Comédie de René de Obaldia, mise en scène de Wilfried Richard, avec Laly Meignan, Sylvie Guichenuy et Wilfried Richard. Il n'y a pas de pièces mineures dans le théâtre prolifique de René de Obaldia. Comme "La Baby-sitter", "Deux femmes pour un fantôme" date du début des années 1970 et son intrigue est d'une simplicité qui lui permet, cinquante ans après, de paraître d'une fraîcheur intemporelle.
Pourtant, on est face à un trio classique à la Guitry : la femme (Brigitte), la maîtresse (Viviane) et l'homme à la fois mari et amant. Avec cependant, une petite variante qui compte : alors que les deux femmes se rencontrent pour la première fois, leur sujet principal de discussion vient de se tuer sur la route d'Orléans... et les rejoint sous une forme fantomatique.
Avec un tel argument, Obaldia trousse une petite comédie pleine de charme et de malice. Si les deux femmes règlent leurs comptes, en ignorant qu'aucune ne pourra prendre physiquement le dessus, l'homme (Wilfried Richard), lui, étrenne sa "vie" de jeune mort.
C'est ainsi qu'il observe avec un certain détachement ses deux moitiés boire force gin pour Brigitte (Sylvie Guichenuy) et autant de whisky pour Viviane (Laly Meigna). Lui, il n'a plus besoin de s'enivrer pour connaître un état second. Pas plus qu'il ne lui est nécessaire d'écouter vraiment ces bien vivantes
Si l'une sent un grand froid dans le salon où elles se font face, l'autre trouve l'endroit surchauffé. Obaldia s'est amusé à imaginer un mari volage qui joue aux hommes d'ordre avec l'une et un contestataire tonitruant avec l'autre..
Peu à peu, celui qui avait tout embrouillé, découvre une nouvelle clarté. L'auteur des "Innocentines" redevient le grand poète, qu'il a d'abord et toujours été, pour lui insuffler de bien belles et mélancoliques tirades post-mortem.
Comme toujours chez lui, l'absurde et le fantastique a sa place, mais à dose homéopathique. Ce qui pourrait n'être qu'une gentille pochade bien rythmée, devient finalement une savoureuse tranche de vie... et de mort. On pourra aussi y écouter une sonate de Brejnev et l'on se dit que bien des spectateurs d'aujourd'hui se demanderont qui est ce disciple de Rachmaninov.
Comme quoi, au lieu de vieillir à l'instar de bien des textes théâtraux, "Deux femmes pour un fantôme" gagne en jeunesse. Et l'on remerciera Wilfried Richard, non seulement d'avoir su garder dans sa mise en scène la légèreté légendaire de René de Obaldia, mais d'avoir donné à celui-ci, l'occasion de faire au spectateur un coucou téléphonique avec un accent de gendarme par-dessus le marché !
Une heure vingt de pure fantaisie qui permet de retrouver le plus jeune des dramaturges actuels. |