Chaque nouvel album de Jad Wio fait évènement, tellement son univers étrange, expérimental reste singulier. Fidèle à une esthétique, le groupe explore les visions les plus réprimées de notre imagination. Les riffs rock de guitare, les transes des claviers viennent à bout de ces interdits, comme les trompettes eurent raison de Jéricho.
Sex Magic ou l’histoire de Lilith von Sirius, la courtisane de luxe me fait penser à l’album La ballade de Miss Knife d’Olivier Py, lorsque le dramaturge prend les plumes de Miss Knife pour un tour de chant mélancolique. Il y a plus de ressemblances qu’on ne l’imagine, avec Jad Wio. Ils partagent le même goût du travestissement ; pour l’un, l’inspiration est une Miss Knife chanteuse de cabaret, croqueuse d’amant vieillissante, pour l’autre Lilith von Sirius, plus putain que maman.
Autre comparaison possible "La ballade de Melody Nelson" de Gainsbourg.
Jad Wio relève le défi du concept album et nous prend par l’oreille, comme une meneuse de revue, au gré des aventures de son héroïne, placée sous le signe de Lilith, lointaine aïeule, la divinité juive déchue, monstre de sensualité.
Quelques éléments mythologiques, une inspiration gainsbourienne subtile ou la "Poupée de cire, poupée de son" devient "poupée de vice, poupée de sang" et une guitare électrique rock qui érotise le récit. Rappelez-vous toujours lorsque Gainsbourg conduisait Melody à "l’Hotel Particulier".
Bortek et Kbye, en orfèvres, nous livrent un album splendide et troublant, faisant naître l’espace d’un rêve, des scènes de séduction, de possession, d’humiliation. Tour à tour Lilith, Diane, l’homme mystère = le souteneur sans nom, Bortek est le maître de cérémonie, métaphore de l’auteur qui se joue de la soumission de sa créature.
Amateur des voyages inédits, adepte du roman noir, alliant volontiers la folie de la sexualité à la possession du démon, vous retrouverez les grilles du château, le carillon fantôme…
Nul doute que grâce à sa magie noire, Lilith von Sirius ne saurait vous décevoir. |