Retrouvons-nous pour la toute dernière journée du FIB 2008.
18h40 : Les New-Yorkais de The National ont apparemment conquis la scène Fiberfib avec leur rock indé mélancolique et celà, malgré l’horaire "matinal".
Leurs prestations étaient habituellement un peu trop molles à mon goût mais d’après les personnes ayant assisté à celle-ci, la patate était au rendez-vous.
19h20 : Les membres de Moriarty jouent sur la petite scène, toujours dans un décor de théâtre, ambiance salon londonien de 1900 à tendance petite maison dans la prairie. Leurs titres pop-folk sont mignons et chaleureux, mais en live c’est tout de même un peu mou et pas énormément expressif au regard des moyens mis en œuvre ; et on sent une mise en scène assez travaillée qui ne rend pas le spectacle très naturel.
L’intro et le final sont un peu plus agités avec solos d’harmonica entraînants et tapage dans les mains. Le single "Jimmy" et la reprise acoustique (pas essentielle) de Depeche Mode "Enjoy the silence" sont joués au milieu du set pour un public qui se disperse de plus en plus pour se placer sur la grande scène.
20h00 : L’Escenario Verde est bien garni pour accueillir Leonard Cohen. Il est accompagné d’un backing band assez bluesy (pedal steel et orgue hammond) avec trois choristes et de temps en temps un bouzouki.
Tous ses tubes dancefloors sont passés en revue comme "Suzanne" (sur lequel il prend la guitare), "Everybody knows", "Bird on the wire", "I’m your man"… "Hallelujah" est forcément repris en chœurs par plus de 20000 personnes les bras en l’air, avec applaudissements après chaque refrain. La bonne ambiance retombe parfois, notamment sur "First we take Manhattan" (heureusement joué sans les synthés de l’album), où on entend davantage le public discuter au fond de la scène. En gros, l’émotion n’est peut-être pas submergeante mais le moment est joli. C’est surtout bon d’entendre en live Léo, ses 73 ans et sa voix inimitablement profonde.
Pendant ce temps-là, le groupe de rock indé from Seattle Death Cab For Cutie ferait presque oublier qu’il y a un mythe sur la grande scène en remplissant presque la tente Fiberfib. J’arrive vers la fin de leur set. Ils ont déjà joué l’excellent "I will possess your heart", "The new year", "Title and registration", "Cath"… Le public est enthousiaste ; l’atmosphère est excellente et chaleureuse. Le final est envoûtant avec le superbe titre à rallonge "Transatlanticism" et son refrain lancinant ("I need you so much closer…"); Ben Gibbard passe du piano à la guitare et relance le morceau de plus belle : le public tape en rythme dans ses mains et offre une véritable ovation au groupe.
20h30 : Micah P. Hinson, et sa country-folk du Texas, a fort à faire pour lutter contre Leonard Cohen sur la scène d’à-côté. Pourtant, le charme opère malgré un public clairsemé. Le set deviendra de plus en plus rock avec guitares distos et riffs de banjos entraînants. Les personnes étant restées tout le concert ont, d’après elles, passé un super moment.
21h30 : La pop-dance du jeune anglais Calvin Harris fait onduler la scène Fiberfib. Malgré des mélodies simplettes et un jeu de scène banal, il est adulé par ses compatriotes qui n’arrêtent pas de danser, surtout sur le tubesque "Acceptable in the 80’s", dont les notes de synthé rigolo sont effectivement salement entêtantes...
Pendant que sur la grande scène une expérience est tentée avec le projet Omega alliant un groupe de flamenco dirigé par la star locale Enrique Morente, accompagné par un groupe de rock indé, Lagartija Nick.
Même de loin, on peut entendre le public espagnol ovationner la prestation.
22h00 : Le vieux pote de Jarvis Cocker, Richard Hawley, attire pas mal de monde sur la petite scène. Le public est assez attentif et l’ambiance n’est pas transcendante mais Richard semble heureux d’être là.
Le petit moment de concert que j’ai vu m’a paru moins intéressant que l’écoute du disque, mais son mélange de country, folk, rockabilly et pop (tout ça, oui) mérite vraiment qu’on s’y attarde, surtout à l’écoute de morceaux comme "Tonight the streets are ours" (gros succès au FIB).
