Après une première soirée du vendredi avec la tornade Izia, alt-J et le spectacle de Decouflé qui a quelque peu divisé les critiques et le public, le samedi s'annonçait comme le grand moment du festival et le départ en fanfare de quelques grosses formations qui vont faire le tour des événements musicaux de l'été.
Début de la journée à Saint-Brieuc avec un passage au rendez vous gastronomique de Rock'n'Toques, réussite incontournable pour les festivaliers et les briochins, puis direction la grande scène de Poulain-Corbion pour découvrir Pierre de Maere qui risque bien de faire bouger les foules tout l'été.
Le public ne s'y trompe pas et la queue à l'heure d'ouverture, habituellement modeste, s'étale sur plusieurs rues du centre historique de Saint-Brieuc. Sitôt le concert démarré, devant une foule plutôt imposante portée par les groupes de fans de premier rang, le grand Belge, professionnel en diable, tout en élégance, impose sa présence charismatique accompagné par ses trois jeunes musiciens. Son premier album sera décliné pendant la petite heure de concert et fera l'unanimité en attendant de le revoir prochainement sur de nombreuses scènes. Nous avions prévu une journée quasi parfaite, elle commence très bien.
Sitôt le concert terminé, direction la scène B, endroit parfait pour les révélations et les découvertes à ne pas manquer. Et avec Astéréotypie, on tient le groupe parfait. Le post-rock mêlé aux textes écrits par l'atelier d'un centre pour autistes fait mouche à chaque représentation. Déjà vus aux Trans Musicales en décembre dernier, plébiscités avec leurs albums, ils prouvent une fois de plus l'intérêt de les voir sur scène. "Du vélo à Saint-Malo, du kayak à Saint-Briac", "Aucun mec ne ressemble à Brad Pitt dans la Drôme", les hymnes du groupe sont scandés par le public massé en nombre devant la petite scène surchauffée.
Sur la grande scène, Adé, moitié féminine de Thérapie Taxi désormais en solo, a la lourde tâche de succéder à l'ouragan belge. Devant le parterre ensoleillé, elle s'en tire correctement mais sans grande fantaisie. L'ensemble n'est pas déplaisant et les chansons pop sont délivrées avec entrain même s'il manque parfois la sauvagerie ironique de son précédent groupe. On aimerait avoir un peu plus qu'une simple transcription live du fort intéressant premier album de la chanteuse.
Scène B, retour en Belgique avec Sylvie Kreusch, encore méconnue sur nos terres mais qui nous avait épatés dernièrement avec son incroyable single "Walk Walk". Une voix à la Lana Del Rey pour une prestation impeccable. Accompagnée par son groupe en fond de scène, elle navigue devant le public, minaude, et raconte l'amour à travers les titres de son premier album solo. Une chanteuse à suivre absolument que ce soit maintenant en solo ou sur les albums de son ancien groupe Warhaus.
Après un intermède rap et un mini spectacle Decouflé pour fêter les 40 ans du festival, le groupe Cancre s'installe sur la scène B pour une relecture du rock 2000s entre Noir Désir et Luke. Le power trio propose une lecture live de son album concept basé sur le recueil de textes écrit par un aïeul dans les tranchées et retrouvé dans un grenier. Les textes-poèmes finement ciselés se retrouvent portés par le rock tantôt calme, tantôt sauvage des trois morlaisiens. On se prend totalement au jeu et on a carrément hâte de les revoir
Pour finir cette soirée, retour sur la grande scène avec la tête d'affiche de l'excellente journée : Benjamin Biolay, un des patrons de la pop française que l'on peut aimer détester. On pourrait retourner sur la petite scène ou aller au forum mais il faut avouer que le chanteur qui a sorti deux excellents derniers albums propose un concert de qualité avec des musiciens d'exception (dont Philippe Almosnino des Wampas à la guitare). Il en fait des tonnes avec le public acquis à sa cause pendant la petite heure de concert, mais on apprécie plutôt avec lui la fin de cette excellente journée à Saint-Brieuc.
C'est cela le charme d'Art Rock. Mélanger tous les styles, faire aimer ce qu'on n'aime pas et sublimer les artistes moins connus. Merci à Jean-Michel Boinet d'avoir su créer un tel événement il y a 40 ans déjà.

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