Il pleut, c’est la Franche-Comté, après tout, c’est normal. Merde, j’ai raté Electric Electric. Cela dit, je les avais déjà vus dans d’autres conditions. Courrez les voir s’ils jouent près de chez vous, leur noise hypnotique et sérielle plaira aux amateurs de musique autre mais énergique. Voire dansante. Si !
French Cowboy jouent à la plage. Leur folk rock est fin à défaut d’être original, doté de belles montées et de chœurs aériens. Sympathique, joli, bon moment d’épure.
Eh-hé-hé ! MGMT, finalement ne me fait pas vomir, j’arrive même à écouter quelques morceaux avant de me sauver pour Danko Jones.
Le revanchard canadien a peut-être la voix un peu fatiguée et il faudrait un peu plus de guitare en façade, le début de set est un peu mou.
Mais ça s’accélère plus tard. Danko n’hésitant pas à s’amuser avec le public, on aura finalement passé un agréable moment de Hard-Rock. Avec des poses à la con, mais tout cela ce n’est pas sérieux… Les gros riffs gras et tranchants font secouer la tête et rien à foutre de Cali.
Future Of The Left et leur rock noise sont absolument à découvrir. A la Loggia, ils ont délivré un concert massif, sarcastique et teigneux qui restera comme l’un des meilleurs moments du festival. Collé aux barrières, droit devant eux, je ne les lâche pas des yeux et mes oreilles parfois blasées frémissent tout du long et se dressent attentives et rieuses. Sauf que…
Sauf que je ne sais pas encore que dans mon dos, un de mes potes se prend des mandales et quitte le festival suite à un malentendu avec des gros cons. Honte sur vous, bande de lâches abrutis, frapper un non-violent !
Du coup, le cœur n’y est plus, on écoute de loin le hip-hop très haut de gamme de Dan le Sac v/s Scroobius Pip. Ca a l’air très bien. Mais…
Holy Fuck et sa musique aussi mouvante que son line-up nous font le coup du set groovy improvisé qui va loin.
Très bon moment de trip electro-organique qui réussit à nous remettre un peu de baume au cœur. Le bassiste est super et a vraiment la classe. Ce truc indéfinissable dans l’attitude et le jeu, vous voyez ? Non ? Tant pis.
Yea Sayer fut aussi une belle découverte, charmé je le suis encore, par l’originalité de leur pop.
Quelques éléments world music sont très finement distillés, les voix sont très intéressantes : le chanteur a un charisme autistique prenant et n’hésite pas à déraper dans les aigus névrosés.
L’improbable bassiste offre des chœurs barrés et boit du vin rouge, le tout va à contre-courant de la majorité de la production pop actuelle, et ce n’est pas pour me déplaire.
J’attendais beaucoup de Battles. J’avais raison. Leur rock sériel mâtiné de tribalisme contre-nature a fait mentir ceux qui critiquaient leur intellectualisme supposé : ce fut une célébration, une invitation à la danse, encouragée par la force et la précision de frappe, toujours aussi impressionnante, de Jon Stanier (jadis batteur chez Helmet, Tomahawk, etc).
Les mathématiques de la musique poussant les gens à la transe, qui l’eut cru ? Les morceaux sont des constructions phénoménales, structures de débits de notes syncopées, d’autosampling contrôlé puis dévié, de voix pitchées oniriques, figures soniques géométriques, avec un sens de l’ordre, du placement qui me laisse baba au rhum. Ces types sont-ils de la même race que nous ? Oui, car tout le monde danse. Même moi, merde ! En fait, c’est presque du Blues ! Nan, j’déconne…
Je reste pour Ez3kiel, admirant les braseros étincelants, le show light, la profondeur des basses fréquences et la texture des bruitages, la noirceur de leur atmosphère et la cancoillotte dans mon sandwich.
Je suis seul au milieu du monde, je regarde les filles : dans l’noir, elles sont toutes belles, je pense à une peau d’ours, puis à un stupide oreiller pas très propre.
La fatigue est plus forte que tout, je décroche, je rentre exténué. Déprimé à l’idée que désormais, c’est fini. Ce sont des choses qui arrivent, fatalement paf !
Le point de vue du photographe
Le festival débute avec un doigt d’honneur de Keny Arkana qui me fait d’emblée oublier le reste du monde et me concentrer sur cette presqu’île détournée et éphémère, un monde à coté du monde où l’on célèbre la Musique pendant trois jours.
On vient aux Eurocks pour voir un groupe et plus, pour s’enivrer du son et de l’ambiance, pour manger des sandwichs, boire des bières et faire les zouaves en pataugeant dans la boue ou pour courir de scène en scène avec son appareil photo, à la recherche des meilleures prises, comme c’était le cas pour moi.
Mais ce festival reste avant tout une formidable terre de découverte et s’il ne fait aucun doute qu’en 20 ans, il est devenu une grosse machine à business, sa programmation soignée et audacieuse sait faire se côtoyer les grosses têtes d’affiches vendeuses qui assureront le remplissage du site et les jeunes groupes en devenir qui laisseront des traces sur le sable alternatif de nos plages musicales.
De la musique pour tous donc, sous le signe du rock toujours, dans toutes ses dérives, des plus conventionnelles aux plus extrêmes.
I love les Eurockéennes de Belfort. A l’an prochain alors ! |