Spectacle de cabaret musical conçu et mis en scène par Stéphan Druet, avec Marisa Berenson, Stéphane Corbin (en alternance Simon Legendre), Sebastiàn Galeota, Jacques Verzier (en alternance Olivier Breitman), Hugo Chassaniol (en alternance avec Loïc Olivier) et Victor Rosi. La fascination exercée par le cabaret berlinois, lieu de divertissement constituant le miroir politique, social et culturel de l'entre deux-guerres mondiales qui participe de la mythologie de la capitale allemande, perdure en inspirant auteurs et metteurs en scène à l'instar de Stéphan Druet qui en livre sa personnelle et très réussie déclinaison avec "Berlin Kabarett".
Le spectacle qui ressort tant à la comédie musicale qu'à la revue, s'ordonne autour du parcours de vie d'une prostituée reconvertie en directrice de cabaret omnipotente dans le petit univers de son "antre" qui bénéficie de la protection de ses "amis" du IIIème Reich et du climat artistique qui traduisait l'atmosphère d'une époque janusienne tentant de conjurer l'angoisse et le principe de réalité en se réfugiant dans le divertissement débridé.
Pour constituer la partition musicale qui notamment soutient les numéros d'un music-hall échevelé opérant entre caricature, satire, grotesque, trivialite et sentimentalisme mélodramatique, bien évidemment Stéphan Druet a puisé dans le répertoire fameux de mémorables chansons cabarettiques de l'époque.
Telles "Whisky Bar" et "Ich bin die fesche Lola" mais également dans celui de genre différent comme l'opérette française des années 1920 avec des airs de "Dédé"' de Henri Christiné et Albert Willemetz tout en y insérant de savoureuses compositions originales mises en notes par Stéphane Corbin et dont il signe les paroles qui sont dispensées en solo, duos ou de manière chorale.
De surcroît, "Berlin Kabarett" bénéficie d'une prestigieuse - et internationale - tête d'affiche en la personne de Marisa Berenson qui a débuté au cinéma sous les hospices du trio culte formé par Luchino Visconti, Bob Fosse et Stanley Kubrick, respectivement avec "Mort à Venise", "Cabaret" et "Barry Lyndon".
Spectacle-événement donc, et ce d'autant plus qu'elle a accepté le rôle à contre-emploi d'une femme sans états d'âme, issue d'un milieu défavorisé, qui a développé une stratégie de survie qui imbrique détermination, opportunisme et cynisme, et qu'elle chante, et fort bien de façon particulièrement sensible dans deux titres mis en musique par Kurt Weill, "La chanson de Nanna" et "La complainte de la Seine".
Pour l'entourer, Stéphan Druet a réuni des valeurs sûres tant au niveau musical, avec une formation piano-percussions-cornet, formée de Stéphane Corbin, Hugo Chassaniol et Victor Rosi, que pour la danse, avec la chorégraphe Alma de Villalobos, que pour l'interprétation.
Ainsi autour de de Marisa Berenson, silhouette magnifique, élégance remarquable et immenses yeux lumineux, Jacques Verzier figure incontournable de la scène musicale, et Stéphane Corbin campent respectivement l'auteur ex-amant et le compositeur qui élaborent le programme du cabaret.
Sebastiàn Galeota, qui maîtrise parfaitement le registre du travestissement comme vu, entre autres, dans "Renata" et "DolcEvita", incarne magnifiquement le fils mal aimé de la "patronne" et homosexuel méprisé qui, dans de stupéfiants numéros de transformisme soutenus par les ébouriffants costumes de Denis Evrard, brûle les planches de ce "Berliner Broadway". Sous la direction émérite de Stéphan Druet qui a opté pour une judicieuse scénographie panoramique syncrétisant différents espaces scéniques et a confié à Christelle Toussine l'élaboration de superbes lumières, usant du contraste entre crépusculaire et spectaculaire, les officiants portent avec talent cette immersion dans le burlesque sur fond d'antisémitisme, d'homophobie et d'autodafés et de tragédie historique.
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