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Interview  (Paris)  lundi 13 mai 2019

J'avais profité d'un passage dans le sud de la France pour rencontrer Thomas Boudineau, alias Le Flegmatic, dans son fief à Albi. C'était avant l'été, il faisait déjà beau et chaud. C'est à la terrasse d'un café que nous avons discuté de son nouveau disque, Ruines Nouvelles, une conversation parfois interrompue par les saluts de ses amis qui passaient dans cette rue commerçante située derrière les Halles.

Tout d'abord, tes paroles s'inspirent-elles de ton environnement familier ?

Le Flegmatic : Là, maintenant, l'endroit où l'on est ? Je ne sais pas, mais ça doit avoir une influence. J'ai le permis de conduire depuis peu de temps, ce qui me permet d'aller souvent dans les Cévennes. Cet album-là, je l'ai vraiment écrit en conduisant et en pensant à des chansons sur la route. L'environnement familier, ce serait la route, la route des Cévennes.

Peut-on parler de poésie du bitume, comme tu as fait de la poésie SNCF auparavant lorsque tu n'avais pas le permis ?

Le Flegmatic : Oui, c'est ça. Là, c'est plutôt une géopoésie de grands chemins à travers les plateaux du Larzac. C'est ça qui m'est devenu finalement familier, plus que mon environnement quotidien. Je pense beaucoup, même lorsque je n'y suis pas.

Considères-tu tes textes comme politiques ?

Le Flegmatic : Pas du tout. Même s'il est possible de les lire comme ça. Je pense qu'ils sont plus existentialistes.

Engagés alors ? Ou dégagés ?

Le Flegmatic : Dégagés, oui. À dégager même.

Tu te réfères souvent à Dylan. Or Dylan c'est en parler de sujet sociaux ou politiques aux États-Unis qu'il a mis en chansons. Personnellement, je lis dans tes textes quelque chose de l'ordre du social.

Le Flegmatic : Ah oui ? (Surpris) Dylan est ambivalent là-dessus. Il dit qu'il s'est juste assis à la terrasse des bistrots pour écouter ce dont les gens discutaient et pour sentir l'humeur du moment. J'ai composé cet album en partie pendant les élections présidentielles de 2017. Je sentais alors une tension dans l'air, qui existe encore voire a décuplé. J'ai essayé de capter cette atmosphère un peu électrique et d'en parler. Enfin, plutôt de parler de l'effet que ça avait sur moi. Je trouvais que le climat était tendu, j'ai essayé de le traduire à ma façon. Mais il n'y avait pas d'intention politique. C'est plutôt une expression de l'influence que la politique peut avoir sur quelqu'un. Personnellement, je pense qu'il faudrait dégager un peu.

Le qualificatif de "houellebecquien", qui est revenu plusieurs fois à ton sujet, te semble-t-il justifié ?

Le Flegmatic : C'est un grand adjectif. Je crois que Houellebecq parle beaucoup du manque de spiritualité, et du rapport la spiritualité qu'on aurait perdu dans l'ultralibéralisme. À ma façon, je me rapproche peut-être de cette quête spirituelle. Et du coup, mon personnage se situe un peu à l'écart. Tout à l'heure, je relisais le début de "L'Étranger" d'Albert Camus. Je me suis fait la réflexion que la première phrase, "Aujourd'hui maman est morte", était houellebecquienne. Camus, c'est peut-être le début de Houellebecq. Par contre, il y a chez Houellebecq une très grande désespérance. Je n'ai pas envie d'aller dans cette direction.

Moi, je vois des parallèles, dans les thèmes ou dans les images que ça m'évoque, entre certaines de tes chansons et certains de ses romans. Par exemple entre "L'espace d'un instant" et "Extension du domaine de la lutte", ou entre "L'autre rive" et "La possibilité d'une île".

