Comédie dramatique écrite et mise en scène par Pierre Notte, avec Julian Watre et Clara de Gasquet.
Si la partition de "Pédagogies de l'échec" concoctée par Pierre Notte semble ressortir à la conventionnelle satire du monde de l'entreprise, elle opère une déclinaison originale et non seulement par sa combinatoire thématique.
En effet, outre la variation de la dialectique maître valet, elle aborde les sujets de la violence et du rapport de pouvoir consubstantielle à toute relation bilatérale et de la perte de sens et du vide existentiel dans la société contemporaine et de surcroît dans une situation dystopique.
Dans un monde post-apocalyptique, deux rescapés d'une catastrophe au demeurant indéterminée qui a entraîné l'effondrement partiel de l'immeuble dans lequel ils travaillaient se retrouvent isolés quasiment dans le vide sur le plancher du dernier étage.
En l'occurrence, un chef de service et son assistante apparemment ni paniqués ni désespérés et ne s'illusionnant pas sur d'hypothétiques secours semblent être soit dans état de sidération mentale soit dans un simulacre de résilience anticipée pour éviter la décompensation psychotique car leur seule (pré)occupation consiste en la poursuite de leur activité professionnelle.
Mais les circonstances s'avèrent propices à l'exacerbation des tensions pré-existantes et à la libération des antagonismes latents s'exprimant en un ressassant règlement de comptes que Pierre Notte met en oeuvre par une écriture circulaire avec la modalité de la ?gure de style de la répétition caractéristique du théâtre de l’absurde qui concourt au jubilatoire burlesque des dialogues.
Il assure la mise en scène dans une scénographie réduite à un marquage au sol délimitant un étroit espace de jeu rectangulaire qui symbolise tant l'espace matériel que le huis-clos théâtral tout en évoquant une piste d'escrime sur laquelle les protagonistes se livrent à des assauts et estocades à fleurets peu mouchetés.
Au jeu, Clara de Gasquet et Julian Watre s'avèrent émérites pour porter avec vélocité la verbalisation ardue cet opus, qui nonobstant un prologue explicatif dispensé en voix off par l'auteur, induit, par la théâtralité de son dénouement, un large prisme d'interprétation pour le spectateur.
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