23h00 : Plus d’une demi-heure avant le début du live de Justice, environ 15000 personnes essaient de s’entasser sous la tente de la scène Fiberfib. C’est un peu trop ; des milliers de spectateurs suivront ce concert en dehors de la tente. Cela arrive souvent mais cette année, j’ai l’impression que l’on a affaire à la plus grosse densité de foule. Les Frenchies sont donc très attendus. Parmi l’audience, nombreuses sont les croix tentant avec plus ou moins d’humour de représenter le symbole du groupe.
Leur fameux décor prend place sur la scène : un mur de synthés analogiques, de vieux racks d’effets, des patchs, un crucifix laser… au-dessus desquels siègeront les stars, Xavier et Gaspard, entourés par 2 murs de baffles Marshall (dix-huit en tout).
Ok, c’est du fake mais ça a de la gueule ; car des baffles sans micros devant, ça ne peut servir qu’à faire joli ou montrer qu’ici, on aime les ambiances rock’n roll. Et le matos analogique ne sert pas au live non plus. Mais bon, il y a quand même un effort de déco ici par rapport aux autres sempiternels groupes qui tournent quelques boutons sur une console et dont le son sort de notebooks (éternelle question : pourquoi pas passer un cd, alors ?).
De toute façon, ce qu’on demande à Justice, c’est de foutre le feu, et comme les morceaux ont des enchaînements parfaitement préparés et que le public est conquis d’avance, l’ambiance est à chaque fois énorme ; ce soir ne déroge pas à la règle, surtout que l’ambiance de base d’un public bénicassimois est supérieure à la moyenne (merci aux Anglais et Espagnols).
Les deux Parisiens entrent en scène tous spots éteints sur l’intro de "Genesis", et tout le monde est déjà à donf. Surtout que les premières notes de "Phantom" surgissent juste derrière : hystérie collective.
Absolument rien n’arrête le public de sauter les bras en l’air. Juste une phrase lancée au milieu d’un break pour que la folie s’accentue encore : "Do the dance". L’intro du tube sera jouée en boucle plusieurs minutes sans aucun beat ; forcément, tout le monde chante en hurlant : "You were such a P.Y.T, Catching all the lights, Just easy as A.B.C. That's how you make it right !" ; avant que le morceau n’explose vraiment dans un fracas indescriptible.
Les nombreux breaks comme l’intro du morceau classique "Une nuit sur le mont chauve" (qui sert lui-même d’intro au titre "Stress" dont le clip est tant controversé) ne sont qu’un moment de répit pour se déchaîner de plus belle.
Le très distordu et saccadé "Waters of Nazareth" y passe aussi et sur la fin, les paroles "We are your friends, you’ll never be alone again !" résonnent.
Rebelote : tout le monde chante le refrain du premier tube de Justice a cappella pendant 5 minutes, avant de laisser place à un tremblement de terre quand le morceau part vraiment.
Jamais je n’aurais autant sué de ma vie ; au début du live, je suis compressé entre de grands anglais torses nus bourrés et les gros seins d’une jolie blonde nordique, mais je m’aperçois qu’à la fin du live, j’ai dû bouger de 15 mètres et les gens sont totalement différents. Quelques groupes de Français sont d’ailleurs présents : une fille en maillot de bains tricolore danse sur les épaules d’un mec, quelques drapeaux bleu blanc rouge s’agitent.
Fin du live : beaucoup sortent épuisés, torses nus ; tous dégoulinent de sueur, dégueulasses mais heureux.
23h30 : Contrairement à l’édition 2004, Morrissey est cette fois-ci bien venu sur la grande scène du FIB : belle performance (il était toutefois revenu se faire pardonner en 2006).
Forcément, l’ambiance est bonne, tant les Anglais sont présents en nombre et tant il est aimé en Espagne.
Mais, vu la foule présente sur la scène Fiberfib pour Justice, Morrissey ne devait pas faire scène comble, en tout cas pas au début de son set. Justice terminant avant lui, pas mal de festivaliers pas spécialement fans de Morrissey vont voir par curiosité la fin de son concert (eh oui, comme moi, désolé).
Toujours aussi cynique entre certains morceaux, Morrissey critique allègrement la bouffe du FIB, la pop anglaise et espagnole. Parmi la setlist : "First of th gang to die", "Irish blood, english heart", une chanson des Buzzcocks, des chansons des Smiths comme "Vicar in a tutu" , "What she said", "Death of a disco dancer", "How soon is now" (en conclusion).
A signaler que pendant Justice et Morrissey, les Mancuniens de The Courteeners ont tout de même joué devant près de 2000 personnes sur la petite scène ; sans doute un public n’aimant pas les rois de la pop et la musique électronique, mais préférant la power-pop.
