"Sex
drugs and rock’n roll chantait" le cockney de père…Oui,
Baxter est le fils du père Ian Dury, des Blockheads.
Difficile de passer à la postérité lorsque
votre géniteur est déjà passé par là
(Demandez à Sean Lennon juste pour voir…).
Et pourtant. Floor Show du fils s’annonce
comme la révélation de la rentrée. Sans repères
apparents et sans faire de bruits, Baxter Dury
parvient à faire oublier les comparatifs.
Un groupe de dépressif jouant du Wurlitzer et de la Stratocaster
dans la Westminster Abbey. Voila pour le pitch de Floor Show. Rien
de comparable et rien de semblable n’avaient eu l’audace
d’arriver jusqu’aux tympans depuis au moins 300 albums.
La batterie éthérée et le rythme très
Velvet, "Francesca’s party" introduit l’auditeur
dans Floor Show comme on introduirait un cercueil dans un mariage.
Improbable et percutant, Baxter Dury surprend. Bonheur, joie de
vivre et spleen s’y croisent en ombres chinoises, avec Baxter
en chef d’orchestre, pour un concentré d’émotions
tout en sueur. Sueur de l’effort et envie d’en découdre,
si le Dury étonne, c’est avant tout pour le mixage
de sa voix et de celle de Johanna Hussey, chanteuse
inconnue. Deux voix improbables, se mêlant jusqu’à
la fusion et comblant facilement les capacités vocales limitées
du bellâtre.
Même s’il s’en défend à longueur
d’interviews, c’est quand il sonne comme un Lou
Reed conteur d’histoires funestes et tragiques que Baxter
Dury sonne le plus juste. "Cocaïne man",
deuxième titre et déjà sommet du disque, entêtera
l’auditeur des nuits entières avec sa basse morbide
et ses chœurs noirs comme l’ébène. L’accent
british dandy sur la langue, le chant se mêle aux guitares
acérées pour raconter l’inexplicable, et Baxter
frôle un instant l’état de grâce en maniant
le slow talking comme Gainsbourg jadis ("Histoire
de Melody Nelson").
Le chanteur chante faux. C’est indéniable. And so
what ? Baxter Dury sait s’entourer et combler ses faiblesses.
Prenez Damon Reece (batteries) et Mike
Rooney (guitares) et vous obtenez rien de moins que le
combo de Spiritualized jouant pour vous les meilleures
notes d’une musique inclassable. Riffs acérés
et larsens en arrière plan, Floor Show remet au goût
du jour la beauté des parties instrumentales ("Waiting
for Surprises").
Sur "Sister Sister", les jeux de voix de "Baxter
la durite" et son acolyte rappelleront aux connaisseurs
Home, le duo binaire de Biolay et Chiara Mastroanni. Comme
si le Benjamin avait gobé mille ectasys avant d’en
recracher un vomi bleu ciel...
Véritable mur du son créé par Mike Rooney,
Floor show impressionne par sa maturité et son aisance. Paroles
incompréhensibles et ambiance morbide, le songwriter en devenir
inscrit son empreinte dans le marbre, entre Bowie (Le très
Ziggy Stardust "Cages") et Nick Cave
("Floor Show").
Espérons seulement que le garçon n’apprendra
pas à chanter. Les erreurs sont trop belles... |