The National avait peut-être l’occasion de marquer l’histoire en sortant un double album nommé "Three First Pages of Frankenstein". Il aurait été en quatrième position au classement des meilleurs doubles albums, derrière le White Album des Beatles, The Wall de Pink Floyd et The Lamb Lies Down On Broadway de Genesis. Ils auraient fait l’ouverture du Super Bowl avec leur bonne amie Taylor Swift et seraient devenues des stars interplanétaires.
Mais voilà, pour des raisons créatives (ou commerciales), ils ont d’abord publié un premier album First Two Pages of Frankenstein en avril dernier, et sans crier gare, le 18 septembre, une suite intitulée Laugh Track toujours sur le label 4AD. Il s’agit bien d’une suite, pas juste les chansons éliminées du précédent disque, les titres sont issus des mêmes sessions que Frankenstein mais ont été travaillés, retravaillés et expérimentés lors de la tournée qui avait suivi. La pochette représente le même petit garçon, mais en couleurs cette fois-ci.
On y retrouve le single "Weird Goodbyes" avec leur ami Bon Iver, sorti à l’été 2022 mais qui n’avait bizarrement pas eu les faveurs de figurer sur l’album précédent. A la table des invités on retrouve Phoebe Bridgers (qui les accompagnait déjà sur deux titres de Frankenstein) sur le titre éponyme "Laugh Track". Sur "Crumble", ce n’est autre que Rosanne Cash (oui oui la fille de Johnny) qui s’offre un duo avec Matt Berninger, et ces titres à deux voix diamétralement opposées sont plutôt une réussite. C’est également le cas des singles "Alphabet City" et "Space Invader" sortis à la fin de l’été.
Ce qui le différencie le plus de son frère aîné, c’est le retour d’une vraie batterie, là où, sur Frankenstein, elle était trop souvent remplacée par des boîtes à rythmes, chose qui ne réussit pas souvent pour un groupe de rock à part si on s’appelle The Kills. Son rôle n’avait jamais semblé primordial dans toute la discographie de The National, mais finalement on s’aperçoit qu’elle compte beaucoup et que son absence rend le son trop "synthétique".
Musicalement parlant, on reste sur une recette classique pour The National depuis plusieurs albums. Les thèmes sont souvent sombres, les mélodies mélancoliques, les paroles alimentées par la dépression du chanteur avec quelques lueurs d’espoir par ci par là et beaucoup de questionnements introspectifs qui restent sans réponse. Et on comprend facilement la prépondérance de ces thèmes tant le doute était permis sur l’avenir du groupe, avant la naissance de ce duo de disques. Aux dires mêmes de ses membres un peu éparpillés géographiquement et lancés dans de nombreux projets annexes (un album solo pour Matt, des productions d’autres artistes pour les frères Dessner…), trouver le moment de se réunir pour travailler ensemble était compliqué et l’inspiration pas du tout au rendez-vous en cette période post-COVID.
Heureusement la page n’est pas restée blanche bien longtemps, et une nouvelle ère créative semble belle et bien lancée avec ces neuvième et dizième albums. On peut malgré tout se poser la question de l’intérêt "créatif" du dernier titre "Smoke Detector" qui vient "combler" la fin de l’album avec ses presque 8 minutes d’un poème scandé par Berninger sur une sorte de jam de ses comparses. C’est soit terriblement entêtant soit abominablement insupportable. Comme quoi ce qui pourrait passer pour une improvisation géniale en concert tombe complètement à l’eau transposé sur un album.
Mais The National étant reconnu pour la qualité de ses concerts, on ne peut qu’attendre avec impatience la transposition live de ces deux disques qui viendront agrémenter leurs prestations déjà bien remplies par leurs titres incontournables. Pas de date française annoncée pour le moment malgré des dates en Europe, les derniers remontent aux 30 et 31 mai 2022.
# 13 octobre 2024 : Sur un malentendu ca peut marcher
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