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Interview  (Paris)  24 janvier 2007

Benoît Théberge, acteur, chrorégraphe, metteur en scène, propose à la Maison de la Poésie sous le titre "Nous ne sommes pas séparés" un spectacle exigeant, magnifique et singulier autour de l'oeuvre poétique d'Henri Bauchau.

Nous l'avons rencontré pour qu'il nous éclaire sur sa démarche au regard de ce spectacle et nous parle de son travail de recherche sur la dramaturgie du corps.

Comment avez-vous conçu ce spectacle, si tant est que ce soit uniquement un spectacle, et fait le choix des fragments de textes d'Henri Bauchau pour créer ce collage et cette scénographie singulière ?

Benoît Théberge : C'est un spectacle. Même s'il est vrai qu'il est présenté dans une salle qui est une cave voûtée dont on ferme la porte de façon assez bruyante et hermétique qui donne une atmosphère un peu spéciale. De plus la petitesse de la salle implique une grande proximité avec le public ce qui donne au spectacle un caractère unique et en fait une expérience unique. Je pense d'ailleurs que tout spectacle même du théâtre classique doit être une expérience unique.

La deuxième chose est de présenter un spectacle avec de la nudité, des corps nus dans une scénographie conçue autour d'un objet abstrait qui devient ce qu'imaginent les spectateurs. Comme Bauchau est psychanalyste, je suis parti d'une surface sur laquelle le corps pouvait se coucher comme un divan vertical pour changer le plan de vision. Le deuxième point important tient au fait qu'Henri Bauchau est un poète qui s'inspire beaucoup de ses rêves et il entretient un dialogue permanent entre ce qu'il rêve, et qui lui vient de son inconscient, et de la vision qu’il en a. Quand cet objet a été élaboré je me suis rendu compte qu'il pouvait évoquer la porte d'un caveau, d'un tombeau pharaonique comme vous l'avez dit très justement. J'y ai également pensé quand nous avons installé les drapés noirs qui encadrent cet élément. Voilà pour la scénographie.

En ce qui concerne les textes il était difficile de composer une pièce autour d'Henri Bauchau en 50 minutes-une heure qui est le format imposé par cette salle. Le choix était donc difficile et j’ai opté pour les textes fondamentaux qui fondent sa démarche afin d’en montrer les différentes qualités et les recherches en tant que poète.

J’ai choisi des poèmes qui sont d’époque différente, allant de 1960 jusqu’à 2000 pour apprécier l’évolution de son écriture jusqu’à ses tous derniers poèmes d’une grande simplicité qui sont extrêmement dépouillés et témoignent bien de son parcours. Et le spectacle s’achève sur "Mandala pour un poème" écrit en 2004. Cela me semble donner une vision d’ensemble de son œuvre qui peut inciter le spectateur à aller plus loin.

Pour le travail sur le corps, je dirige une compagnie, la Compagnie Zéro Théâtre créée en 1983 qui a, dans sa démarche, opté pour le théâtre du corps. Etant acteur et chorégraphe, j’ai souhaité former des comédiens pour développer ce type de théâtre. De spectacle en spectacle, je poursuis ma recherche sur le langage du corps et le travail de l’acteur.

Au départ, il y a un choix littéraire et poétique qui ne pouvait se concrétiser qu’à travers ce travail sur le corps ?

Benoît Théberge : Oui. Exactement.

Je vais me faire l’avocat du diable en vous demandant s’il était absolument nécessaire d’adopter cette forme et cette scénographie pour des textes qui, en quelque sorte se suffisent à eux-mêmes ?

Benoît Théberge : Les choix que j’ai fait me paraissent permettre d’appréhender et de comprendre le processus de travail de poète d’Henri Bauchau. Quand on lit Bauchau, il explique que pour aborder cette phase d’écriture il doit entrer dans un état particulier, dans un processus d’immersion totale pour voir le poème. Il n’écrit pas un poème à la plume en regardant par la fenêtre.

