Lille, plus connue comme la place forte du métal (Loudblast, Out, Unswabbed, Clearcut, Soul-X, No Flag, Klang, ...) n'en finissait pas de nous abreuver en gros sons bien lourds.
Mais voilà que la capitale nordiste cachait bien son jeu. Pépinière de talents Rock, certes, moins bruyants médiatiquement, mais tout aussi explosifs, Lille nous livre GuMMa et son premier album Génération Clone.
Il faut dire que ces Lillois n'en sont pas à leur premier méfait, avec trois EPs à leur actif (Clone, Impatients, Il), et une jeunesse bercée par un père musicien, les deux frères David (chant/guitare) et Steve (batterie), à qui se sont joints Fab (basse) et Vince (sample, guitare), ont vite étendu leur set, l'ont affiné sur scène, et l'ont couché sur bandes 10 titres dans ce Génération Clone qui comme le groupe prend ses sources dans le milieu Pop/Rock Anglo-saxon.
Avec des influences telles que Radiohead, Queen of the Stone Age, ou encore Cake, le groupe nous démontre ici sa capacité à évoluer dans des textes tout aussi bien en français qu'en anglais.
A la première écoute, certes distraite, les guitares et la batterie à l'énergie torturée de "Nos corps impatients" ouvrent le bal. La tête commence un hochement rythmé sur ces sonorités qui laissent perplexes. Est-ce du Rock? Est-ce de la Pop? L'oreille devient plus attentive, intriguée par cette force qui semble se dégager des enceintes.
Et voilà que la voix aérienne prend son envol, portée par une mélodie certes mélancolique mais étrangement vivante. Les morceaux s'enchaînent sur un rythme à la fois Rock et Pop dicté par le chef d'orchestre GuMMa, et l'on se surprend à fermer les yeux pour se laisser porter dans un univers sombre et langoureux, les samples envoûtants ont pris leur place dans notre esprit.
Nous ne sommes plus dans cette pièce, non, nous volons désormais dans un ciel qui laisse apparaître des images confuses. Un questionnement sur nous même. GuMMa au travers de textes personnels et incisifs nous pousse à la réflexion : “Personne ne t’inflige, cette vie rêvée/d’un autre, que tu vis/tu n’es que l’ombre, mais de qui ?/ Tu perds la distance/Et la nuit t’y penses, au cristal” ("Cristal").
Alors nous plongeons encore plus profondément au fond de nous même, ou est-ce au fond de l'âme tourmenté de GuMMa? Qui sait ...après tout nous ne sommes plus vraiment nous même, nous sommes aussi eux, nous sommes ce monde, nous sommes l'entaille telle que GuMMa la décrit.
Un moment de répit. Les yeux s'ouvrent, tout est calme autour de nous, le monde a disparu. Seule reste la réflexion et cette mélancolie rythmée par une mélodie lancinante. Alors, l'on se dit que : "Le monde tourne encore/et viens mon tour, je rejoue la scène/dans mon plus beau rôle, j'excelle/mais personne ne fera mieux que moi d'exister/dans ce corps, je ne suis qu'un homme/une erreur en somme" ("Génération Clone"). Non. GuMMa ne nous laissera pas nous échapper si facilement. Il nous condamne à rester Il. Au final, un cri se fait entendre. Nous voulons rester dans notre désordre, ne plus avoir de regrets, et regarder notre étoile en face.
Voici donc la prose envoûtante de GuMMa. Dans cet album puissant, à ne pas laisser entre les mains d'un dépressif, ne poussons pas le vice, on ne nous offre que la vérité à son état brut. On ne ressort pas indemne de Génération Clone, mais une chose est sûre, c'est que l'on en ressort transformé et prêt à prendre la vie à bras le corps. |