Projet théâtral documentaire conçu par Fatima Soualhia Manet d'après des textes et photos de Jane Evelyn Atwood, avec Mara Bijeljac, Anne Sophie Robin, Fatima Soualhia Manet, Alice Varenne, Danica Bijeljac et Christophe Casamance.
La comédienne et metteuse en scène Fatima Soualhia Manet a conçu, avec la collaboration artistique de Christophe Casamance, une partition ressortant au théâtre documentaire sur le thème de l'incarcération féminine en utilisant comme matériau travail, engagé et critique, de la photographe américaine Jane Evelyn Atwood.
Relevant non du reportage mais de l'étude documentaire, celui-ci, réalisé en immersion de longue durée dans des établissements pénitentiaires de différents pays et publié sous le titre "Too Much Time - Women in prison", met en résonance photos et témoignages de détenues et entretiens avec différents acteurs de l'institution pénitentiaire pour dresser un consternant constat sur l'univers carcéral et la situation psychique des femmes condamnées à la stigmatisation, l'exclusion et la réclusion parfois à perpétuité.
Réussie, la transposition scénique retient cette structure en paroles croisées avec projection de photos et vidéo d'extraits d'une interview de leur auteure.
Les témoignages présentés se rapportent à des femmes dont l'acte criminel, un homicide intrafamial, meurtre du conjoint ou infanticide, révèle une situation antérieure, et souvent atavique, non seulement de misère sociale, affective et intellectuelle mais également de violences masculines graves subies dès l'enfance.
La sobriété et l'épure guident la mise en scène de Fatima Soualhia Manet. Les silhouettes des intervenants tous vêtus de noir se distinguent à peine sur un plateau vide plongé dans les lumières crépusculaires de Flore Marvaud dont le clair-obscur dessine au sol des lignes évocatrices de barreaux cellulaires.
Quand un faisceau lumineux éclairent les visages, en contrepoint au discours officiel porté par Christophe Casamance, Mara Bijeljac, Anne Sophie Robin, Alice Varenne, Danica Bijeljac et Fatima Soualhia Manet délivrent sans pathos ni misérabilisme des fragments de vécus tragiques et douloureux qui questionnent sur le noeud gordien de la justice pénale que constitue la prison tant en ce qui concerne l'efficacité des fonctions assignées que ses carences patentes en termes d'humanité et les maux spécifiques à l’enfermement,
Contrairement au récent "Tous mes rêves partent de la Gare d'Austerlitz" écrit par le dramaturge Mohamed Kacimi à partir de son expérience au sein d'un atelier d’écriture en prison, "Too Much time - Women in prison" se positionne en réquisitoire, qualifiant au demeurant de "pire" la situation française, qui ne prête guère à l'espérance tout en devant sans doute être réactualisé car l'enquête de Jane Evelyn Atwood concerne les années 1989-1998. |