Le Rock Dans Tous Ses Etats, RDTSE pour les intimes, est certainement l’événement le plus réjouissant de ce début d’été. Bonne ambiance champêtre dans la ville sans avoir besoin de rouler des kilomètres dans un océan de boue en formation, et surtout, car c’est le principal, une programmation à rougir de plaisir, complète, pléthorique ou chacun peut et doit s’y retrouver.
C’est aussi chaque année l’occasion de découvrir sur scènes les phénomènes dont on cause dans les gazettes depuis le début de l’année. Mais ce n’est pas que cela : hormis les deux scènes, Le Rock se donne aussi comme mission de faire découvrir une scène locale vivace dans sa Papamobile. Cette année 2007 est proprement hallucinante : Babet, Miossec, Maxïmo Park, I’m From Barcelona, The Rakes Wax Taylor et !!! ne sont qu’une partie de la programmation de la première journée. Petit retour sur une bonne journée rock…
Existe-t-il un dieu du rock and roll, et surtout, a-t-il des santiags ou des doc Martens ? Nous ne le saurons pas tout de suite, mais sans conteste, il veille sur cette bonne ville d’Evreux et son festival rock.
Après deux mois de pluie digne d’un solo de Jan Garbarek ou d’un arrangement d’Antony Hegarty, le soleil s’installe timidement sur l’hippodrome qui accueille les festivaliers. On est en droit de se demander si le retour vers le radieux n’a pas un rapport lointain avec le sourire de Babet, à qui il incombe de donner le départ à ce festival. On a fait moins charmant…
Tout le monde aime Babet, et la météo sans doute aussi. Mais notre postulat tient-il avec la venue de Didier Super et de son placement de voix "particulier" ? Il est gentil Didier. Il insuffle un vrai truc punk l’air de rien, c’est un peu Gogol 1er et sa horde en guitare sèche/batterie qui jouerait au PMU du coin. Mais bon. Malgré la posture et les paroles rigolotes, on se lasse un peu au bout de quelques chansons…
Pendant que Didier s’amuse à slamer dans le public, Miossec s’installe avec ses musiciens. Ce type inspire le respect, celui d’un sillon tracé, labouré d’une voix reconnaissable entre toutes, toujours entouré de musiciens parfaits, placés.
On sent chez lui le bonheur de la scène, le goût des festivals et le plaisir de voir dans le public, conquis, quelques drapeaux d’hermine égarés au nord du Couesnon. Ce début de festival place en trois heures quelques facettes du rock à la française.
Nosfell est le prochain. Décalé, félin, conteur habité, on pourrait gloser des heures sur l’univers en klokobetz de ce chanteur hors norme.
On pourrait songer que le happening nosfellien ne trouve sa place qu’en salle. Lourde erreur.
A travers ses histoires, son jeu de scène emplit un hippodrome ravi, qui commence à vraiment se remplir.
Le propre de tout festival étant le picorage, je ne parle pas seulement des boutiques de sandwichs en tout genre mais des nourritures auditives, un petit tour à la papamobile s’impose.
Si l’année précédente, les normands sortant du lot étaient La Maison Tellier, le groupe à marquer dans le coin de sa tête pour 2007 est sans nul doute Nina Bobsing, qui avec un rock festif, n’est pas sans rappeler les B52’s.
Le groupe donne la pêche, la chanteuse est certainement l’artisan principal d’une bonne humeur communicative, sautillante servie par des mélodies assez imparables.
L’air serait presque lourd. C’est le premier missile de l’Albion qui commence à chauffer. Tout les radars les prédisent : Maxïmo Park va faire de l’hippodrome son jardin.
Paul Smith arrive en terrain conquis, habillé en Alex d’Orange Mécanique accompagné de ses droogies. Le son monte. On découvre que si l’on voyait sur l’hippodrome des dizaines de filles et de garçons arborant chapeau mou et cravate desserrée, il ne s’agissait pas d’un congrès d’assureur de la Lloyd's en goguette, mais bien de fans énamourés devant la classe vitriolée d’un groupe dont la scène est le vrai exutoire.
En moins d’une heure, Maxïmo Park retourne (et ce ne sera pas la dernière fois dans la soirée) le public massé devant la grande scène. La programmation 2007 du RDTSE offre large place au rock qui n’oublie pas le dancefloor, et Maxïmo Park est le premier de ces groupes. Mélodies carrées, puissance scénique tout y est…
Et l’on se dit que ce qui se passe depuis quelques années en Angleterre n’était donc pas un épiphénomène. Chaque groupe est une découverte jouissive.
Après les copains de Newcastle, les Londoniens de The Rakes, sur la même scène, avec des mélodies plus acides mais une soif de scène identique allaient prendre le flambeau…
Le jour même où la France cycliste essaye de conquérir Londres, ce sont les anglais incontrôlables qui ont pris le pouvoir ici.
Même I’m from Barcelona a pris du retard, sans doute pour voir le phénomène. Les suédois foutraient le feu à une banquise. Même sur la Papamobile (mais pourquoi pas la grande scène ?) le groupe irradie de ses mélodies simples mais efficaces et fait la fête avec le public. Il y a des ballons, des kazoos, des maracas et des habits kitsch et colorés.
Le retour de Rémi Bricka ? Non ! Le moyen de faire la fête avec ce groupe ouvert et sacrément efficace. Des mélodies cousues pour la fête, rafraîchissantes.
Quel contraste avec Sean Lennon qui se produit poussivement sur la scène B dans un show qui sent la naphtaline ! Même si ce dernier attire sur son nom - peut-il s’en détacher ? - l’exubérance n’était pas là où on l’attendait…
Depuis des années on le dit, Le Rock Dans Tous Ses Etats ne porterait pas son nom s’il snobait l’électro. Quel festivalier régulier n’a pas, dans ces souvenirs, cette performance d’Herbaliser en 2003 qui fit le bonheur de quiconque disposait d’oreilles ?
Wax Taylor, régional de l’étape est de la même veine. Classieux, précieux, groovy et cinématique, déclaration d’amour old-school, que dire de la performance du tailleur de cire et de ses musiciennes ?
Que sous toutes ses formes le Hip-hop est beau quand il sait d’où il vient et qu’il sait prendre au jazz comme au funk, à la soul comme au rock… Parcours sans faute d’un orfèvre du son.
Nous avions eu des explosions, de la puissance, il nous fallait la déflagration. Le nom du groupe nous l’annonçait, la suite, la fin allait être ponctuée. !!!. La seule question, alors que les pieds des festivaliers bougent encore de ce vaillant mélange de tout ce qui enflamme les endroits où l’on danse : trois !, est-ce encore suffisant ?
Punk, rock, Disco ? Mais qu’est-ce que c’est ? Qu’importe, l’hippodrome tressaute, transpire, chavire. Une basse à la Living Colour, des percussions aléatoires mais toujours au bon moment et un chanteur épileptique. Chaque festival à sa surprise. Pour cette première journée, il est bien sûr que c’est celle-ci. |