"Papalapa, papalapa, papalapa, papalalala…"
Difficile d’échapper à cette chanson diffusée en boucle sur les ondes d’une grande radio publique depuis le début de l’été.
"La facture d’électricité", premier amuse-gueule du nouveau Miossec, laissait entrevoir de grandes choses. On nous avait prévenu : le prochain album du Brestois sera excellent… Force est de constater que les indics ne se sont pas gourés!
On pourrait dire que l’Etreinte est plus ceci, moins cela que les précédents. On pourrait, c’est vrai, mais bon allons à l’essentiel, cet album est tout simplement magnifique.
Porté par l’excellente co-réalisation de l’ex-Valentins Jean-Louis Pierot (comme pour le précédent 1964), le plus Brestois des Bruxellois s’est fait plaisir et cela s’entend. D’ailleurs, l’intéressé lui-même, ne déclare-t-il pas : "Ce disque, je l’écoute au casque le soir et je me dis : merde c’est réussi !". Rien d’orgueilleux ou de narcissique dans cette déclaration, juste le sentiment d’un travail réussi et accompli.
L’Etreinte, 6ème album en 11 ans, remet les choses à leur place. On avait senti le coup venir en septembre 2005, lors de la mini tournée bretonne. On avait découvert au Run Ar Puns de Châteaulin les titres en devenir de l’Etreinte. Malgré quelques imprécisions, l’ossature de l’album était déjà visible.
On attendait la sortie de la nouvelle galette au printemps, peu de temps après celle du dernier Dominique A (ah la traditionnelle interview croisée !). Miossec a souhaité apporter quelques retouches, d’où une sortie retardée à la fin du mois d’août. Vu le résultat, cela valait la peine d’attendre encore un peu.
L’Etreinte se démarque des précédents albums par sa musicalité plus aboutie et par sa légèreté. L’ambiance est, en effet, moins pesante, n’hésitant pas à naviguer du côté de la pop. Miossec prend de l’assurance en tant que compositeur, signant cinq musiques de l’album. S’entourant de proches qu’il souhaitait convier, il leur laisse la main pour sept musiques, partageant l’écriture de trois d’entre elles avec Jean-Louis Piérot.
Ainsi Gérard Jouannest, compagnon de Juliette Gréco et ancien complice de Jacques Brel, offre à Miossec une chanson au piano, un "fantasme" pour ce dernier paraît-il. Ce magnifique "30 ans", revient sur le cap de la trentaine, synonyme pour le chanteur de grand saut dans la chanson.
Le guitariste irlandais Robert Johnson, auteur de la musique de "Bonhomme", jolie berceuse à la guitare et aux flûtes (non, vous ne rêvez pas !), doit également être à l’origine du splendide riff de guitare aux sonorités irlandaises de "La Grande marée". Daran, quant à lui, amène une touche plus rock avec le tube en puissance "L’amour et l’air". Enfin, Miossec adapte et pose son texte sur une musique des Valentins pour le tendu "Le loup dans la bergerie".
La rencontre de Zita Swoon a certainement contribué à la tonalité de l’album. Présents aux chœurs (formidable "Maman") ou au chant, voire au piano, Stef Kamil Carlens et sa bande ont apporté bien plus que leur musique, ils ont transmis leur esprit. L’utilisation à bon escient de seconde voix ou de chœur participe à la réussite musicale de l’album. Les textes ne sont restés en rade.
La plume de Miossec se fait certes moins acerbe mais garde toujours ce ton et ce style qui savent faire mouche. Le somptueux texte de "La mélancolie" tout comme l’ironique "Quand je fais la chose", n’illustrent-ils pas une des plumes les plus brillantes du moment ?
A l’image de la pochette et du titre de l’album, œuvre du peintre brestois Paul Bloas, le dernier Miossec prend des couleurs sans pour autant tourner au criard. Cette étreinte qu’on souhaite poursuivre (sur scène ?) adoube son auteur en artiste populaire, dans le noble sens du terme.
L’Etreinte, certainement un de ses meilleurs albums, consacre définitivement Miossec comme un des meilleurs artistes français des dix dernières années (avec son compère Dominique A).
Qu’on se le dise, cette nouvelle galette va marquer son temps, comme Boire dans les années 90. Sûr on en reparlera… |