Ce n’est pas Lamartine ?

Benoît Théberge : Non ; C’est une véritable épreuve physique dont il ressort très fatigué, nourri et cela peut durer plusieurs mois. C’est donc un véritable acte physique pour entendre ce qui se passe et qui implique un état d’abandon. Il décrit ce phénomène en première partie dans son recueil de poèmes "Heureux les déliants", texte fondamental qui a constitué le point de départ de mon travail. J’ai voulu montrer cette introspection totale dans la matière du corps, l’organicité du corps, du minéral, du végétal.

Je ne souhaitais pas faire une lecture intelligente entre guillemets du texte mais transmettre l’expérience du poète et la mienne, ma rencontre avec ses textes et comment je l’ai perçu. Et je pense que dans un spectacle sur un poète il faut aller plus loin que l’écriture. Si non, il faut rester chez soi et faire des lectures plus bucoliques. J’ai voulu m’engager à fond et prendre des risques et donc m’engager dans cette expérimentation de metteur en scène créateur comme Bauchau a pris les risques de la totale immersion pour sa création poétique.

Effectivement, on peut se demander ce que serait une simple lecture objective de ces textes.

Benoît Théberge : Les textes lus nous parviennent par le mental. La dimension corporelle et physique permet de recevoir les textes différemment. Et donc ceux qui sont habitués à recevoir des textes de manière mentale seront déçus voire choqués. Les autres seront touchés immédiatement par ce spectacle.

Ce spectacle s’inscrit-il dans la continuité d’autres spectacles ?

Benoît Théberge : Ce travail s’inscrit dans une trilogie consacrée aux trois volets de l’œuvre de Bauchau. J’ai monté auparavant l’adaptation de Bauchau de "Prométhée enchaîné" d’Eschyle qui constitue mon premier travail sur Bauchau dramaturge. J’ai ensuite voulu faire connaître le poète d’où "Nous ne sommes pas séparés". Et je prépare un troisième volet sur le romancier qui consistera en une adaptation d’"Antigone" pour la scène pour début 2008. J’espère qu’ensuite cette trilogie sera présentée dans son ensemble.

Et le futur immédiat pour "Nous ne sommes pas séparés" ?

Benoît Théberge : Nous souhaitons bien évidemment jouer encore ce spectacle. Cela étant il s’agit d’une petite forme qui ne peut pas être jouée dans les grandes salles.

Marie Delmas, la jeune femme qui joue avec vous est-elle une de vos élèves, un membre de votre compagnie ?

Benoît Théberge : Habituellement je prends toujours des comédiens avec qui j’ai ressenti des affinités au cours des stages. Or, en 2000 pour "La dispute de Marivaux" il restait des rôles à attribuer et j’ai rencontré Marie Delmas au cours d’une audition dont la prestation m’a interpellé. Compte tenu de son fort potentiel je lui ai suggéré de suivre ma formation. Elle a également joué dans "Prométhée enchaîné". C’est une comédienne exceptionnelle car elle a un très grand talent et surtout une énergie qui trouve moins à s’exprimer dans "Nous ne sommes pas séparés" mais dans "Prométhée enchaîné" elle a réalisé une interprétation exceptionnelle très remarquée.

Elle a également un physique superbe avec une musculature de chat.

Benoît Théberge :… oui, c’est exactement cela. Elle a une musculature très fine, sauvage et puissante, cet état indompté de la nature brute et sauvage. Elle a également une grande générosité sur le plateau et une grande technique de jeu.

A tel point que j’ai voulu monter "Antigone" pour lui donner un grand rôle et je pense qu’elle va poursuivre l’aventure avec la compagnie.

Elle n’est pas comédienne permanente de la compagnie car cela est de toute façon très difficile de nos jours. Mais elle fait partie de l’équipe depuis 5 ans et de toutes les productions.

