Danseuse, puis professeur de danse, comédienne, directrice artistique de l’Harlekijn Danstheater, Gaétane Bouchez est à l'affiche du Théâtre du Renard dans l'extraordinaire spectacle "Mata Hari" écrit et composé par Herman Van Veen, artiste universel connu à travers le monde entier.
A peine terminée la représentation de "Mata Hari" d’Herman Van Veen dans lequel elle tient le rôle principal, les bras chargés de fleurs, encore dans l’émotion et la joie de la première au Théâtre du Renard, elle prend le temps de nous recevoir.
Comment est né le spectacle "Mata Hari" ?
Gaétane Bouchez : Herman Van Veen a écrit le spectacle et l’a créé aux Pays Bas qui est son pays natal. Parallèlement et pratiquement simultanément à la création, il m’a demandé d’en assurer l’adaptation française. Ce travail m'a permis de découvrir le personnage, d’en percevoir toute la poésie et d’apprendre à connaître Mata Hari et son amie de cœur Anna Lintjes dont j’interprète le rôle.
Le choix de Mata Hari résulte d’une coïncidence. Lorsque Herman Van Veen s’est produit en France à l’Olympia, le directeur de l’époque M. Jean-Michel Boris l’avait félicité et lui a fait remarquer qu’il était le deuxième artiste hollandais à se produire sur cette scène, le premier étant Mata Hari. Il connaissait certes le personnage public de Mata Hari, strip-teaseuse et espionne, mais pas la femme. Il a donc cherché à la connaître et la vie de Mata Hari l’a inspiré pour écrire un spectacle autour de son chemin de vie.
Né aux Pays Bas, aujourd'hui en France y a-t-il d’ores et déjà des projets de reprise après la programmation à Paris ? Et avez-vous d’autres projets ?
Gaétane Bouchez : Il y a un projet de tournée en France effectivement. En mars-avril nous jouerons en Afrique du Sud et ce sera une actrice sud-africaine qui reprendra mon rôle. Pour ma part, je jouerai un autre rôle. Ce qui ne sera pas une première puisque j’ai vraiment grandi avec ce spectacle dans lequel j’ai joué presque tous les rôles. Donc fin 2006 et 2007 ce sera Mata Hari. Ensuite, nous avons d’autres projets mais il est encore trop tôt pour en parler.
Le spectacle est très particulier et revêt une forme multidisciplinaire à laquelle nous sommes peu accoutumés en France : il y a de la musique, du chant, de la danse, de la comédie, des marionnettes….
Gaétane Bouchez : Effectivement mais c’est vraiment caractéristique de la façon de travailler d’Herman Van Veen. Il utilise tous les registres dans ses spectacles même dans celui où il joue, "Chapeau" dont deux représentations exceptionnelles auront lieu Salle Gaveau à Paris, les 27 et 28 décembre 2006, car il se définit lui-même comme un clown. Chaque art vient compléter l’autre, vient l’imager, créer une atmosphère, appuyer la parole.
Le personnage principal du spectacle est Mata Hari mais vous jouez le rôle principal. En était-il ainsi dès la création ?
Gaétane Bouchez : Non. Au départ, c’était Mata Hari qui disait le prologue mais nous nous sommes vite rendu compte que ce n’était pas la bonne manière de présenter Mata Hari. Si on me demandait de me présenter je dirai : "Demandez au public car le public a un regard plus objectif que moi.". Nous avons donc fait parler la meilleure amie de Mata Hari, son amie de cœur, une femme qui a existé et qui était la mieux placée par son regard pour présenter ce mythe qu’est Mata Hari et surtout la femme.
Le spectacle aborde bien évidemment l’épisode de l’accusation d’espionnage et sa fin tragique mais aussi sa vie personnelle. Je ne pense pas d’ailleurs qu’elle était une espionne. Mata Hari était aussi une jeune fille qui a une belle enfance mais une femme à la destinée tragique, une mère qui a vu ses enfants mourir empoisonnés.
Votre rôle doit vous apporter beaucoup de satisfaction puisque vous jouez la comédie mais vous chantez également et vous esquissez quelques pas de danse.
Gaétane Bouchez : J’ai une carrière de danseuse classique derrière moi et cela me fait plaisir de bouger un peu en scène mais le fait de ne pas danser ne me manque pas. J’ai toujours fait du théâtre parce que dans l’interprétation d’un ballet à thème il y a une part de comédie par le mouvement.
Et j’ai découvert le plaisir d’être uniquement comédienne et l’expression par la parole. C’est une grande découverte et cela me procure autant de bonheur que de danser. J’ai découvert un nouveau moyen d’expression peut-être encore plus complet, qui n’est d’ailleurs pas toujours évident mais qui a quelque chose de magique.
Ce spectacle est un spectacle joué uniquement par des femmes et vous êtes entourée de trois jeunes femmes qui sont comédiennes, danseuses et musiciennes. Comment s’est fait la distribution ?
Gaétane Bouchez : C’est une histoire de femmes ! Pour ma part, j’avais découvert Martine de Kok dans un petit rôle, une figuration, dans une production dans laquelle j’ai joué en Belgique. Quand Herman Van Veen m’a dit qu’il cherchait une accordéoniste j’ai tout de suite pensé à elle. Elle est magnifique et elle a un très grand talent surtout quand elle joue du piano et qu’elle semble littéralement rentrer dans l’instrument tant elle est absorbée par la musique, ce qui est extraordinaire à voir.
Wendel Spier et Silke Mehler sont danseuses. Wendel Spier, au physique très exotique par ses origines javanaises et Silke Mehler, qui est allemande, ont été sélectionnées sur audition. Le choix s’est fait non en fonction du talent au sens strict du terme, de leurs qualités techniques de danseuses, qu’elles ont aussi, mais en fonction de leur physionomie, de leur visage et surtout de ce qui se dégageait d’elles. Je suis très heureuse d’être sur scène avec elles car elles sont absolument fabuleuses. Nous sommes toutes les 4 très différentes et cependant nous formons une troupe géniale.
Les représentations au Théâtre du Renard ont été précédées d’avant premières dans les salons de l’Hôtel Georges V. Ce sont deux approches différentes du spectacle. Quelles différences percevez-vous ?
Gaétane Bouchez : L’Hôtel George V a beaucoup de charme et il s’en dégage une toute autre atmosphère. Le spectacle prend la forme spectacle de salon, ce que je souhaitais refaire à l’instar de Mata Hari qui se produisait dans les salons. Cela m’intéressait de recréer cette ambiance et de savoir si cette forme attirerait le public. Nous avons ainsi fait 4 représentations qui ont bénéficié d’une très bonne réception.
Du Théâtre du Renard se dégage une atmosphère très différente et les deux ne sont pas comparables. Il est vrai qu’à l’hôtel nous disposons de peu d’espace scénique mais cela peut générer une très grande force au spectacle. Nous sommes limitées mais nous essayons d’utiliser au mieux cette faiblesse pour la transformer en force et user de la proximité avec le public. Je n’ai qu’un petit regret : le fait que nous jouons sur une sorte d’estrade un peu surélevée par rapport au sol. J’aurais aimé jouer sur le même niveau que le public mais il est vrai que l’impératif de visibilité pour les danses, qui comportent beaucoup de morceaux au sol, a prévalu.
Le Théâtre du Renard se prête tout à fait au spectacle notamment parce qu’il permet de se replonger dans une certaine époque, celle où vivait Mata Hari et la salle en amphithéâtre permet de parler plus vers le haut, d’amplifier la parole ce qui crée une autre dimension. Nous disposons aussi d’un plus grand espace et c’est un vrai régal !
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