Petit à petit, les éditions La peuplade se font une place dans le marché français du livre. En nous proposant des ouvrages originaux de grande qualité, je pense notamment à l’excellent Ténèbre de Paul Kawczack sorti en France il y a quelques mois, nous commençons à entendre beaucoup parler de cette maison d’édition qui gagne à être connue.
Ils viennent de sortir un petit ouvrage d’un peu plus de 120 pages écrit par Mireille Gagné qui confirme tout ce que je viens de vous dire. Mireille Gagné est une auteure québécoise qui a déjà publié des livres de poésie et de nouvelles. Le lièvre d’Amérique est son premier roman, si on peut appeler cela un roman car cela ressemble plus à un conte, à une fable animalière néolibérale s’adressant à tous ceux qui se sont égarés.
L’ouvrage débute avec le réveil du personnage principale, Diane, qui suit un protocole médical et vient de subir une intervention pour pouvoir être plus performante dans son travail. Diane a un organisme particulier qui tente de s’adapter. Elle dort moins, devient plus forte et développe une endurance impressionnante. L’employée modèle qu’elle était peut encore plus se surpasser au travail.
L’intervention qu’elle vient de subir l’affole car se dévoilent des effets insoupçonnés. L’espace dans sa tête se resserre, elle sent du métal à la place de ses os. Tout est plus vif, sa vision, son odorat, sa respiration. Autre effet, les mâles commencent à la suivre.
En parallèle, Diane se souvient de son adolescence. Quinze ans plus tôt, Diane connaît un été marquant de son adolescence à l’Isle-aux-grues, elle rencontre Eugène, un citadin débarqué chez elle. Avec ce nouvel ami, on la voit braver les dangers des jours de grosse mer, se fascinait à ses côtés pour les espèces en voie d’extinction et se retrouvait bouleversée après qu’un terrible incendie se soit déclaré, un épisode qui va la marquer pour toujours.
L’auteure nous embarque donc dans la ville de cette femme, Diane, dans un présent après cette surprenante opération mais aussi dans sa jeunesse (autour du personnage d’Eugène) qui nous explique en partie ce qu’elle est devenue et enfin sur les quelques jours et semaines qui précèdent son opération. Le livre repose sur une alternance des temporalités mais aussi sur une alternance des styles d’écriture.
Mireille Gagné se démarque par une superbe écriture mais aussi par des passages dans l’ouvrage où la ponctuation n’est plus de mise volontairement pour donner un effet d’oppression, de rythme notamment lorsqu’elle évoque la vie à cent à l’heure de Diane et sa recherche permanente de la performance. Alors évidemment dans cette fable poétique proposée par Mireille gagné, il est question de dénoncer le néolibéralisme qui s’impose petit à petit et asservit les populations tout en les éloignant de la nature. Et c’est du coup aussi une ode à la nature à la liberté.
L’ouvrage de Mireille Gagné est un livre atypique et surprenant. Sa lecture nous permet de sortir de notre zone de confort, de lire des textes différents des romans classiques. C’est une très belle expérience de lecture que je vous recommande vivement si vous aimez être surpris par des ouvrages. |