Comédie satirique écrite et mise en scène par Jean-François Sivadier, avec Nicolas Bouchaud, Marie Cariès, Charlotte Clamens, Vincent Guédon, Jean-François Sivadier et Nadia Vonderheyden.
Auteur, comédien et metteur en scène de théâtre et d'opéra, Jean-François Sivadier a, dès son entrée en piste en 1997, usé du méta-théâtre dans un opus qui, complété d'une deuxième partie en 2003 et, depuis, intitulé "Italienne scène et orchestre" qui a été unanimement salué par la critique et le public.
Si la thématique est classique, son traitement est atypique et ce à plus d'un titre.
En effet, constituant son manifeste théâtral sur le théâtre de la pensée, la partition revêt la forme d'une comédie satirique sur le monde du spectacle vivant, et plus précisément l'opéra, qui, en un florilège de tableaux savoureux, révèle l'envers du décor, en l'occurrence tout ce qui précède la première représentation.
Soit le temps des répétitions traversé, indique-t-il, par "le bonheur de travailler à la construction laborieuse d'un rêve commun dans un généreux et bordélique laboratoire d'humanités".
Par ailleurs, il bat en brèche l'illusion théâtrale d'une manière novatrice dès lors que le spectateur n'est pas invité à découvrir les coulisses depuis la salle mais est érigé en "acteur-spectateur" en étant installé successivement en fond de scène puis dans la fosse d'orchestre, le public se substituant aux choristes et aux musiciens.
Ainsi participe-t-il, certes de façon passive, aux répétitions de "La Traviata" de Verdi en suivant les tribulations scéniques d'un sextet de figures emblématiques dont le ridicule et les travers sont savamment épinglés.
Et les aléas des répétitions engendrés par ce genre de spectacle qui, compte tenu du nombre d'intervenants, ressort à la grosse machine ne sont pas sans incidence sur le climat qui devient survolté.
De plus, les egos s'échauffent et les postures se cabrent en raison de l'antagonisme patent entre les deux deus ex machina de l'entreprise.
En l'espèce, entre un metteur en scène novice dans ce registre qui se complaît dans la philosophie d'un théâtre utopique comme art pouvant conduire à la transcendance de la réalité et à l'élévation de l'âme et un chef d'orchestre aguerri hybride de tyran à baguette mégalomane et de gagman, interprétés par deux compères complices.
Respectivement Nicolas Bouchaud, parfait en illuminé mystique "qui cherche" et ce non avant mais pendant les répétitions de manière empirique "sur le vif", , avec une assistante polyvalente et corvéable à merci, entre la crise de nerfs larvée et lobotomisation de confort superbement campée par Nadia Vonderheyden, et Jean-François Sivadier, malicieux et hilarant dont la nature comique exubérante fait merveille.
Quant à leurs "ouailles", elles s'avèrent caricaturales à souhait avec la chanteuse second rôle qui se veut résolument comédienne pour un théâtre d'incarnation du type Actors Studio (Marie Cariès époustouflante), le premier ténor confirmé et italien qui joue les électrons libres (Vincent Guédon moulin à paroles délirant) et, bien évidemment, la prima donna, grande chanteuse internationale et diva infatuée à laquelle Charlotte Clamens apporte une désopilante loufoquerie.
Le spectacle revient régulièrement à l'affiche mais ce n'est pas une raison ni une excuse pour différer cet intelligent et jouissif rendez-vous. |