Ce ni vus ni connus printaniers fait dans l'artisanat et le travail d'orfèvre. Les 3 artistes présentés ayant pour point commun la faculté de procurer à l'auditeur une somme d'émotions peu commune et le grand avantage de réussir ce tour de force sans les artifices de production actuelle. De la musique humaine, à fleur de peau faite à grand coup de "do it yourself",c'est à découvrir et c'est tout de suite.
Chris Garneau Music For Tourists (Fargo, février 2008)
Une voix qui semble flotter sur un nuage, presque androgyne, une musique dépouillée laissant la part belle au piano et aux cordes gracieusement et parcimonieusement déposées sur des partitions que l'on imagine d'un blanc immaculé, à peine tachées des points noirs à perte de vue.
Une musique délicate, une invitation à la détente, tout en douceur, et à la contemplation.
Les mélodies s'imposent naturellement comme si elles étaient en nous depuis toujours, immatérielles et palpables à la fois. Palpables par les émotions qu'elles procurent, à fleur de peau, comme celles de Eliott Smith dont Chris Garneau est un admirateur, ou encore de Alban Dereyer dont l'album Underneath the Myrtle shade offre des sensations similaires.
Music for tourists s'intitule l'album. Des touristes que l'on imagine faire un voyage au paradis, avec Chris Garneau comme tour operator. Cet album est à écouter de toute urgence.
Neva dinova You may already be dreaming (Saddle Creeks/ Pias, avril 2008)
Si Neva Dinova a mis 10 ans à sortir son premier album, en 2002, c'est à un rythme de 1 tous les 3 ans que le groupe effectue désormais ses livraisons. C'est ainsi le troisième qui sort ces jours ci. Le premier sur le label Saddle Creek offrant, grâce à la distribution française de Pias, peut être plus de visibilité que les deux précédents.
You may already be dreaming est une suite de ballades, parfois très américaines, comme "Squirrels", et parfois plus pop comme "Supercomputer", sorte de tube bubblegum et mélancolique ou "Tryptophan" lorgnant du côté du maniérisme vocal de Coldplay.
Mélange des genres assez surprenant qui pourrait faire passer ce disque à la trappe par une écoute trop rapide, notamment parce que "Love from below", qui ouvre l'album pourrait laisser croire à un album dépressif, sans mélodie, flirtant d'un peu trop près avec la country.
Il n'en est rien et Neva Dinova, piloté par Jake Bellows et Heath Koontz, intimes de Conor Oberst avec qui ils ont d'ailleurs collaborer le temps d'un EP, sait jouer avec les émotions, des mots et de la musique, altermant les guitares électrique comme sur "Someone's trippin'" et les chœurs très "américana" sur "Funeral Home".
Du travail d'orfèvre toujours sur le fil entre songwriting et pop … mais ca marche rudement bien.
Leon Rousseau Nonbreakable stereo (Chuck's records, décembre 2007)
Orfèvre et artisan aussi ce Léon Rousseau. Il ne vient pas, comme les deux précédents de l'autre côté de l'atlantique mais pourtant sa musique en est tout autant imprégnée.
Si son précédent album solo, Old School, lorgnait pas mal du côté de la pop anglaise des Beatles, c'est en effet d'avantage vers les amériques que se tourne Rousseau sur ce Nonbreakable Stereo, sorti trop confidentiellement sur le petit label Chuck's Records.
Toujours fasciné par le vintage et les vieilleries, Léon Rousseau s'en donne à cœur joie sur cet album. Nous sommes plongés dans un disque aux réminiscences country folk et rock hors d'âge. Rousseau mêlant savamment modernité des compositions et sonorités … old school.
Entre banjo et guitares électriques, entre ballades folk et brûlots rock, Nonbreakable Stereo est un modèle d'éclectisme et de "do it yourself". Pas de contrainte, pas de musicien, Rousseau fait tout tout seul, et il le fait bien.
Plus qu'un album de country rock, Rousseau rend hommage à ses héros, pour preuve, cette phrase à l'intérieur du livret : "May Robert Zimmerman live forever". Tout est dit. |