Les livres se suivent avec Jérémy Fel et il n’a de cesse de nous émerveiller avec ses ouvrages terriblement prenants, dont on se lance dedans sans jamais savoir quand on va reposer son livre. Nous sommes les chasseurs, son dernier ouvrage, était grandiose, nous permettant d’explorer le mal sous toutes ses formes.
Malgré toute ma rage est du même acabit, un ouvrage totalement génial dans lequel il continue d’explorer le mal dans toutes ses formes avec virtuosité. C’est un ouvrage que l’on dévore, qui nous met de nouveau une énorme claque.
Manon et Thaïs, deux des personnages principaux du roman sont issus d’une famille riche, les Delage, qui dirigent une maison d’édition parisienne connue. Ne connaissant pas le besoin, ces deux cousines qui vont bientôt devenir majeures, décident de partir en vacances en Afrique du Sud, au Cap, dans une magnifique villa, accompagnées de deux très bonnes copines, Juliette et Chloé.
Ravies de s’émanciper de leurs parents, au moins le temps de ces semaines de vacances, elles se retrouvent dans un pays gangréné par les violences et le racisme, multipliant les imprudences par insouciance. Un jour, l’une d’entre elles disparaît, puis est retrouvée quelques jours après sauvagement assassinée et mutilée. Ce meurtre frappe évidemment ses trois amies et sa famille, nous plongeant dans leur deuil alors qu’une enquête débute, autour d’un policier, fracassé par la vie, qui tente de remonter la pente comme il le peut, après des déboires familiaux.
L’ouvrage débute par quatre pages qui donnent le ton de ce que l’on va ensuite lire. Quatre pages incroyables, d’une violence inouïe. La suite est construite ensuite autour de sept chapitres qui donnent la parole à sept personnages qui vont nous dévoiler les causes mais aussi les conséquences de ce meurtre si cruel. Les secrets concernant la vie des différents protagonistes sont légions, souvent marqués par la cruauté et la violence, tout comme l’est aussi l’Afrique du Sud, l’endroit principal où se déroule l’histoire.
Comme à son habitude, Jérémy Fel ne nous laisse aucun moment de répit au cours de la lecture. Il nous confronte de nouveau au mal sous toutes ses formes, il nous pousse à nous interroger sur la violence et la cruauté bien présente chez quasi tous les personnages. De nombreuses pages sont marquées par la violence, la cruauté et l’indécence. Le milieu de l’édition, de la richesse parisienne n’est pas épargné et laisse très peu de place à la moralité. Le vice est partout présent chez la plupart des personnages, nous montrant comment les êtres humains peuvent prendre plaisir à répandre leur fiel, au-dessus des lois sans jamais être appréhendés, se disant qu’il existe toujours pire ailleurs ou plus pervers que soi.
Mais à côté de toute cette cruauté, de cette violence qui ne s’arrête que très peu, l’auteur prend soin de nous dévoiler des passages beaucoup plus délicats, donnant comme une bouffée d’oxygène au lecteur, autour de l’amour d’un enfant pour sa mère ou de l’aide apportée aux personnes beaucoup plus faibles.
Avec ce nouvel ouvrage, Jérémy confirme la force narrative qu’il possède, sa manière hors du commun de nous proposer des scènes de violence inouïes, à la limite de l’insoutenable parfois, sans qu’on puisse avoir l’impression qu’elles soient gratuites, véritablement présentes pour la continuité du récit et son suspense.
L’intérêt de l’ouvrage ne repose pas sur la violence qu’il décrit mais sur les différents mécanismes qui amènent à cette violence. Les personnages de l’ouvrage sont des gens ordinaires, "bien sous tous rapports apparemment", animés au final par des pulsions de haine, des rapports de domination et des mœurs très particuliers qui en deviennent terrifiant à la lecture.
Cet ouvrage est donc pour moi un énorme coup de cœur, j’ai été de nouveau accroché par ce livre dès les premières pages et je n’ai pas vu passer les 500 pages (lu en deux jours). Si vous n’avez pas peur de vous confronter au mal, vous devez alors avoir entre vos mains cet ouvrage incroyable. Et si vous ne connaissez pas encore Jérémy Fel, il est grand temps d’y remédier avec cet ouvrage, mais aussi tous ses précédents, qui sont géniaux. |