La venue de Michel Portal dans une salle de concert est toujours un évènement remarquable. D’abord parce que ce clarinettiste de génie se fait rare, mais aussi parce qu’il s’agit souvent d’une musique brute, d’une improvisation remarquable et sereine… Bref, d’un très grand moment.
Le Rive Gauche, la scène de Saint Etienne du Rouvray nous a encore offert ce 25 mai un très grand moment de jazz, rare, dans une programmation très riche.
En effet, C’est en duo avec le remarquable Mino Cinelu, l’un de ses plus fidèles frères d’arme, percussionniste que le musicien aux 51 ans de carrière se présentait au public, nombreux, enthousiaste et pour tout dire déjà conquis. Portal au Rive Gauche, une salle à la sonorité parfaite…
L’homme est peu disert, et c’est souvent Cinelu qui fait le show, ce percussionniste pour qui la voix est aussi importante que le rythme.
Virevoltant de programmation électronique percussive à une foultitude d’objets sur lesquels on frappe comme un gymnaste passe d’agrès en agrès, Cinelu donne souvent le ton, la couleur d’une musique improvisée, sereine et à la fois complexe et extrêmement mélodique.
Il ne faut cependant que quelques secondes, deux souffles et une inspiration remarquable à Portal dans sa clarinette basse pour embrayer ; avare de parole peut être, mais la musique est un langage, et dans ce domaine, les phrases de Portal ont un poids sans pareil. A ses côtés, Cinelu se démène. Triture un triangle pour en faire sortir une rythmique d’équilibriste, tente toute les trouvailles possibles…
Il y a de la fulgurance dans le phrasé, de l’humour, et surtout du génie dans les constructions de Portal. Ce qu’il y a d’assez remarquable dans ce duo, c’est que le percussionniste le suivrait jusqu’au bout du monde, en le devançant presque. Pas de regards nécessaires entre ces deux là.
L’improvisation ne se fait pas non plus l’un contre l’autre, comme souvent, ce n’est pas un combat. C’est juste une fusion de deux envies d’aller dans la même direction, pour le bonheur du public
Ca fait plus de 20 ans que ces deux là jouent ensemble, au gré des agendas de chacun, pour croisers le temps d’un spectacles leurs obsessions musicales. On ne parlera pas de musique fusionnelle, bien sûr, mais ces deux-là ne mettent pas longtemps à se trouver, sans avoir besoin d’exploiter des thèmes ressassés.
C’est de la musique brute. Et c’est un moment inoubliable, qui n’arrive pas si souvent. |