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Interview  (Paris)  6 juin 2006

Après "Misère intellectuelle" joué au Théâtre de Ménilmontant en novembre 2005, Romain Bouteille s'affiche au non moins célèbre Café de la Gare avec "Les oreilles du chef".

Romain Bouteille est un grand bonhomme. Sur scène, il est magistral et terriblement impressionnant. C'est un véritable artiste qui a marqué l'histoire du café-théâtre, un humoriste surdoué, un artisan des mots, un vrai humaniste, un homme de convictions, convictions qu'il continue à défendre avec ténacité ses opinions.

Quand il arrive discrètement dans la cour pavée du Café de la Gare portant une énorme valise il paraît tout petit presque fragile, les cheveux en bataille mais l'œil vif et rieur, qui a fait de la subversivité saligne de conduite.

Vous aviez prévu une trilogie pour 2005/2006 comprenant vos 2 derniers spectacles qui sont, sinon des one-man-show du moins des comédies à un personnage, "Misère intellectuelle" et "Les oreilles du chef" et une comédie "Lancelot du Lac" avec d'autres comédiens. Quelle est la raison de cette trilogie ?

Romain Bouteille : Oh, ouais… En fait, c'est parce que je n'ai pas envie de rester longtemps à Paris, vous voyez …alors je groupe (rire) ; Et puis, aussi, cela me dépayse. Je sors d'un spectacle et hop j'en aborde un autre le lendemain ce qui est très rafraîchissant pour la mémoire… et qui provoque des trous en même temps (rire) mais les trous ne me dérangent pas beaucoup.

En raison de circonstances indépendantes de votre volonté, "Misère intellectuelle" s'est jouée au Théâtre de Ménilmontant en 2005 et vous êtes actuellement au Café de la Gare du au avec "Les oreilles du chef". Existe-t-il des perspectives de reprise de "Lancelot du Lac" ?

Romain Bouteille : Pour le moment, rien n'est sûr parce que "Lancelot du lac" n'est pas un one man show mais un spectacle lourd. Il est difficile à vendre car il y a beaucoup d'acteurs et un climat qui va très vite alors… on attend.

Pouvez-nous en dire plus sur vos deux derniers one-man-show et notamment sur la raison pour laquelle vous vous adressez au public par l'intermédiaire respectivement d'un comédien et d'un chef d'orchestre ?

Romain Bouteille : J'aurais trop peur dans le cas contraire de faire le didactique, voyez, pour moi c'est un personnage qui a parle et ce n'est pas mon message. Mon message est de montrer des personnages qui disent et font ce qu'ils disent et font. Mais l'opinion de l'auteur, on ne la connaît pas. Et ce sont des personnages capricieux, un peu inspirés par Dubillard. Le chef d'orchestre de "Les oreilles du chef" dit autant de bêtises que de choses que j'approuve. Il met les choses en contradiction avec elles-mêmes, c'est son amusement, mais ce n'est pas un message philosophique sur la musique.

Mais avez-vous néanmoins une formation musicale qui sous-tend tous les propos que tient le personnage ou cela relève-t-il de la pure fantaisie ?

Romain Bouteille : C'est mélangé. Je suis très classique, très musicien, je compose car je donnais la technique de la composition mais il y a une grosse exagération sur Berlioz. C'est une époque est tellement pourrie que j'ai fait une assimilation de l'époque avec lui. Cette industrialisation naissante… et puis, historiquement, il y a quantité de choses qui sont vraies. Berlioz est un personnage extrêmement fayot avec le pouvoir, qui ré-harmonise la Marseillaise. Il est totalement indifférent au massacre de l'Algérie ça n'existe pas pour lui. Il n'y a que le pouvoir et l'empereur et sa femme qui sont sublimes.

Il appartient à la catégorie des artistes officiels.

Romain Bouteille : Oui et en plus il n'y arrive pas bien comme artiste officiel car c'est un critique, dur en plus, et quand il s'essaie lui-même à la musique et bien on l'attend au tournant. Les autres critiques et les directeurs des opéras ne lui laissent pas de place. Enfin on ne pourra pas dire qu'il aura reculé devant quoi que ce soit pour réussir.

