Opéra d'après l'oeuvre éponyme de Christoph Willibald Gluck, composition musicale d'Othman Louati, mise en scène de Thomas Bouvet, avec Claire Péron (ou Floriane Hasler), Mariamielle Lamagat et Amélie Raison, Olivier Gourdy, Ratia Tsanta et Mathilde Rossignol accompagnés par les musiciens de l'Ensemble Miroirs Etendus.
Animée par Romain Louveau, Fiona Monbet, Othman Louati et Emmanuel Quinchez, la Compagnie Miroirs Étendus a défini pour vocation dédiée la création lyrique "fondée sur une compréhension contemporaine de l'opéra".
Et ce par "l'exploration de son re?pertoire par des relectures puissantes, tant sur le plan musical et sonore que sur le plan sce?nique et visuel" dans le cadre duquel elle présente une adaptation libre de "Orphée et Eurydice" de Christoph Willibald Gluck.
Inspirée par le célèbre mythe grec, cette tragédie-opéra gluckienne au célèbre air "J'ai perdu mon Eurydice" relate l'échec de la tentative de l'argonaute Orphée pour exfiltrer des Enfers son amante la nymphe Eurydice victime le jour même de leur union de la jalousie d'un rival commettant un meurtre passionnel par aspic interposé.
Le compositeur Othman Louati a réécrit la partition à l'aune d'un resserrement significatif pour huit musiciens* de l'Ensemble Miroirs Etendus dirigés par Fiona Monbet et surtout d'un changement de registre en la plaçant sous celui de la "dark wawe" avec le recours au synthétiseur et l'introduction de riffs de guitare électrique.
Et six interprètes, Amélie Raison, Olivier Gourdy, Ratia Tsanta et Mathilde Rossignol composant le choeur, et, pour le couple-titre, une distribution"arc-en-ciel" avec un Orphée au féminin (la mezzo-soprano Claire Péron) et pour Eurydice (la soprano Mariamielle Lamagat) une femme noire dont l'injonction féministe, au demeurant prévue dans le livret original, contraint Orphée à enfreindre l'injonction déique.
Sous la direction artistique de Romain Louveau, la conception scénique a été confiée à Thomas Bouvet qui a élaboré, en collaboration avec Arnaud Godest pour les lumières, une scénographie minimaliste avec un antre noir plongé dans l'obscurité, un parterre de fleurs artificielles plantées au sol, quelques jets de fumée et l'apparition hologrammique d'une femme décharnée au visage caché par une longue chevelure blonde qui, nonobstant sa robe rouge, évoque davantage un fantôme ou la faucheuse que le personnage de l'Amour s'exprimant avec la voix de la soprano Amélie Raison.
Elle correspond au tropisme pour l'espace de jeu entièrement nu et noir et l'esthétique gothisante que Thomas Bouvet manifeste dès ses débuts et, en l'espèce, en résonance avec celle de "La cruche cassée" de Heinrich von Kleist concourant à l'édition 2009 du Prix des jeunes metteurs en scène du Théâtre 13.
Thomas Bouvet assure également la mise en scène, qui ressort à un minimalisme étique, pour laquelle il a opté pour la staticité, avec de nombreuses séquences en avant-scène rideau tiré et de rares déplacements, en sus dispensés avec une lenteur extrême comme au pas glissé, et du jeu des interprètes, tous, hors pour Eurydice en blanche robe "glam", vêtus de noir par Aude Desigaux, soumis à un immobilisme hiératique quasiment dépourvu de gestuelle et donc d'émotions.
A noter que les chanteurs sont sonorisés et que, nonobstant la partition en français, le texte est déroulé sur écrans latéraux ce qui ne s'avère pas superfétatoire tant certains mots sont à l'oreille difficilement compréhensibles.
Un spectacle aux parti-pris musical, esthétique et dramaturgique clivants laissés à l'appréciation du spectateur. |