Pièce écrite et interprétée par Julien Daillère, mise en scène de Patricia Koseleff avec la participation de Rémi Cortési.
L’univers enfantin plus que grandeur nature ! Des objets liés à l’enfance : toboggan, peluche, et modules, voici l’étonnante découverte de la mise en scène après l’ouverture du rideau. Quant à l’ambiance sonore, quel bonheur d’entendre des rires d’enfants et diverses paroles émanant certainement d’une cour d’école.
Pour le public dont la tranche d’âge dépasse largement les 18 ans et plus, c’est comme si l’on était de nouveau projeté dans cette atmosphère où chacun d’entre nous a vécu des expériences et des découvertes inoubliables. Un retour en arrière agréable ou pas mais peu importe c’est une étape de nos vies dont on apprécie à la fois le goût et l’odeur !
Un seul comédien sur scène mais pas des moindres, Julien Daillière nous livre là un travail de longue haleine en terme d’investigations avec des professionnels de l’enfance et également de prouesse théâtrale dont lui seul à le secret.
Tantôt il est Océane, la petite fille moche qui le sait, qui vit avec ce poids à longueur de journée. Pas évident pour une petite fille d’être montré du doigt non seulement par ses amis mais aussi par les plus grands. Comment vivre avec moqueries et ces regards si pesants qui se posent sur elle ?
Puis tantôt, Julien Daillère devient Thimothée, le garçon qui ressemble à une fille : "La petite fille manquée", quand il explique ce que disent les garçons de l’école sur lui. Il y a Géraldine aussi, la petite fille aux lunettes "disproportionnées", qui lui mange tout son visage.
Sans oublier Kévin, le garçon qui a son papa au chômage et Kelly, la dernière de la classe ou encore Aina, la petite fille noire adoptée et bien sur Lucas, le turbulent. En somme, tous ont une personnalité bien ancrée, un véritable panel de bambins que l’on peut sans problème rencontrer au fil des générations dans les cours de récré.
Comme indiqué précédemment tous les personnages sont interprétés par un seul comédien. L’important est de rentrer plus en détail dans cette démarche… Ainsi, le comédien est vêtu tout du long d’un costume d’écolier sobre sans fioritures. Il décline juste le bas du costume en fonction du sexe du personnage.
Cependant, le plus intriguant, ce sont ces masques accompagnés de perruques dont il se pare. La personnalité de chaque enfant se trouve à la fois sur ces masques et avant tout dans l’écriture des textes. Une façon originale et fascinante de découvrir chacun de ces écoliers. Son allure de pantin permet également au comédien de garder une certaine distance avec chacune des personnalités de ces chérubins qu’il met en scène. Le plus troublant lorsque l’on assiste à l’une de ces représentations c’est la réaction du jeune public qui au début de la pièce s’identifie, se marre…
Puis au fur et à mesure où les textes passent de l’humour à la dureté des propos si réalistes d’un enfant, on ne les attend plus ou presque, auraient-ils la gorge un peu serré ? Un phénomène qui se produit aussi chez les parents où adultes présents. Eux sont confrontés d’un côté, à ce que vit, ressent l’enfant au quotidien et d’un autre côté à leur statut de parents.
En clair, comme le décrit simplement Rémi Cortesi, le psychologue clinicien qui a accompagné Julien Daillière dans son travail, "Le spectateur, enfant ou adulte, est confronté au "parler vrai" propre aux enfants, à l’humilité de leur réflexion ainsi qu’à la lucidité sans concession de leur regard sur le monde, sur les adultes et sur leurs propres failles". Il y dans cette démarche de Julien Daillière deux objectifs : que les enfants qui assistent au spectacle se reconnaissent et que les adultes eux prennent plaisir et intérêt à se replonger dans cette période de l’enfance.
"Les contes de la petite fille moche" ou le véritable voyage dans le monde de l’enfant où rires, joies, bonheurs, malaises, complexes, souffrances et malheurs, des émotions qui ont font et feront toujours partie de chaque génération ! Une réalité qu’il est essentiel et fort intéressant de (re)visiter à tous âges…