Textes choisis et interprétés par Daniel Mesguich.
Daniel Mesguich arrive sur scène, devant le rideau tiré. Silencieux, il regarde le public longuement puis s'adresse à lui en explicitant le titre de son spectacle et dit admirer le risque pris par les spectateurs. Présence charismatique, regard perçant, voix profonde, sourire envoûtant. Dans tous les sens du terme, le charme agit.
Disparition derrière le rideau qui se lève sur un décor de bibliothèque feutrée aux rayonnages surchargés de reliures anciennes aux couleurs patinées. Du bureau au fauteuil, Daniel Mesguich, devient récitant d'un florilège d'auteurs qui sont les siens.
Car il définit "Phasmes" comme "un récital au sens où je récite des extraits de textes qui, pour la plupart, ont beaucoup compté dans ma vie et dans ma démarche d'homme de théâtre, mais c'est aussi, donc, un spectacle sur l'intertextualité".
Métaphore entomologique aussi pour dévoiler des textes, ses fondamentaux, qui l'accompagnent dans sa démarche d'humaine et d'homme de théâtre et proposer au public une invitation à un voyage poétique et littéraire, sinon initiatique, du moins sous forme de rébus textuel. Un dévoilement de sa petite bibliothèque intime.
Homme du verbe, récitant inspiré, du non sens d'Eric Chevillard et ses fantaisies bucoliques à une comptine de Pierre Debauche, grand homme de théâtre, et un clin d'oeil au directeur des lieux, Jean-Michel Ribes, avec "Monique" du "Théâtre sans animaux", de la verve truculente de Serge Valetti "avé l'assent" pour Jésus de Marseille à l'accent parigot de la Butte pour un extrait "Les masons" de Jehan Rictus, il ouvre bien des portes dérobées.
Le réalisme magique de Borges, le surréalisme de Kafka et la poésie d'Aragon semblent avoir ses préférences pour aborder des thématiques fortes, sur la condition humaine, l'amour, la mort et l'art.
Les textes sont égrenés, évoqués comme on invoque des figures ancestrales ou des oracles bienveillants accompagnés in limine de musique murmurée et de douces voix off. Les feuillets dactylographiés, tenus à la main, pour des défaillances improbables, s'agissant de textes de chevet, ou pour signifier la fuite du temps, s'envolent comme feuilles mortes.
Sous des allures de veillées culturelles, ce récital ressortit également du bel exercice de style. Car Daniel Mesguich distille ses morceaux choisis avec le savoir faire addictif d'un comédien aguerri et talentueux. |