"Je continue de penser que la vraie révolution consiste à faire du monde un havre pour la poésie et le vagabondage, pour le fragile et le vulnérable, le rare et l’obscur, l’irréalisable, le local et le petit".
C’est avec cette phrase de Rebecca Solnit comme crédo que Marcel Kanche (Je Souris et je Fume (1990), Henriette (1992), Lit de Chaux (2001), Vertige des lenteurs (2006), Vigiles de l’aube (2011), Epaisseur du vide (2015)...) et Antoine Bataille (Muti (2002), Mon Cul (2002), Fugue Bâtarde (2009), Etrange-moi (2013), Faire Face (2015), Crescent Hôtel (2017)...) ont décidé de monter ensemble le label Des Hautes Négligences. Ce n’est pas un hasard tant les deux hommes partagent un univers poétique et fort.
Des univers authentiques que l’on retrouve dans le nouveau disque de Marcel Kanche, musicien aussi important que bien trop discret. De ses longs échanges (et de la musique écrite que l’on espère un jour voir sortir) avec Bashung, il en a gardé le sens du phrasé, de la dramaturgie musicale. Il y a du Manset, du Ferré aussi. Il y a une profondeur, une intensité, une force dans cette musique tournant surtout autour d’un piano tout en rondeur et d’une guitare tout en discrétion.
Dans les textes aussi. Il a taillé la pierre et l’argile, il s’occupe des mots maintenant. Des textes sombres, amers, parfois transpercés par la lumière. Ce disque, c’est le temps d’une parole ou d’un chant parlé, cette façon d'oraliser les textes. Et viennent les silences, parce que Marcel Kanche fait l’économie des notes pour nous rendre sa musique plus évidente, ses paroles encore plus criantes de poésie. Et puis le charme des voix de Carolyn Carlson et Isabelle Lemaitre K, comme une lumière, une respiration. L'intelligence... Et nous vivrons avec ce disque une divine idylle... |