Après le superbe ouvrage de William Melvin Kelley, me voilà de nouveau plongé dans un très beau roman traitant aussi du racisme et de la ségrégation. A la plume une auteure américaine, né à Atlanta, qui a vécu dix ans à New-York avant de retourner dans son sud natal. Tayari Jones est l’auteur de quatre romans, tous imprégnés des problématiques de la Géorgie mais aussi de la grâce de cette terre du sud. Un mariage américain est le premier roman traduit en français. Il a crée l’événement aux Etats-Unis à sa sortie, salué notamment par l’ancien président Barack Obama.
Celestial et Roy viennent de se marier. Elle est à l’aube d’une carrière artistique et il rêve de se lancer dans le business. Ils sont jeunes, beaux et incarnent le rêve américain à ceci près que Celestial et Roy sont noirs, dans un état sudiste qui fait peu de cadeaux aux gens comme eux.
Un matin, Roy, accusé de viol, est emmené au poste. Celestial dit qu’il est innocent, mais la justice s’empresse de le condamner. Les mois passent, la jeune femme tient son rôle d’épouse modèle jusqu’au jour où cet habit devient trop lourd à porter, elle trouve alors du réconfort auprès d’André, son ami d’enfance. A sa sortie de prison, Roy retourne à Atlanta, décidé à reprendre le fil de la vie qu’on lui a dérobée.
Quel bel ouvrage que ce mariage américain qui réunit tous ce que l’on aime dans la littérature : des personnages profonds et sensibles, réalistes avec leurs qualités et leurs défauts et une histoire de laquelle se dégage une très grande humanité autour de thèmes contemporains comme la famille, la loyauté et le racisme.
L’écriture fluide, agréable et délicate plonge le lecteur autour de trois personnages principaux qui prennent la place de narrateur à tour de rôle dans des chapitres courts qui nous déroulent une histoire prenante et intrigante.
Roy se retrouve en prison. Il s’est trouvé au mauvais moment et au mauvais endroit, a été condamné de manière expéditive à une douzaine d’années d’incarcération par un jury composé de blancs. En prison, il entretient une relation épistolaire que l’on suit dans le livre, nous permettant de prendre connaissance sur l’histoire de ce couple et d’y voir ses faiblesses au fil des lettres, aboutissant au rapprochement de Celestial et André, un ami commun qui les a fait se rencontrer. Cette prison, l’incarcération de Roy vont donc modifier les relations de ces trois personnages, dévoiler des secrets de famille enfouis depuis longtemps et procurer des rencontres inattendues.
Ce qui m'a beaucoup plus dans cet ouvrage tient dans le fait que l’auteur n’a pas cherché à faire de son livre un ouvrage qui ferait seulement des blancs les vilains méchants qui emprisonnent à tort un gentil noir. Evidemment, elle dénonce le racisme ordinaire, le système judiciaire et carcéral américain mais ce n’est pas le sujet central de l’ouvrage. Avec cet ouvrage, elle cherche surtout à nous montrer comment une décision injuste, une erreur judiciaire peut bouleverser et profondément changer la vie des protagonistes et de leur entourage (le père de Roy notamment qui est un autre personnage particulièrement attachant du livre).
Il est donc question de justice et d’injustice, de racisme et de famille, de loyauté au sein d’un couple qui se retrouve mise en difficulté par la séparation et l’éloignement. Il est de couple et d’amour aussi, de la famille aussi. Tous ces sujets sont traités par Tayari Jones avec une grande finesse d’analyse et une grande justesse. |