Aout 2001. Michel Houellebecq transpire. Nous sommes en Espagne. A Benicassim plus précisément. Tournée promo live de Tricatel pour la sortie de Présence Humaine, opus en "talk over" de l'écrivain avec un backing band de rêve.
Burgalat, la première mouture d'AS Dragon, encore bon, et puis il y a ce blond sexy dans le fond. Décochant ses riffs comme un enfant déjà adulte, le contraire peut être, on ne sait plus, un guitariste charismatique intriguant, mèche qui tombe sur les yeux qu'on imagine bleus. Un suédois sans doute. Sur la pelouse, Burgalat doit sûrement parler musique et Bacharach avec deux groupies transies, on imagine Peter seul en backstage, buvant un Red Bull à l'abri des regards indiscrets, pensant à ses accords et ses Ad Lib….
Mai 2005. Les choses ont changés, indéniablement. Peter Von Poehl n'est plus guitariste. Peter est devenu artiste. A part entière avec un premier album créé dans l'indifférence du plus grand nombre, un Going to see where the tea trees are monté comme un buzz avec deux singles qui lentement ont ranimé la flamme, dont ce "Scorpion grass" s'échangeant sous le manteau numérique depuis plusieurs mois déjà. Une guitare reconnaissable entre mille, et cette voix si sensible, minaudée et pure, fragile comme un roc mais solide fine comme du sable d'une plage suédoise qu'on imagine en l'écoutant.
Des ressacs et des marées. Un vague à l'âme se dessine quel que soit l'ordre dans lequel on écoute les pistes. Les batteries filtrées et les arpèges de "Going to see where the tea trees are", chanson éponyme, plongent dans la solitude heureuse. Luxuriance des accords et des arrangements.
Ce disque est il le premier du jeune homme, pour être aussi mature et personnel ? Si référence il devait y avoir, sans doute faudrait-il chercher du coté de Nick Drake, sans doute…Souffrance et douleur, joie et plaisir, se confondent et se bousculent sur "Tooth fairy" , son intro en harmonique, guitares qui se croisent par le subtil jeu du mixage, basse placé à l'avant et ces chœurs angéliques. Une lente ascension vers les cieux grâce à l'ange blond.
De facto, Going to see where the tea trees are est une perle. Rare. Assez rare pour le dire. Construit sur la plupart des titres en mid-tempos avec violons à l'appui, les compositions de ce premier album ne lassent qu'en peu de moment ("The Lottery" et sa tentation World Music), laissant place à de grands espaces et d'envol pop, de "Travelers" et son groove laconique à "A broken skeleton key" et sa tentation disco/ Motown.
Guitares, orgues, cuivres ("Global conspiracy") et saxos. Von Poehl ne recule devant rien pour le voyage, thème récurrent de cet exilé né d'un père suédois et d'une mère allemande, vivant à Paris depuis 1998. Disque des fins de soirées autant que des réveils du dimanche, ceux ou le café chaud s'évapore dans l'air, Going to see where the tea trees are, avec le cor lointain de "Little creatures" en fond sonore.
Un appel à tous les bateaux ayant quitté le port depuis trop longtemps.
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