Pouvez-nous parler un peu plus en détail du travail sur le corps qui constitue l’axe de recherche de votre compagnie ?

Benoît Théberge : Il s’agit d’un travail que j’ai entrepris depuis près de 15 ans. D’abord sous forme de stages internationaux quand j’étais en Allemagne ou en Pologne. Ce travail s’est développé à Paris grâce aux stages AFDAS qui sont destinés aux professionnels. Le but est de transmettre aux comédiens une approche et une connaissance de leur corps et une maîtrise. J’ai donc élaboré un entraînement physique adapté aux comédiens qui ne possèdent pas la connaissance de ce qui est leur instrument. Car ce qui est étonnant c’est que les jeunes comédiens, même sortant des grandes écoles, n'ont aucune approche purement théâtrale du corps.

Cet enseignement leur donne les moyens d’investir davantage le textes et d’envisager des choses différentes, de dire les textes avec leur corps. La particularité de ces stages est leur durée puisqu’il se déroulent sur 6 semaines ce qui permet vraiment un travail en profondeur aussi bien sur le corps que la voix. On y travaille le langage, l’enracinement, la détente la géométrie, les 3 dimensions, le relâchement, les impulsions du corps. Certes cette connaissance du travail du corps nécessite plusieurs années mais ce stage permet déjà une sensibilisation intéressante.

Y a-t-il un profil type des comédiens qui suivent ces cours ?

Benoît Théberge : En général, ce sont des trentenaires qui ont déjà 8-10 ans d’expérience, qui ont pris conscience de leurs limites et ressentient le besoin d ‘acquérir de nouveaux outils pour avancer. Cela étant, l’âge peut varier de 20 à 60 ans.

Et votre compagnie ?

Benoît Théberge : La Compagnie Zéro Théâtre est une compagnie de théâtre de recherche et d’écriture qui aété créée avec une hollandaise et un français qui était une compagnie J’écrivais les textes qui se présentaient sous forme de scénarios de travail avec peu de textes car ils étaient essentiellement visuels. Avec ces spectacles nous avons fait des tournées internationales. Au fil du temps, comme je suis aussi un amoureux de la langue, j’ai intégré du texte pour finir par des pièces très textuelles.

Ce qui a changé évidemment la stratégie de la compagnie car nous nous sommes coupés de la scène internationale pour nous concentrer sur le marché français qui est très différente et très difficile.

En Suisse, an Allemagne ou en Italie, par exemple, la concurrence est plus libre. Les lois du marché ne sont pas préétablies comme en France où il y a beaucoup de centres dramatique nationaux, de scènes nationales, qui ont une politique un peu particulière car on voit souvent les mêmes spectacles dans les mêmes structures avec le même type de programmation.

De plus nombre de ces lieux sont dirigés par de metteurs en scène qui investissent le lieu et créent un réseau d’échange de spectacles ce qui suppriment toute concurrence sur le marché de l’art. Et pour pouvoir se produire il faut d’abord entrer dans ces réseaux ce qui n’est pas la démarche des autres pays européens dans lesquels la valeur artistique, la qualité priment.

Je pense que vous avez dressé de manière très concise l’état actuel du théâtre français. Finissons sur les projets.

Benoît Théberge : Nous serons au Festival de Vaison la Romaine où nous reprendrons "Prométhée enchaîné" en juillet avec les cigales dans le cadre du festival du théâtre antique. Ensuite, il y aura "Antigone" en 2008 pour laquelle nous avons quelques dates au Théâtreux Gérard Philippe de Saint Cyr l’Ecole. Nous espérons pouvoir jouer "Antigone" au Théâtre du Lierre ou... à la Maison de la Poésie.

 

A lire aussi sur Froggy's Delight :

La chronique du spectacle "Nopus ne sommes pas séparés"

En savoir plus :

Le site officiel de la Compagnie Zéro Théâtre

Crédits photos : DR (Nathalie Osmont)


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