Le Flegmatic : Pour en revenir à Camus, et donc à Houellebecq, je pense qu'il décrit ce sentiment que les autres vivent le bonheur de manière plus intense que ce qu'on a l'impression de vivre soi-même. On passe à côté du bonheur en regardant le bonheur des autres. Quelque part, c'est de l'envie. "Sur l'autre rive", ce n'est pas vrai aujourd'hui parce que nous sommes lundi et que toutes les terrasses, hormis celle-ci, sont fermées, ça peut commencer à une terrasse de bistro. Tu t'installes à une terrasse dans une ville que tu ne connais pas, et tu te rends compte qu'à la terrasse du bistrot d'à côté les gens ont l'air de beaucoup plus s'amuser. Les bars ferment dans 20 minutes et tu vas rentrer seul à l'hôtel.

Le projet a été financé de manière participative via We Are Unique. Pourtant, avec les deux albums précédents, tu es rentré en playlist sur FIP. Ça ne t'a pas permis de prendre des contacts avec des labels, et ça n'a pas facilité la sortie de cet album ?

Le Flegmatic : Pas du tout. Aucun contact. Je me suis rendu compte qu'il y avait deux mondes qui évoluaient totalement à part. D'un côté le monde de la presse et des radios et de l'autre le monde du live et du disque coexistent sans vraiment avoir de connexion. Malgré de très bons articles après la sortie de Bouleversement Majeur, je n'ai reçu aucun coup de fil ni aucun email de maison de disques ou de tourneur. Donc c'est à toi, ou à quelqu'un avec qui tu pourrais travailler, de transformer l'essai.

D'après toi, le fait d'habiter loin de Paris limite-t-il les possibilités de promotion ?

Le Flegmatic : Oui, certainement. Mais pour moi c'est un choix. De toute façon, je n'aurais pas les moyens de vivre à Paris. À Paris, l'électricité est plus vivante. Ici, l'électricité est statique. Tu n'es pas au cœur du sujet. Par contre, tu es au cœur de ton sujet, tu as beaucoup de temps pour écrire tes chansons. C'est un temps de concentration. Tu n'es pas beaucoup dérangé.

Néanmoins, ici, te sens-tu isolé, ou travailles-tu avec d'autres artistes locaux ?

Le Flegmatic : Depuis le précédent album, "Bouleversement Majeur", j'ai rencontré un guitariste génial qui s'appelle Romain Nègre. Pour Ruines Nouvelles, on a beaucoup travaillé ensemble. On a passé de nombreuses soirées à jouer ensemble, à essayer de trouver le son de cet album. On a travaillé les arrangements ensemble. J'ai écrit les chansons en sachant que j'allais les jouer avec lui. Ça a été une vraie rencontre. On était en autarcie. On s'est mis sur notre petite île, et on a construit une chanson comme ça. Mais quand j'écris, je me sens totalement disponible au reste du monde. Je me pose aux terrasses des bistrots et j'attends de voir ce qui se passe.

Dans ces cas-là, es-tu aussi ouvert à d'autres arts ?

Le Flegmatic : Pas autant que j'aimerais. Je reste ouvert au cinéma et à la littérature, mais j'aimerais aller voir plus de spectacles de danse, d'opéra ou de concerts de musique classique. Par contre, complètement à la littérature, et aux livres que je suis en train de lire. Je pille des auteurs, je pille sans vergogne des phrases de livres. Mais la littérature, c'est un rapport entre toi et toi-même. Tu restes en circuit fermé.

Récemment, j'ai fait un stage avec un groupe de chanson traditionnelle des Pyrénées. Et là, tu es à la croisée de l'art populaire, la tradition orale, le fait que tout le monde puisse chanter les chansons que tout le monde connaît. Je sens que j'ai envie de m'ouvrir vers ça.

Le live est-il un bon moyen pour appréhender ton univers ? Du public de quelle scène te sens-tu le plus proche ?

Le Flegmatic : Mes chansons précédentes, j'ai aimé les jouer dans des salles de style cabaret. Il y avait quelque chose d'un peu humoristique et j'arrivais à choper le public avec ça. Du coup, il se passe quelque chose dans la salle, j'adaptais alors mon set en fonction des réactions du public. Les chansons que j'écris aujourd'hui sont un peu différentes. C'est un peu un tunnel. J'ai besoin quand même de sentir la salle. En live, les gens sont suspendus à ce que tu chantes. C'est beaucoup de responsabilités finalement.

