Spectacle chorégraphico-marionnettique conçu et mis en scène par Laurie Cannac et interprété par Andy Scott Ngoua.

Rarement titre aura concentré autant d'idées en aussi peu de mots. Sans être clerc, tout spectateur qui s'apprête à voir "La Langue des Cygnes" mis en scène par Laurie Cannac, par ailleurs manipulatrice de la "marionnette", aura compris qu'on allait lui parler de la langue des signes et qu'il y serait question du conte d'Andersen, celui où un vilain petit canard s'avère être un grand cygne...

Simple dans son propos, évident dans sa forme, le spectacle de Laurie Cannac va emporter ceux qui le regarderont dans une autre dimension, un monde parallèle de rêve, de beauté et de poésie... et contribuer à faire comprendre à ceux qui l'ignoraient encore que, désormais, le théâtre de marionnettes a gagné ses galons d'art à part entière, qui peut, dès lors, produire de grandes oeuvres qui gagneront à être vues et revues autant que des spectacles de danse ou de ballet.

Car ici la chorégraphie a également son importance puisque la marionnette est en fait le danseur lui-même (Andy Scott Ngoua) affublé d'une aile explicite qui n'agit qu'en fonction de ce que lui fait accomplir Laurie Carnac.

Comme le petit canard inadapté d'Andersen, en dansant guidé par sa marionnettiste, l'homme-marionnette acquiert peu à peu son autonomie. Il finira seul sur la scène, communiquant en langue des signes avec celle qui lui aura permis de rompre le cordon ombilical avec cette "mère"qui lui a appris à se mouvoir gracieusement et qui maintenant lui est inutile. Le voilà solitaire mais libre, s'appuyant pour parfaire cette autonomie sur la langue des signes, qui n'est pas celle parlée originellement par sa créatrice-manipulatrice.

Pareillement, ce néo-humain s'ouvre au hip-hop, marquant sa rupture avec un monde où traditionnellement les cygnes, blancs ou noirs, doivent plutôt danser sur le "Lac des Cygnes" de Tchaikovsky. Andy Scott Ngoua est alors accompagné dans sa danse solitaire par Adri Sergent, subtil multimusicien, mêlant mélodies traditionnelles et sons contemporains. On soulignera, outre l'élégance de sa prestation, l'étendue du registre chorégraphique d'Andy Scottt Ngoua qui porte cette "Langue des Cygnes" de A à Z.

Comme toujours quand on est dans le domaine de la marionnette, on pourra s'interroger sur la résonance de ce spectacle auprès des plus jeunes et l'on conclura qu'ils sont très réceptifs aux changements de jeu du héros, qu'ils comprennent très bien l'argument choisi par Laurie Cannac et fonctionnent à tous les effets, même aux décalages entre langue visuelle et langue des signes.

il faut dire que le "dispositif langagier" mis en place dans chaque situation du caneton est vraiment pensé et adapté pour rester à tout moment le plus clair possible. Un travail didactique qui parvient à ses fins : un spectacle original parfaitement maîtrisé.