Drame d'Henry de Montherlant, mis en scène par Alice Safran avec Delphine Bariety, Rémy Bazerque, Guy Bourgeois, Muhammad Hirzala, Martine Midoux, Marie-Véronique Raban et Bernard Senders.
Prince remarquable de la famille de Malatesta, seigneur de Rimini, nommé en 1430 vicaire général de l'Eglise puis excommunié, Sigismond Malatesta, portraituré par Piero della Francesca, était un homme cultivé et humaniste, lié à la cour des Este à Ferrare par sa première épouse et à celle de Milan par sa seconde épouse Isotta Sforza.
Mais c'était également un libertin accusé d'inceste doublé d'un condottiere orgueilleux et sanguinaire dont les succès lui attirèrent les foudres du pape Pie II qui le surnommait "le petit hérétique".
Cette personnalité riche ne pouvait que séduire Henry de Montherlant qui le choisit comme véhicule pour traiter de tous les thèmes récurrents qui lui importaient : la politique, la mort, la gloire, la pérennité dans la mémoire collective, la foi, le vieillissement.
Le "Malatesta" de Montherlant est un homme terriblement vivant au sens où il goûte à toutes les saveurs de la vie avec une férocité et un orgueil démesuré mais aussi une personnalité essentiellement tragique. Il, revendique à la face des hommes, du monde et du Pape une certaine forme de liberté et d'exigence envers soi-même dans ses actes les plus répréhensibles aux yeux de la morale ou de la loi des hommes. "Si j'étais innocent, ce serait horrible. Mais j'ai au moins la satisfaction de me dire que je suis coupable. Comme j'ai bien fait de l'être ! Vive ma vie !".
Sous la direction d'Alice Safran qui signe une belle mise en scène, Guy Bourgeois est fascinant dans l'incarnation de Malatesta. Il rend toute la démesure de ce personnage hors du commun, ses rages mais aussi ses craintes et ses doutes circonscrites par la plume magnifique de Montherlant. Plume dont la verve et l'intelligence s'imposent dans les scènes avec son épouse Isotta (Martine Midoux parfaite) et le pape (Marie-Véronique Raban dans une composition saisissante).
Il se dégage de lui une telle force qu'il éclipse les autres personnages bien que la distribution soit, sous réserve d'un Porcelio pour le moins anachronique, tout à fait remarquable.
|