Nouvelle découverte d’auteur avec cette publication de Buchet-Chastel et Veronica Raimo, italienne chercheuse et scénariste qui collabore avec des magazines comme Rolling Stone ou La Repubblica XL. La fille à la porte qui vient de sortir est son second roman, le premier traduit en francais.
Un lieu idyllique et utopique, une femme qui tombe amoureuse d’un homme, une accusation qui se porte sur lui, des questions et des souvenirs qui reviennent, voilà de quoi nous parle l’ouvrage de Véeonica Raimo.
Ce lieu idyllique et utopique, avec sa société qui l’accompagne, c’est à Miden qu’on la trouve, une sorte de havre de paix pour les élus désireux de fuir leur pays, pensé pour que rien ne vienne perturber la pureté et l’équilibre de la communauté.
Venue une première fois en vacances sur l'île, une femme va tomber amoureux d'un professeur résident de longue date. Très vite, elle décide de prendre un nouveau départ en s'installant avec lui. Elle prend peu à peu ses marques et commence enfin à se sentir chez elle en préparant la venue de leur premier enfant dans quelques mois. Un matin, elle reçoit la visite d'une jeune fille qui déclare avoir entretenu deux ans auparavant une relation marquée par la violence avec le professeur. Elle accuse ce dernier de viol et annonce l'avoir signalé à la Commission. Cette instance juridique de Miden est constituée de citoyens chargés de statuer grâce à des questionnaires adressés à l'entourage des principaux concernés.
À mesure qu'avance l'examen de l'affaire qui sème le trouble dans la parfaite petite communauté, les questionnaires révèlent au couple la manière dont ils sont perçus par ceux qui les entourent. La compagne, prise entre loyauté et honnêteté, doit elle aussi répondre au sien. Le compagnon quant à lui, devenu paria, se remémore cette relation qu'il ne jugeait répréhensible que pour son statut de professeur face à une étudiante.
Alternant les chapitres courts entre les voix de l'homme et de la femme, les voix de ceux qui le connaissent aussi, le récit nous plonge dans les questions, les souvenirs et les projections du couple en attente du verdict de la Commission. Un verdict qui risquerait de bouleverser leur vie en prononçant l'exclusion de l'agresseur.
L’ouvrage est superbement écrit, au travers d’une prose à la fois crue et élégante. L’histoire est habilement construite, très prenante qui nous plonge à l’intérieur des mécaniques enclenchées par l’accusation de viol au sein d’un couple mais aussi d’une communauté au travers du regard sur l’autre, son conjoint mais aussi au travers du regard des autres sur son couple. L’histoire se nourrit d’ambiguïtés, de passés troubles et de sentiments compliqués. Les loyautés vont et viennent, s’affirmant ou se cachant au fil de la lecture. L’ouvrage traite de la sexualité et du désir aussi, revient sur le sujet du consentement dont on a beaucoup entendu parler dans de nombreux ouvrages cette année.
L’originalité du livre tient donc dans l’idée de nous raconter cette histoire dans une communauté utopique idéale qui repose sur des règles de vie précises et une justice, une société dans laquelle au final l’intimité est soumise à un contrôle de la communauté.
La fille à la porte est un ouvrage intriguant, qui fait beaucoup réfléchir, une belle découverte qui me prouve que la littérature italienne a encore de beaux jours devant elle avec des auteures comme Veronica Raimo. |