"Misère intellectuelle" est écrit en vers…

Romain Bouteille : …ah c'est pas pareil. Ce n'est pas la même chose mais il y a deux choses qui reviennent au même. Ce qu'on appelle de la culture au niveau des ministères et des états c'est un produit de vente pour discipliner la foule et donner des dogmes sous couvert d'éducation, voyez ! C'est un produit de crétin. Notre histoire de France depuis Vercingétorix est faite par des administratifs. C'est lamentable !.

Ce sont de gens qui classent les choses. Un impressionniste ne peut pas être un classique puisque c'est un impressionniste ! Il y a un souci de mettre de l'ordre dans tout cela qui reflète bien d‘ailleurs le souci qu'ils ont de convaincre d'utiliser la culture à des fins limitatives. La culture, en ce moment surtout, est très très nettement destinée à abêtir le public et non pas à le rendre le malin. C'est une culture pour, comme ledit le chef d'orchestre de mon spectacle, faire gagner des points aux érudits. C'est de la fausse culture.

Comment certains artistes peuvent travailler alors ?

Romain Bouteille : Il y a menace de crever la dalle. Alors le truc c'est d'échapper à cela. En même temps dans l'autre cas on peut réussir à être connu comme artiste mais je crois que la honte est à peu près aussi pénible que le risque de crever la dalle. La honte c'est insidieux et très pénible à vivre. En ce moment les fayots souffrent d'une angoisse, dont je ne comprends pas bien l'origine, et c'est quelque chose d'affreux. Ils ne prennent aucun risque et si jamais ils ont une baisse de célébrité d'un centimètre alors qu'ils ont 100 briques à la banque c'est la panique ! Ils sont prêts à aller lécher les pieds du ministre de la culture, ils sont prêts à tout !

Je suppose que vous ne faites jamais antichambre dans les bureaux du Ministère de la Culture ?

Romain Bouteille : Ab bien non ! Et en même temps ce ne sont pas des brutes . Ce sont des gens qui sont sensibles à la honte et inconsciemment la honte leur pèse dessus. Au bout d'un certain temps ils ne se rendent même plus compte qu'ils fayotent ! Pour ne pas se sentir comme des courtisans du pouvoir, ils sont obligés de justifier le pouvoir encore plus pour dire : "Ce n'est pas pour réussir que je dis du bien du pouvoir c'est parce qu'il l'est vraiment…

Comment parvenez-vous à monter vos spectacles ?

Romain Bouteille : Parce que ce sont des one man show qui ne demandent pas un centime. S'il y a un meuble ou un accessoire à faire, je le fais moi-même et voilà ! Mais je n'irai pas mettre un centime dans une œuvre d'art en ce moment car ce serait remplacer le temps et la réflexion par du fric. C'est ce qu'ils font et il ne faut pas le faire ! Parce que mon temps il est illimité c'est la raison pour laquelle je peux faire des choses amusantes bien écrites. Si j'avais réussi, je ne pourrais pas le faire. Je serais obligé de refaire des best of etc…

Etes-vous déjà en phase d'écriture d'un nouveau spectacle ?

Romain Bouteille : Oui. Toujours. J'écris un nouveau spectacle en vers parce que j'ai trop souffert avec ce spectacle en prose.

Comment cela ?

Romain Bouteille : Dans l'écriture en vers, on voit immédiatement ce qui ne va pas dans une strophe, ce qui cloche et il n'y a pas de discussion possible contrairement à l'écriture en prose. Et puis on s'habitue à une phrase qui n'est pas costaude, et je n'aime pas cela. J'aime bien le tricotage des vers et je m'y replonge avec un spectacle qui pour le moment s'intitule "Les Droits des Courbes". Les droits, comme les droits civiques et courbes avec un "C" majuscule sous entendus les droits des peuples courbes, des peuples frauduleux, héhé !

Etes-vous sollicité par de jeunes artistes qui voudraient reprendre vos textes ?

