Comédie de Fre?de?ric Lordon, mise en scène de Luc Cle?mentin, avec Alexandrine Monnot, Loi?c Risser, Didier Boulle, Simon Bellahsen, Ge?rald Cesbron en alternance Denis Ardant), Alain Veniger et Luc Cle?mentin.
L'économiste Frédéric Lordon s'est fait chansonnier pour stigmatiser la crise des "subprimes" et sa résolution inattendue en France, puisque les banques qui en étaient à l'origine ont pu, grâce à l'aide de l'État, être renflouées... et passer le "mistigri" aux citoyens qui, depuis, doivent se serrer la ceinture.
"D'un retournement l'autre", fantaisie écrite en alexandrins par Frédéric Lordon, avait été déjà adapté au théâtre en 2012 par Judith Bernard et porté à l'écran quelques mois plus tard par Gérard Mordillat.
La version proposée par Luc Clémentin essaie d'être peut-être plus didactique que celle de Judith Bernard. Il faut dire que le temps s'est écoulé depuis le krach et que la crise économique a pris d'autres formes. Le scandale Madoff, dont Luc Clémentin avait d'ailleurs tiré un spectacle, est passé par là.
Deux présidents ont succédé à Nicolas Sarkozy, dont on se moque gentiment avec à la clé une imitation assez réussie de Loïc Risser qui joue le président marié à une "Carlita" dont l'originale pourrait être jalouse puisqu'elle a une voix de soprano colorature et a les traits d'Alexandrine Monnot.
Tous derrière leurs pupitres, traders et banquiers s'expliquent. D'abord paniqués par la crise, presque désespérés par son évolution, ils reprennent du poil de la bête et leur cynisme ricanant finit par reprendre de belles couleurs. Il faut dire que le pouvoir sarkozyste va se mettre à leur service.
Si les alexandrins, genre vers de mirliton plutôt que vers ciselés, font souvent mouche et provoquent le rire, la référence à une situation qui date d'une dizaine d'années est parfois un handicap. On a perdu la signification de certaines répliques qui ne posaient à l'époque aucun problème de compréhension. Il aurait sans doute fallu que Lordon actualise son texte pour qu'il soit tout à fait clair à l'ère Macron.
Le fait que chaque personnage ait l'air de lire son texte derrière son lutrin ne dynamise pas non plus la mise en scène de Luc Clémentin. Mais pouvait-il en être autrement pour que tous les spectateurs ne soient pas décrochés par la rhétorique des uns et des autres ?
Reste que ce "théâtre politique satirique" est une proposition originale dont il faut souligner les qualités. Aux côtés du couple présidentiel formé par Alexandrine Monnot et Loïc Risser, Didier Boulle, Simon Bellahsen, Gérard Cesbron (en alternance avec Denis Arcant), Alain Veniger et Luc Clémentin jouent plusieurs rôles, semblent prendre du plaisir à enchaîner les caricatures plus vraies que nature et à donner à l'esprit critique du public du bon grain à moudre.
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