01h00 : Encore du frenchy au FIB avec sur la petite scène : Yelle. En fait, quand j’avais vu la prog il y a quelques mois, j’avais un peu rigolé en pensant à ce que pouvait donner "Je veux te voir" ou "A cause des garçons" chantés à Bénicassim.
Et bien, je peux maintenant dire que ça fait un carton. Ok, la scène Fibclub contient environ 6000 personnes, mais elle est pleine à craquer et tout le monde tape dans ses mains. De toute façon, ceux qui s’en foutent de Yelle sont restés sur les autres scènes.
Sans doute quelques uns du millier de Français présents au Fib se retrouvent ici (quelques drapeaux tricolores s’agitent), et les Anglais et les Espagnols présents s’éclatent à fond.
On sent bien que Yelle a un vrai public. Pas étonnant qu’elle fasse une carrière internationale avec tournée mondiale à l’appui et diffusions sur des radios du monde entier.
Pour faire le spectacle, elle harangue la foule en s’agitant dans sa robe à paillettes Castelbajac tandis que son complice GrandMarnier assure vraiment pas mal à la batterie.
Je pense que quand on n’aime pas (légitimement) ce son criard et ce chant simplet pour teenage girl fluo, il y a quand même moyen de se marrer si on est complètement bourré. En tout cas, tout le monde danse ; et heureusement, pas de tektonik en vue, ouf…
01h15 : Siouxsie a délaissé les Banshees et les Creatures pour sortir l’album Mantaray l’an dernier et partir en tournée mondiale.
Tenue noir et argent proche de celle d’Iron Man, crinière longue et noire en arrière, maquillage outrancier : le voyage dans le temps vers le post-punk peut commencer sur la grande scène, pas énormément remplie.
Beaucoup de morceaux de son album sont interprétés, puis quelques morceaux mythiques des Banshees, comme les entêtants "Happy House" ou "Israël". Dans le public, bien plus âgé qu’à Justice, quelques bras bougent langoureusement dans les airs ; ça tape des mains mais ce n’est pas vraiment la folie.
03h00 : Les belges de Vive la fête tentent de mettre un peu le feu pour le dernier concert sur la grande scène. Pour ma part, difficile d’y aller et surtout de rester à cause de leurs lives pas extraordinaires, de la musique que je trouve peu motivante (alors que c’est censé devoir vous faire groover), du chant stressant de la (belle) blonde, des paroles premier degré, mais peut-être est-ce la faute du chant en Français…
Autant aller s’agiter sur les deux autres scènes, désormais vouées aux nombreux dj’s, dont la pointure house-club David Duriez, un de mes chouchous des dancefloors, et Joakim (de Versatile et Tigersushi) ; encore des Français. Présents également : Supermayer (projet électro-pop rigolo de Superpitcher et Michael Mayer du label allemand Kompact), Radio Slave et Ewan Pearson, dans un style un peu plus minimal.
Finalement, cette édition du Fiberfib sera juste dans la moyenne, peut-être une des moins intéressantes de par sa programmation. Attention, ça veut surtout dire que plus on remonte dans le temps et plus la prog était énorme, selon moi.
De plus, d’année en année, le festival Summercase de Barcelone est devenu bien plus qu’un concurrent du FIB. Et comme par hasard, il a maintenant lieu le même week-end. Rappelons qu’il y avait au Summercase, des groupes de live fabuleux comme Primal Scream ou Grinderman ; il y avait également Mogwaï (qui jouait mon album préféré, aaargh !), sans parler des Kings of Leon, des Breeders, Blondie, Sex Pistols, Midnight Juggernauts et beaucoup d’autres que j’adore (mais la liste est vraiment trop longue).
Le Fib devrait aussi faire attention à ne pas trop se retrouver dans la boucle du marché anglais du disque car une brèche "variétés" s’ouvre de plus en plus. On a l’impression que les maisons de disques anglaises prévoient dans leur plan media un passage obligé par Benicássim, quel que soit le type de groupe d’ailleurs. Comme désormais les Anglais sont les festivaliers les plus nombreux, ils sont également un marché très juteux.
Mais on retiendra toujours de ces Fiberfib l’éternelle ambiance de maboul du public (peut-être grâce aux Anglais et aux Espagnols car c’est assez rare en France) et cette atmosphère particulière, mi-plage mi-concerts.
Longue vie, donc. |