Pas de Feuille de Route cette année et un dossier plus léger pour cette 18ème Route du Rock, édition charnière après de grosses difficultés financières dues en partie au fiasco Corgan de l'an dernier. Souscriptions, aides de Saint-Malo et de Saint Père Marc en Poulet et l'espoir de tous les vieux festivaliers de pouvoir encore longtemps passer 3 jours de bonne musique sous le soleil capricieux de la Bretagne.
Le premier jour du festival sera peut être le plus attirant pour le grand public. The Do, immanquables cette année sur leur tournée géante mais surtout les Tindersticks en formation étendue et les Breeders, de retour pour la sortie de leur dernier album.
Tout commence sur la plage avec Nina Nastasia, seule sur la petite scène improvisée tout près des vagues et après un incroyable déluge qui a mouillé les maillots des courageux footballeurs du Foot is not dead qui ouvraient le festival. Guitare sèche, voix sans artifice, avec sa petite fiole d'alcool posée à ses côtés, elle nous propose un superbe concert tout en finesse. Un très bon choix pour ce premier jour à la plage.
Au Palais du grand large, après une ouverture très sympathique par les Dodos, c'est au tour de Fuck Buttons de faire du bruit dans la belle salle. Et du bruit il y en aura, de la distortion à fort volume, du My Bloody Valentine electro comme le disait la réclame. Ils ne croyaient pas si bien dire. Des premiers rangs aux balcons c'est un déluge sonore qui sort des jouets numériques des deux compères. Ils sautent, remuent sur les sons déchirés qui sortent des enceintes. La voix, quand il y en a, est à l'unisson, totalement dévastée par les nappes de distortions. Un concert au final parfois éprouvant mais terriblement efficace.
Retour par les bouchons du mois d'août à Saint Malo pour rejoindre le fort de Saint Père et assister au concert des War on Drugs. Rien de spectaculaire pour ce groupe de Philadelphie, juste un bon démarrage de festival avec une découverte, certes pas exceptionnelle, mais intéressante de part les quelques envolées soniques pour supporter une voix qui finit par être agaçante.
La suite sera plus intéressante avec The Do, même si tout festivalier passionné n'a pas pu les manquer pendant leur grande tournée des festivals. A chaque concert, c'est toutefois le même plaisir. Dan et Olivia en font des tonnes, soutenus par l'excellent batteur et sa surprenante collection de percussions. Ils en font des tonnes, certes, mais pour le plus grand plaisir du public, proposant des versions remaniées des meilleurs titres de l'album et le charme opère. Une fine équipe qui ne devrait pas avoir de mal à se renouveller pour un deuxième album tant ils semblent ouverts aux mélanges et aux expérimentations.
Après la fantasie de notre finlandaise préférée, place au sérieux du grand Stuart et de ses Tindersticks en formation étendue. Cuivres et cordes pour soutenir l'excellent groupe mené par la voix inimitable du leader. Rien à dire sur ce concert si ce n'est un sentiment de perfection, une envie de s'asseoir et d'admirer le jeu parfait en écoutant cette voix qui nous hantera longtemps après le concert.
Et après un tel concert on se retrouve comme des adolescents devant les soeurs Deal, toutes fraîches, souriantes, blaguant, emmenant les Breeders et tous leurs tubes avec la conviction d'un groupe amateur. Solos approximatifs, fins abruptes, chants désaccordés, on n'est très loin de la perfection de leurs prédécesseurs mais quel plaisir ! On pouvait s'attendre à un remix de la tournée des Pixies, avec musiciens figés attendant la fin du spectacle pour recolter leur chèque mais c'est tout l'inverse. Les américaines s'amusent, se narguent, lancent de l'eau sur le bassiste quand elles ne jouent pas et proposent au final un concert foutraque mais tellement divertissant qu'on ne peut rien leur reprocher. A la Route du Rock, où l'on peut croiser les popeux les plus intransigeants, un petit vent de bordel ne peut pas faire de mal.
