Comédie dramatique de Anton Tchekhov, mise en scène de Christian Benedetti, avec Vincent Ozanon, Laure Wolf, Philippe Lebas, Philippe Crubézy, Brigitte Barilley, Alix Riemer, Yuriy Zavalnyouk, Lise Quet, Nicolas Buchoux, Christian Benedetti, Antoine Amblard, Martine Vandeville et Alex Mesnil.
Après "La Mouette", "Oncle Vania", "Trois Soeurs" et "La Cerisaie", Christian Benedetti poursuit son entreprise d'"Intégrale Tchekhov" avec "Ivanov" en retenant non la seconde version qualifiée de drame et la plus représentée, mais la première mouture sous-titrée "comédie" nonobstant les deux morts au compteur.
Mais sa proposition résulte d'une adaptation décontextualisée, nonobstant quelques anachronismes, au terme d'une version très resserrée, d'une nouvelle traduction élaborée par Brigitte Barilley, Laurent Huon et lui-même qui opère dans une langue parlée contemporaine avec ses failles lexicales et syntaxiques.
Dans un décor intemporel à géométrie variable conçu avec Emma Depoid, dont la manipulation à vue par les comédiens ne s'avère pas judicieuse, Christian Benedetti place cette tragi-comédie dans le registre de l'hybridation, celle de la satire burlesque à la manière de l'avant-garde russe et de la farce triviale, entre paillardise et affairisme façon "commedia dell'arte".
Ce parti-pris peut déconcerter, voire disconvenir, tout comme ses fondamentaux de mise en scène tenant à la combinaison paradoxale d'un rythme soutenu, avec une élocution véloce qui gomme toute nuance et écarte tout psychologisme, et de pauses subites en forme d'arrêts sur image.
Et il ordonne la partition autour de la fièvre de l'argent qui - à l'exception de trois coeurs purs saisis par l'amour - anime tout un petit monde de petits bourgeois sans qualité lesquels, en l'espèce dépouillés du lyrisme tchekhovien, deviennent confondants de vulgarité.
Ainsi le personnage-titre, propriétaire foncier endetté au bord de la faillite campé par Vincent Ozanon n'est plus un handicapé de la vie et un mélancolique empathique mais tel que, et comme l'a voulu son créateur, dépeint par son entourage : un veule coureur de dot.
Et un coureur de dot malchanceux car les parents de son épouse agonisante d'origine juive (Laure Wolf) aimée par son dévoué médecin (Yuriy Zavalnyouk) se sont bien gardés de la verser et celle de la jeune future (Alix Riemer), fille d'une usurière avaricieuse (Brigitte Barilley), est non seulement amputée de la dette mais convertie en titres que ne compensera pas les économies cachées du père (Philippe Crubéz).
Autour d'eux gravitent l'oncle compte désargenté (Philippe Lebas) qui envisage qui d'épouser une riche veuve joyeuse mais néanmoins circonspecte (Lise Quet) grâce à l'entremise de la marieuse en costume de babouchka (Martine Vandeville) et les écornifleurs (Nicolas Buchoux, Antoine Amblard et Alex Mesnil).
Le spectacle est scandé par les apparitions de Christian Benedetti en industrieux régisseur Borkine adepte de la "combinazione" qui, en perruque, chapka et bottes de moujik, se taille la part du lion avec un aussi inattendu que réussi numéro d'acteur. |