En janvier 2019 sortait un ouvrage chez Sonatine qui allait devenir l’un de mes livres préférés de cette année-là. A l’écriture de cet ouvrage fabuleux se trouvait une auteure que je ne connaissais pas, une certaine Alex Marzano-Lesnevitch.
Deux ans plus tard, nous la retrouvons non pas au travers d’un nouvel ouvrage mais au travers d’un conseil de lecture, posé sur un bandeau qui entoure la nouvelle publication de Sonatine, nous annonçant un livre à lire absolument selon elle. Un livre qu’elle nous annonce fascinant, un livre que l’on n’est pas prêts d’oublier. Ce livre, tant séduisant d’après sa description, c’est celui d’une autre auteure inconnue, Lacy M. Johnson, un livre comme un cri de douleur, un cri de révolte et de rage, un véritable uppercut qui débute par un titre qui n’est pas ambigu, Je ne suis pas encore morte.
Et c’est son histoire que nous raconte Lacy M. Johnson, le drame personnel qu’elle a vécu, et le mot est faible. Un drame lié à sa rencontre avec un homme, l’un de ses enseignants à l’université, un homme plus âgé qu’elle avec qui elle va vivre en couple pendant un peu plus de deux ans. Un homme pour qui elle a eu des sentiments, un homme qui lui a fait quitter son travail, qu’elle a suivi dans ses voyages et ses déménagements. Un homme aussi qui avait une emprise terrible sur elle, l’ouvrage dans ce domaine faisant beaucoup penser à celui de Vanessa Springora. Un homme qui la viola, la frappa, la menaca jusqu’à ce qu’elle le quitte pour se retrouver quelques mois plus tard kidnappée et séquestrée pendant plusieurs heures par lui dans un sous-sol.
Maintenant vous parler dans de plus amples détails de ce témoignage fort et puissant que nous propose l’auteure atténuerait la puissance du récit. Les faits qu’elle nous dévoile sont glaçants, l’auteur se dévoile sans chercher à recueillir chez le lecteur de la pitié. S’ouvrir aux autres est sûrement pour elle un moyen de se libérer de ses souffrances aussi soit-il possible de le faire.
Témoigner, raconter l’indicible, c’est s’ouvrir aux autres mais ce n’est en aucun cas se victimiser. Cela se confirme par le ton employé dans le livre, clinique et froid, avec un langage parfois un peu brutal, tellement en rapport avec ce qu’a pu lui faire subir son bourreau.
Témoigner, c’est aussi pour elle pour nous montrer comment elle a échappé à son bourreau. Je ne suis pas encore morte, nous annonce le titre, un titre que l’on pourrait prendre comme un sentiment de revanche (son bourreau a presque détruit son corps mais elle est encore vivante) mais aussi comme un cri de détresse, un appel pour sauver et protéger les nombreuses femmes qui subissent les assauts de maris violents.
Son témoignage est aussi porté par une poésie brute, l’auteure est devenue une femme de lettres, qui porte le récit d’une reconstruction impossible, le récit d’une souffrance physique mais surtout d’une souffrance psychologique. C’est un ouvrage terriblement d’actualité qui en fait une lecture essentielle. Salutaire et bouleversant.
Alex Marzano-lesnevich avait raison. On ne risque pas de l’oublier. |