Après une courte nuit, on débute la journée de 15 août sur la plage de Bon Secours sérieusement frequentée mais qui, grâce à un vent tout breton, reste fréquentable. Centenaire y joue un folk-post-rock délicat et tout à fait idéal pour un repos bien mérité sur cette plage de sable fin. Multiples effets confrontés à des instruments acoustiques pour un concert tout en subtilité.
Moins subtil le combo guitare-batterie de No Age bien loin du blues-rock-hype des White Stripes. Ici on lorgne plutôt vers Sonic youth avec des saturations à trois amplis et des effets à n'en plus finir. Le batteur n'est pas en reste et, dans un final apocalyptique, se livrera même à un tabassage de guitare en règle.
Californie toujours avec les exceptionnels Why? déjà rencontrés dans ce même fort en 2006. A 4 sur scène, ils relisent leurs deux albums avec la même fougue et la même perfection sonore. Exit le bassiste/guitariste aux claviers ou le chanteur/guitariste sur ses deux pédales wha wha, le groupe est désormais plus mûr et l'apport du quatrième homme sur scène permet de dégager du temps pour de nouvelles experimentations. On adore toujours autant.
Après des années de négociations, voici enfin le jour et l'heure où Sigur Rós posera ses flight cases sur le grand plateau du Fort Saint-Père. Les islandais inimitables, dont le dernier album, presque pop, tranche totalement avec les premiers opus, n'epargneront rien aux spectateurs : costumes traditionnels, fanfare, cordes, enormes boules lumineuses, et lancer de confettis qui offriront à la Route du Rock, l'espace d'une heure et demi, une ambiance de Noël, un Noël sombre porté par les terribles nappes de guitare et la voix de Jonsi Birginson. Merveilleux concert pour les amateurs, joli spectacle pour les autres.
Samedi 16, dernier jour, au Fort, le journal du festival nous apprend que François Floret est optimiste et qu'il y aura bien une édition 2009 de la Route du Rock, les spectateurs peuvent être rassurés et apprécier les 3 multi-instrumentistes de Menomena dont le saxo nous fera retourner quelques années en arrière avec un son proche de Morphine entre deux envolées de guitares à effets. De la pop très particulière, idéale pour ce début de journée très calme malgré les annonces météo.
Le French Cowboy, Federico Pellegrini, leur succedera, assisté par ses 3 compères ex-Little Rabbits. Et même si, musicalement, le folk de maintenant n'a pas grand chose à voir avec la pop debridée des années 90, on se replonge dans nos souvenirs avec l'humour décalé des lascars, les blagues à la foule, la poignée de main de Gaétan à un quidam arrivé par hasard sur le plateau et une incroyable performance sur une reprise d'Amy Winehouse/Pauvre diable quand le cowboy invite deux filles "attendant le groupe suivant" à monter sur la grande scène. Rien que pour ce genre de coup et pour les excellentes compositions, on continue de les adorer.
Ces 2 filles que Federico promettait "d'avoir", elles attendaient les Girls in Hawaii qui ne les décevront pas. Les 6 belges, découverts très humbles en conférence de presse et extremement heureux d'être de retour dans un festival à taille raisonnable après un détour dans les méga festivals du nord de l'Europe, livreront un set de pop songs imparables avec une pénombre paradoxalement à l'opposé des lumineuses mélodies jouées à 3 guitares et tellement plus d'instruments variés. Même les sceptiques resteront un bon moment devant les 6 très bons musiciens que l'on n'a pas fini de croiser.
On terminera notre festival avec les Ting Tings déjà vus aux Trans et qui semble ici plus à l'aise même si Katie White semble mettre du temps à prendre ses marques. Le duo guitare/batterie (encore !!) est percutant et ose la ballade ou l'hymne electro. Rien d'exceptionnel mais un fort bon moment dans la lignée des Vive La Fete ou autre agitateurs rocks.
Rendez vous en février pour la Route du Rock 2009 Hiver et encore de nouvelles découvertes et un plaisir toujours aussi vif d'écouter de la bonne musique.
|