Comédie mélodramatique de Voltaire, mis en scène par Vincent Colin, avec Roch-Antoine Albaladéjo , Sylvain Dumont et Isabelle Kérisit.
Si le Voltaire auteur dramatique n'est pas resté dans les mémoires c'est sans doute que ses pièces, comme celles de la plupart des dramaturges-philosophes du fameux siècle des lumières - qui ne fut pas une époque lumineuse pour le théâtre - sacrifient les règles du genre à la mission civilisatrice dont il investisse le théâtre. Par le média du malheur théâtralisé relevant du pathétique larmoyant, cette mission consiste à détourner le peuple de l’égoïsme et de l’individualisme considérés comme des fléaux sociaux en célébrant la vertu de la fraternité universelle résultant de la sensibilité et de la compassion.
Présentée comme un "Roméo et Juliette" avec happy-end, "L'écossaise" se coule complètement dans ce moule. Si l’esprit voltairien, plein de malice et moquerie railleuse, est bien présente au détour de certaines répliques, notamment quand il épingle le journaliste polémiste qui avait eu le malheur de critiquer ses écrits, les personnages sont des caricatures souvent ridicules, l'action inexistante et les situations simplistes.
La préface de la pièce indiquait d'ailleurs expressément d'ailleurs qu'il s'agissait d'une comédie "d'une excellente morale, et digne de la gravité du sacerdoce dont l'auteur est revêtu".
Cela étant, Vincent Colin a traité cette comédie sur "un modeallegro, molto vivace avec des allures de Marx Brothers" en adoptant une mise en scène qui la situe à mi chemin entre la commedia dell'arte et le burlesque, tel qu'il est développé notamment dans les films muets avec la vivacité de la cadence, le sur-jeu du corps palliant le muet, la musique et la césure séquencée des scènes.
Dans cette machine folle qui, faisant fi du réalisme et du pathos, s'emballe à destination du divertissement et du rire, Roch-Antoine Albaladéjo, Sylvain Dumont et Isabelle Kérisit alternent tous les personnages au gré de changement à vue qui rappellent l'époque des saltimbanques et, s'attirant immédiatement l'empathie du public, l'entraînent dans un tourbillon fort plaisant et terriblement roboratif.
Le public quitte la salle le sourire aux lèvres. C'est quand même la faute à Voltaire ! |