Mais j'aime aussi l'idée que mes chansons vont s'insérer dans un flux radiophonique. Lorsque j'ai appris que certaines des chansons de mon album précédent avaient été sélectionnées par FIP, j'adorais l'idée que des gens allaient pouvoir les écouter au milieu des chansons d'autres artistes. Que mes chansons allaient s'insérer dans un flux, comme on s'insère dans la circulation. J'aime l'idée que les gens puissent s'en souvenir, ou ne pas s'en souvenir.

Retrouvez Le Flegmatic
en Froggy's Session
pour 4 titres en cliquant ici !

 

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Articles : Listen in Bed - Les dix chansons préférées de Thomas Boudineau alias Le Flegmatic (émission 22 saison 4)
L'interview de Le Flegmatic (samedi 14 mars 2015)

En savoir plus :
Le site officiel de Le Flegmatic
Le Bandcamp de Le Flegmatic
Le Soundcloud de Le Flegmatic
Le Facebook de Le Flegmatic

Crédits photos : Arnaud Kehon (retrouvez toute la série sur Taste Of Indie)


        
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# 17 mars 2024 : le programme de la semaine

De la musique, des spectacles, des livres. Aucune raison de s'ennuyer cette semaine encore. Ajoutons à cela nos chaines Youtube et Twitch et la semaine sera bien remplie.

Du côté de la musique:

"Almost dead" de Chester Remington
"Nairi" de Claude Tchamitchian Trio
"Dragging bodies to the fall" de Junon
"Atmosphérique" de Les Diggers
quelques clips avec Nicolas Jules, Ravage Club, Nouriture, Les Tambours du Bronx, Heeka
"Motan" de Tangomotan
"Sekoya" de Tara
"Rita Graham partie 3, Notoriété", 24eme épisode de notre podcast Le Morceau Caché
et toujours :
"Scars" de Greyborn
"Rooting for love" de Laetitia Sadier
"Quel est ton monde ?" de Olivier Triboulois
"Letter to self" de Sprints
"TRNT best of 1993 2023)" de Tagada Jones
"Beyond the ridge" de Wildation
Quelques clips chez YGGL, Down to the Wire, Malween, Lame, For the Hackers et Madame Robert

Au théâtre

les nouveautés :

"Une vie" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Le papier peint jaune" au Théâtre de La Reine Blanche

"Lichen" au Théâtre de Belleville
"Cavalières" au Théâtre de la Colline
"Painkiller" au Théâtre de la Colline
"Les bonnes" au théâtre 14
et toujours :
"A qui elle s'abandonne" au Théâtre La Flêche
"Les quatres soeurs March" au Théâtre du Ranelagh
"Mémoire(s)" au Théâtre Le Funambule Montmartre
"N'importe où hors du monde" au Théâtre Le Guichet Montparnasse
"Quand je serai un homme" au Théâtre Essaïon

Du cinéma avec :

"El Bola" de Achero Manas qui ressort en salle

"Blue giant" de Yuzuru Tachikawa
"Alice (1988)" de Jan Svankmajer
et toujours :
 "Universal Theory" de Timm Kroger
"Elaha" de Milena Aboyan

Lecture avec :

"La sainte paix" de André Marois
"Récifs" de Romesh Gunesekera

et toujours :
"L'été d'avant" de Lisa Gardner
"Mirror bay" de Catriona Ward
"Le masque de Dimitrios" de Eric Ambler
"La vie précieuse" de Yrsa Daley-Ward
"Le bureau des prémonitions" de Sam Knight
"Histoire politique de l'antisémitsme en France" Sous la direction d'Alexandre Bande, Pierre-Jerome Biscarat et Rudy Reichstadt
"Disparue à cette adresse" de Linwood Barclay
"Metropolis" de Ben Wilson

Et toute la semaine des émissions en direct et en replay sur notre chaine TWITCH

Bonne lecture, bonne culture, et à la semaine prochaine.

           
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