Une armée d'anglais débarquait d'outre Manche, par milliers. Ils étaient chevelus et sales, l'accent cockney, pétris d'influences et le regard fier. Par monts et par vaux ils allaient, terrassant leurs concurrents d'un seul accord, l'ampli Marshall en étendard. Ils voulaient reconquérir le rock ; se l'approprier, tuer les Beatles et anéantir les Kinks. Démolir Townsend, aplatir Keith et Bolan.
Leurs noms? La nouvelle scène anglaise, pleine de groupe en The, comme les Chaussettes Noires et les Chats Sauvages en d'autres temps. La rouflaquette rafraîchie, les douilles légères, ces groupes se disaient d'un nouvel ordre, plus royalistes que le roi. Ils avaient connus leurs années de galères, la trime des Lads et les boissons pas chers. Pete le Doherty avait ouvert la voie.
Ils. Ce soir les "Ils" s'appelaient Stuck in the sound, Apartment et The Kooks. Trois groupes trois regards trois destinées. Qu'on espère différentes, prospères. On espère.
Commençons par le commencement. Stuck in the sound. Un groupe français aux consonnances anglaises.
Un moindre mal pour cette soirée des Inrockineries. Son lourd et ambiance moite pour ce groupe en devenir.
Jeune pousse d'un rock qui se renouvelle, fait penser à Franz dans son phrasé ("Toyboy"). Nerveux comme une langue de bœuf, Stuck in the Sound étonne sans surprendre. Serait "The Next big thing" si l'on n'avait pas entendu ces riffs chez leur confrères.
Possède quand même le mérité d'exister, d'y croire, l'envie de séduire son public. Enflammer la salle avec son rock innocent et désengagé. S'écoute plus facilement sur disque tout de même, afin de saisir les nuances d'une musique quelque peu lourde à digérer en live. Un "Dumbo" relève la sauce en final. On voudrait jouer au rock-critic blasé qu'on apprécierait quand même ce groupe aux débuts prometteurs (notamment sur "Delicious dog")
Next ! Apartment.
Rien à voir avec le groupe australien mythique des 80' , mort depuis dans les charts et dans les rayons FNAC. Nouvelle révélation anglaise (Sic) de cette fin d'année, Appartment joue dans la cour des hippies électriques.
David Caggiari, son chanteur, mène l'accent cockney très loin.
De quoi ravir le revival rock indé en France à la sortie prochaine de l'album. Voix éraillée (Où est Rod Stewart ?) et guitare nonchalante, Apartment comble son public à la mèche rebelle en moins de deux chansons, dont "Everyone says I'm Paranoid".
David de Santis a l'allure d'un Brian Setzer. On oublie ses problèmes et son quotidien. On attend patiemment la french release.
Les titres s'enchaînent mais manque LE tube ; l'heure qui tourne, les cigarettes qui s'écrasent…
Next !!! The Kooks. Pas le genre à cuisiner ceux la. Plutôt du genre à manger dans l'assiette. Et sans couverts.
Encore un groupe en The me direz-vous. Oui c'est évident. Mais le son est bon. Assez rare pour le signaler. Guitares en reverb', faisant irrémédiablement penser à Editors, à The Edge pour les plus reconnaissants.
Le pied se fait plus danseur, tapote nerveusement, on sent la différence avec les jeunes pousses précédentes.
Bonne humeur, entre les Kinks pour la fraîcheur et les influences citées plus haut. Luke aux vocales et Hugh Harris élève le débat. On imagine déjà le process marketing caché derrière, le surf sur la mode dancing rock ; on s'en fout en fait. On apprécie non sans se poser la question suivante : où sont passées les mélodies accrocheuses de leurs aînés ? La réponse se trouve sûrement backstage…Les Inrockineries restent malgré tout un défricheur de talents bien agréables en ce mois de décembre qui s'éternise.
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