Spectacle conçu et mis en scène par Tiago Rodrigues, avec Mathieu Boisliveau, David Geselson, Grégoire Monsaingeon, Alma Palacios et Ruth Vega Fernandez.
Jamais le grand roman flaubertien "Madame Bovary" a jamais, et autant, fait rire que dans la version scénique "Bovary" élaborée par le metteur en scène Tiago Rodrigues.
Il créé un objet théâtral singulier qui hybride une adaptation de celui-ci traduisant sa lecture personnelle de l'oeuvre, des procès-verbaux des audiences du procès pour outrage à la morale et aux bonnes mœurs intenté contre Gustave Flaubert et la Revue de Paris, dont l'orientation politique déplaisait à l'Empereur Napoléon III, dans lequel le roman avait paru sous forme de feuilleton et de la correspondance de Flaubert avec Elisa Schlésinger.
L'entreprise s'annonce hardie, l'exercice se révèle réussi en tant que spectacle-manifeste contre la censure et pour la liberté de l'artiste.
En ce qui concerne le coeur du "sujet", Tiago Rodrigues transforme radicalement le personnage d'Emma Bovary, fille de paysan midinette, qui confond la vie et la fiction romanesque et aspire à l'ascension sociale, acculée au suicide par son incurie pécuniaire et ses déceptions amoureuses, qui a donné son nom au bovarysme, avatar d'une affection psychopathologique essentiellement féminine, la neurasthénie, qui était fort en vogue au 19ème siècle.
En effet, Emma Bovary est érigée non seulement en victime sacrificielle mais en championne de l'épanouissement personnel, née trop tôt dans un monde trop médiocre et vulgaire, en parangon du féminisme et symbole de liberté d'expression.
Dans un décor de Angela Rocha, sol jonchées de feuilles de papier et claustras de des loupes, autour d'une Emma solaire incarnée par Alma Palacios déjà remarquée dans "Mademoiselle Else", les comédiens, tous excellents, remplissent leur mission de caricature jubilatoire qui préside même aux scènes d'ébats amoureux.
A savoir Mathieu Boisliveau en Flaubert gai luron qui fait de la figuration, Grégoire Monsaingeon en mari ridicule et benêt consommé qui mérite bien ce qu'il lui arrive, David Geselson en avocat qui se répand en envolées lyrico-intellectuelles pour contrer l'exégèse instrumentalisée du procureur interprété de manière survoltée qui frise souvent le numéro d'acteur par Ruth Vega Fernandez. |