Romain Bouteille : Bah non pas trop. Cela arrivait dans le temps.

Pourquoi plus ?

Romain Bouteille : Parce que moi quand je dis mes textes je suis gentil, très gentil. Mais les autres quand ils le lisent… ils n'ont pas envie de se prendre la tête. Et puis mes textes ne sont pas à la mode. Les gens préfèrent les textes qui se moquent des personnes, ils n'aiment pas qu'on étudie les systèmes. Ils n'aiment pas la subversivité quoi ! La moquerie à l'égard de la concierge, du pharmacien, pas de problème mais pas toucher aux racines….on peut même taper sur un ministre du moment que ce n'est pas celui de la culture !

Allez-vous voir les spectacles des autres ?

Romain Bouteille : J'en vois mais pas très souvent. Parce que je ne suis pas à Paris et quand j'y suis ils jouent à la même heure que moi ! Les cordonniers sont les plus mal chaussés ! Et puis je deviens de plus en plus difficile, de plus en plus sectaire. Qu'un mec me fasse marrer moi ça ne me suffit pas.

Je n'irai pas mettre 20 balles pour me marrer. Si c'est un spectacle purement de loisir, je n'ai pas le temps. Je n'ai plus le temps. Il n'y a pas grand chose que j'aime.

Donc je ne peux pas vous demander s'il y a néanmoins des personnes qui vont surpris ?

Romain Bouteille : Même si je vous cite des noms, cela ne vous dira rien car à chaque fois que j'ai été surpris c'est par des inconnus.

Et ils le sont restés ?

Romain Bouteille : Oui, bien sûr. Il y a eu Beckert. Et il y a les classiques (Avron, Devos) et les auteurs classiques. Mais rien de récent. Si ! Saïda Churchill ! Voilà un spectacle que j'ai vu ! Je la connais très bien (rire).

Elle est de votre famille intellectuelle si je peux dire ?

Romain Bouteille : Ben oui, on passe nos journées ensemble ! Notre métier ce n'est pas d'apporter de nouvelles opinions, c'est d'essayer tout le temps de démolir les choses. Un Premier ministre comme celui qu'on a et qui s'est tellement ridiculisé devrait être viré depuis longtemps ; C'est pas possible ! Et toute notre élite intellectuelle est en train de se demander si finalement il ne serait pas très bien cet homme. C'est lamentable ! Alors voilà, renforcement du système policier sous couleur de sécurité sous promesses de bombe nucléaire !

Même si on ne peut hiérarchiser en ce domaine, quel sujet vous préoccupe le plus en ce moment ?

Romain Bouteille : Le Fonds Monétaire International. Une institution qui établit des règles destinées à protéger les riches contre les pauvres. Et puis des personnages comme Bush qui provoque de fausses guerres civiles, qui s'attaquera bientôt à Cuba. C'est le niveau de plus en plus lamentable de ces gens qui refusent toute philosophie, toute pensée. C'est le réflexe Marcellin ! Ils ne se tiennent pas bien alors envoyons la police ! Le réflexe typique du bijoutier qui craint de se faire piller. Alors qu'il n'a qu'à pas être bijoutier !

On est dans une époque …j'ai le vertige de voir à quel point le conformisme s'installe. Il y a bien des efforts dans le Monde Diplomatique mais il y aussi des bourdes pas possibles. Dans le dernier Monde diplomatique, il y a une définition savoureuse de l'intellectuel qui est une personne qui utilise sa célébrité pour modifier les décisions du pouvoir. Autrement dit un intellectuel non célèbre ça ne peut pas exister. C'est idiot ! Ils ne font pas de philosophie alors après ils s'étonnent de dire des choses énormes !

En d'autres termes si un bonhomme est inconnu dans les médias ce n'est pas un intellectuel. Ah bon ? Ah d'accord ! Voilà une définition qui est nouvelle ! Il s'agit de dire la vérité…mais c'est trop compliqué !

 

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Crédits photos : Thomy Keat (Plus de photos sur Taste of indie)


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# 14 avril 2024 : En avril, de la culture tu suivras le fil

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