’élèvent dans ce pays vallonné, éclaboussé de lumière, pareil à un chaud paysage d’automne en plein été. Le père (Clément Roussier) les regarde. Un peu plus distant, un peu plus prudent.
On comprend qu’il est souvent absent, qu’il travaille beaucoup et voit moins sa famille. Dans cette maison isolée où ils n’ont pas été depuis longtemps, c’est l’occasion de se retrouver.
Pourtant, des éléments troublants viennent perturber l’équilibre apparent et le bonheur du foyer. Qui est la petite fille sur cette photographique qui ressemble tant à Emma, l’une des deux enfants du couple ? Pourquoi ne parle-t-on jamais d’elle à la maison ?
Pourquoi son père accueille-t-il avec tant de froideur sa jeune tante Judith (Agathe Bonitzer), alors qu’elle est si proche d’Iris, sa maman ? Autant de mystères, qui sont toutefois levés assez rapidement, et laissent la place à un drame familial émouvant.
On sent, dans ce premier film autobiographique, un attachement physique au Portugal, ce pays qui semble nimbé d’or dans le soleil couchant. Les deux petites filles, en particulier, sont en contact permanent avec la terre : elles cueillent les fleurs, jouent dans le jardin, partent à travers champs, se jettent dans l’eau froide de la rivière.
Une sensualité constante se dégage de cet Eden ocre. Un Eden qui sera mis en danger avec la levée du secret, qui fait entrer la mort et le danger dans les gestes les plus quotidiens.
Certes, "Soleil battant", de Clara Laperrousaz et Laura Laperrousaz, joue parfois un peu la facilité, et n’évite pas quelques clichés.
Manifestement émerveillées - à juste titre, sans doute - par la beauté des paysages et des ciels qu’elles filment, les deux réalisatrices ont tendance à abuser des personnages à contre-jour devant les soleils couchants, des images de solitude du père et de la mère qui se limitent à des promenades dans les champs. La représentation de la mère en Ophélie, son immersion dans l’eau pour mieux en renaître reste maladroite, car trop vue.
C’est donc surtout dans les scènes d’intimité familiale que le film séduit. La chaleur qui se dégage du film naît aussi de la tendresse qui existe entre les membres de cette famille endeuillée.
La mère, fusionnelle, ne cesse de caresser les joues de ces enfants, d’embrasser leur visage, de bercer contre elle leurs petits corps. Joueuse aussi, elle se glisse dans le canot que les enfants ont rempli d’eau pour participe à leur bêtise. Le père, peu à peu, ose réaffirmer son amour pour ces filles, comme dans cette scène charmante où il offre à chacune une trousse de médecin et leur apprend à utiliser les instruments en plastique.
Enfin, il y a ces deux fillettes, si proches. Les cinéastes s’attardent avec bonheur à filmer leur journée : leurs jeux, leurs discussions, les rituels du coucher…
Tous ces moments d’amour partagé qui font la beauté de l’enfance. Leur fugue, qui évoque l’espace de quelques instants une Nuit du chasseur solaire, les fait plonger dans le conte, mais commence à délivrer les parents de leur mauvais sort. |