Pour cette troisième Route du Rock hiver, attendue par les amateurs de musique frustrés par le peu de concerts dans la saison froide, les organisateurs avaient décidé de concentrer le spectacle dans l'impeccable salle de l'Omnibus et de réserver le palais du centre ville aux concerts plus intimistes du dimanche.
Réduction de coûts mais aussi excellente idée pour centraliser l'animation et attirer les spectateurs. Mission réussie d'autant plus que la programmation, très internationale, était, encore plus cette année, d'une rare qualité et nous fait espérer que malgré les déconvenues financières de la structure organisatrice, nous pourrons encore voir beaucoup d'autres éditions été comme hiver.
Tout commence le vendredi par les américains de Yeasayer avec une pop fort originale où les multiples voix se mélangent aux guitares, où les looks des différents musiciens se détachent dans la relative pénombre du plateau. Tout le monde ne parle plus que d'Animal Collective pour situer le groupe qui laissera une grosse impression et entamera avec succès la soirée dans un Omnibus déjà bien rempli.
Deuxième concert et premier gros coup de coeur avec les trois gaillards des Dirty Three. 3 virtuoses habités sur de très longs morceaux instrumentaux tantôt post-rock tantôt jazz mais toujours experimentaux avec de gros morceaux de Velvet dedans. Warren Ellis, ex-Bad Seeds, profite des pauses pour raconter de petites histoires au public, dans un très bon français et explique joyeusement ses chansons avant de repartir dans des délires où le violon, la batterie et la guitare se rencontrent, se parlent et se déchirent.
Difficile d'arriver avec sa guitare sèche après un tel tremblement de terre. Pourtant José Gonzalès enchaîne sans trembler et propose au public bien réchauffé ses folksongs, seul sur le grand plateau de l'Omnibus. Point de formation live comme annoncé dans le programme, juste un chanteur et sa guitare pour d'excellents titres qui reposeront l'assemblée. Il terminera même par quelques reprises dont une étonnante version du "Love Will Tear Us Apart" de Joy Division.
Du shoegazing à la Route du Rock ? c'est devenu une tradition, tous les ans, en attendant la reformation des maîtres du genre que l'on rêverait de voir cet été au Fort de Saint-Père. Quand ce ne sont pas les DJ qui retracent l'histoire de ce mouvement en diffusant du Slowdive ou Ride entre les concerts, ce sont quelques rares groupes qui font revivre le style et que les organisateurs ne manquent pas d'inviter.
Seulement ce soir, point de pop bruyante ou de rock experimental, c'est du vrai et du pur. De la guitare saturée à l'envi et la voix unique d'une Julee Cruise surexcitée. Certains spectateurs en profiteront pour quitter la salle mais les amateurs apprécieront le déferlement de sons de Pluramon. Quasiment dans le noir, simplement coupé par un agaçant stroboscope, les deux guitaristes font de leur mieux pour remplir la salle de distortion et d'effets tandis que la voix de Julee Cruise se glisse dans cet ouragan. Une musique difficile mais ô combien intéressante et rare pour les amateurs.
Surprenant choix que de mettre la tête d'affiche en fin de soirée. Surprenant mais judicieux puisqu'il permet à tous les amateurs de profiter des groupes moins connus et surtout de rester jusqu'au bout. Les Raveonettes arrivent donc devant le public à presque 2 heures du matin et proposent, tout en simplicité, leurs excellents morceaux, bigrement efficaces. Pas de temps mort, juste un concert qui file, qui file et laisse un très agréable goût comme lors de leur passage en été. Un groupe discret mais très attachant.
Deuxième journée du festival avec une affiche aussi intéressante que la veille et toujours aussi originale.
Le Loup entame les hostilités. Le projet de Sam Simkoff se retrouve sur cette scène de l'Omnibus en formation complète avec trois guitares, du banjo et une belle section rythmique. Ajoutons à cela un choeur provenant de presque tous les musiciens et on obtient de longs morceaux épiques parfois calmes parfois déchainés et où les voix se mélangent aux guitares saturés pour un epoustouflant démarrage de la soirée.
Distortion toujours avec Vic Chesnutt qui s'installe très simplement sur le plateau entouré de son groupe de luxe ('the best fucking band in the world' dira-t-il) composé du Silver Mount Zion et de Guy Picciotto de Fugazi. Le passage du folk singer chez Constellation lui ayant donc permis de s'adjoindre les services de ce groupe pour son très beau dernier album North Star Deserter, profitons en et découvrons la voix éraillée de l'étonnant personnage associée aux envolées à cordes du groupe canadien. Sans surprise le spectacle est exceptionnel, maelstrom de guitares, de violons pour soutenir Vic, armé d'une simple guitare accoustique et d'une voix hors du commun. Un rappel, semble-t-il inattendu, nous permet même d'avoir un final majestueux avec Jessica Moss au chant.
Après cet ouragan, place à la seule déception de cette édition, MGMT. Encore un groupe à plusieurs voix, plusieurs guitares, encore un groupe sur lequel le tampon Animal Collective aura sa place, mais sans l'originalité de leurs prédécesseurs. Ca remue, ca bouge mais rien d'aussi percutant ou intéressant que tous les groupes qui ont pu se succèder sur la scène de l'Omnibus sur ces deux jours.
Ils étaient attendus avec impatience les Caribou et c'est dans un line-up particulier qu'ils arrivent au son de "Melody Day", un peu rabaché comme jingle de la météo de canal +, mais intéressant à voir en live. Dan Snaith, le maître de cérémonie n'a de cesse de changer d'instrument, proposant un étonnant duo de batteries entre deux parties de flutiau ou de guitares.
Le spectacle est impressionant et même si certaines chansons s'éloignent de la version cd, on ne saurait trop conseiller d'aller les voir en concert (et d'écouter Andorra).
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