Comédie-vaudeville de Eugène Labiche, mise en scène de Daniel Mesguich, avec Frédéric Cuif, Sophie Forte, Guano, Alice Eulry d’Arceaux et Frédéric Souterelle.

La réunion sur une même affiche de Daniel Mesguich, grand metteur en scène du répertoire classique, et Eugène Labiche, vaudevilliste auteur de nombreux opus mineurs, des pochades qu'il qualifiait lui-même de "roustissures", s'avère tout aussi inattendue qu'inédite et, surtout, décoiffante sur scène.

En effet, Daniel Mesguich joue à fond la carte du rire en concoctant un pur divertissement placé sous le signe de la fantaisie débridée par une ébouriffante combinaison de tous les genres et procédés comiques qui correspond à l'esprit labichien.

Ainsi, pour la bonne cause, il s'autorise quelques libertés avec l'opus original de "Mon Isménie", comédie en un acte sur la rebattue trame de l'abus de l'autorité paternelle, sans cependant la dénaturer, en l'érigeant en parodie de parodie et la poussant dans les derniers retranchements de la boursouflure comique.

Dès lors, la partition, par ailleurs truffée d'anachroniques clins d'oeil référentiels, entre autres cinématographiques, s'enrichit-elle de l'adjonction de gags aussi bien visuels que sonores, tels ceux du chemin de fer et du torride tango des amoureux.

Daniel Mesguich opte pour un parti pris scénographique radical avec un plateau nu sur lequel s'agitent, entre commedia dell'arte et Grand Guignol et avec les couplets mis en musique par Hervé Dévolder, des personnages farcesques en costumes d'époque confectionnés par Corinne Rossi interprétés par un époustouflant quintet de comédiens capables de partir en vrille à la seconde qui donnent la pleine (dé)mesure de leur talent notamment dans les monologues.

Frédéric Cuif, en surréaliste valetaille rêvant de devenir rosière, et Sophie Forte, en tantine toupie rouge adepte du karaté, entourent le délicieuse Alice Eulry d’Arceaux qui, dans le rôle-titre, qui n'est plus une oie blanche mais une jeune femme déterminée sous emprise de ses hormones qui peut se transformer en incroyable Hulk.

Elle constitue l'enjeu de l'"hénaurme" rivalité entre un prétendant coureur de femmes et de dot interprété par l'humoriste à l'immense silhouette longiligne Guano, une révélation, et un père égocentrique furibard avec la composition hilarante de Frédéric Souterelle qui arbore simultanément, dans leur dysnésienne déclinaison, la mine du chat du Cheshire de "Alice au pays des merveilles" et le regard de Kaa du "Livre de la Jungle" et les mimiques de Louis de Funès.

Un divertissement réussi, étourdissant et jubilatoire.