"Moi seul sait que je n’ai pas encore réalisé ce que je dois réaliser"
Comme une invitation à l’introspection, Trio pour un monde égaré est un tout. Trois récits croisés où chaque personnage parle d’un "je" dont il vient à douter. Chacun est en prison, impalpable ou bien réelle. Une fois la guerre s’annonce, une fois la guerre a laissé trop de séquelles, une fois elle est intérieure.
Cherchant à cacher son passé, Willy Chow veille d’un œil inquiet sur la citadelle de Salz aux portes d’un désert ouvrant sur la mer. Il vit de ces habitudes qui nous rassurent avec l’illusion d’être enfin anonyme. Pourtant, il voit venir une nouvelle guerre sur ses terres.
Tate Combo doit fuir de mauvais présages et se retrouve seule dans un pays inconnu. Elle rencontre un photographe qui expérimente la chirurgie esthétique pour des retouches plus vraies que nature sur ses modèles, il la convainc de lui vendre son identité physique. Tate devient alors sa propriété le temps d’un "contrat". Elle survit en comptant avec docilité les jours qui annoncent la libération qu’elle n’aura pas le temps de savourer.
Dans cette cellule sans notion de temps, Medi Soro ne sait plus s’il est ce Douglas Marenko qu’on lui ordonne d’admettre qu’il est. Peut-être aurait-il une vie meilleure à accepter d’être le mari de cette femme qui semble tellement le connaître. Après tout, certains détails lui sont étrangement familiers. Il avait pourtant abandonné son foyer pour protéger une importante découverte.
C’est un roman qui pose la question des libertés individuelles et universelles, de la détermination à combattre au risque de perdre la raison.
Le lecteur accède à l’intime du bouleversement humain. L’écriture est précise, les images s’enchaînent et nous imprègnent. Au terme d’une lecture palpitante, une postface autobiographique inattendue à son fils Malik qui nous rappelle comme Marie Redonnet vit elle aussi entre deux mondes en métamorphoses.
Trio pour un mond égaré est à lire d'une seule nuit, à retrouver à la couleur d'un autre jour inquiet, et à partager pour engager des débats essentiels.
Mélanie Martin
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