C’est un nouveau récit à hauteur d’hommes que nous propose Michel Bernard avec cet Hiver 1812 qui revient sur le désastre militaire napoléonien en Russie à cette période. Un nouvel ouvrage qui s’inscrit dans la filiation de son précédent ouvrage Hiver 1814, campagne de France déjà publié en 2019 aux éditions Perrin.

A la mi-septembre 1812, Napoléon entre dans Moscou. Dans la nuit du 15 septembre, la ville s’embrase, submergée par un océan de flammes. Après avoir longtemps espéré l’ouverture de négociations avec le tsar, l’empereur ordonne à la Grande Armée de quitter la capitale calcinée le 19 octobre. Il a l’intention de battre l’ennemi pour s’installer à Smolensk avant l’arrivée de l’hiver, toujours très rigoureux en Russie. Mais le froid et la neige précoces surprennent des troupes épuisées, sous-équipées, mal ravitaillées, embarrassées par leur butin, leurs blessés et leurs malades. La tragique retraite de Russie commence alors.

C’est donc cette tragique retraite que nous raconte Michel Bernard avec un talent d’écriture indéniable qui plonge le lecteur au cœur de ces terribles contrées russes. Il nous raconte un voyage hallucinant dans l’enfer blanc de la Grande Armée, en suivant l’itinéraire de onze hommes et d’une femme à travers la plaine enneigée, les collines verglacées, les forêts pétrifiées, au milieu des combats et du harcèlement des cosaques.

Autour de quinze chapitres que l’on lit comme on pourrait lire un excellent roman, l’auteur nous fait découvrir le quotidien de ces hommes, leur lutte continue contre le froid extrême, le blizzard, la faim, la peur et le désespoir.

Qu’elle soit comédienne, qu’ils soient officiers ou soldats, mais aussi diplomate, fonctionnaire ou bientôt grand écrivain (Stendhal participa comme intendant militaire à cette retraite), tous se battent et avancent, franchissent monts et rivières, d’abord soutenus par le sens du devoir puis par l’instinct de survie.

A la fin, il n’y a plus d’armée, plus d’ami, seulement le désir de s’en sortir, d’en finir avec une épreuve terrible qui dépasse toutes les souffrances connues. Napoléon est l’un d’entre eux. D’abord désorienté par l’évolution d’une campagne qui ne se passe pas comme prévu, il s’efforce de sauver ce qu’il peut alors qu’il est déjà trop tard.

Une fois encore, les talents de conteur de Michel Bernard font merveille pour nous mettre au cœur de cet hiver tragique de 1812. Quand la littérature et l’Histoire s’associent aussi bien, on ne peut que se régaler en lisant ce type d’ouvrage dans lequel on ne voit pas le temps passer.