Les trois Cheveu débutent la soirée, eux qui ont l’habitude de tourner avec les Black Lips. Ils n’entraînent pas de gros mouvements de foule, comme s’ils n’étaient perçus que comme des amuse-bouche. Pourtant, le chanteur épileptique est toujours aussi ouf, et est fort bien servi par un Jean-François Stévenin très en verve ce soir à la guitare (bon, ok, c’est pas lui, mais c’est pas loin). En tout cas, Cheveu nous sert un bon psychogarageinduscore (oui, je n’arrive toujours pas à les classer), assaisonné d’une voix saccadée gueularde multi-effectisée sur son coulis de boite à rythme au son dégueulassement cool. Personnellement, il me fait toujours autant flipper ce chanteur, tellement il a l’air barge ; je reste loin de la scène, brrr…
C’est au tour du one-man band canadien de Mark Sultan aka BBQ, de chanter, assis, ses morceaux rockab-vénère. Grosse caisse, caisse claire, tambourin aux pieds, guitare dans les mains, il est accompagné sur certains morceaux par un autre guitariste et un bassiste. Ca sonne bien gras mais c’est pas encore la teuf dans le public, peut-être un peu trop djeuns. A mon avis, à réserver plutôt pour ceux qui aiment les Français Fredovitch (présent en spectateur) ou Magnetix.
Les quatre coquins de Black Lips entrent en scène dans une ambiance sombre et des spotlights psychédéliques : Jared, le bassiste-chanteur, est toujours fidéle à sa moustache style brigades du tigre ; Ian, le gratteux aux dents en ferraille, arbore un t-shirt de leur ville, Atlanta ; Cole, l’autre guitariste, est une nouvelle fois déguisé (cette fois-ci on dirait Harry Potter, avec son grand chapeau pointu rigolo) ; Joe, le batteur, semble à peu près humain.
D’entrée, le public gueule pas mal mais l’ambiance n’est pas encore des plus folles. Trois ou quatre morceaux seront nécessaires pour que le concert prenne la tournure qu’en fait tout le monde attendait.
Les premières notes à la basse de "O Katrina !" déclenchent ce qui va maintenant être, comme on dit dans le jargon technique, "un beau bordel".
Non pas que le groupe se laisse aller à jouer punk n’importe comment, mais il subit désormais les multiples assauts d’un public désireux de foutre le boxon et de s’emparer de cette soirée.
Les Black Lips sont maintenant devancés par leur réputation de fouteurs de merde et semblent même être déçus du comportement de certains spectateurs plus que provocateurs (ce n’est pas sans rappeler une certaine époque récente du Brian Jonestown Massacre…). Autre tube pogoïsant très attendu : "Bad Kids" ; pogos et slams à gogo depuis la scène sont légion, tout comme les fans improvisés gogo-dancers hurlant dans les micros à la place des chanteurs toutefois assez enclins à accepter ces chœurs improvisés.
On ne compte plus les gobelets de bière s’envolant telles des colombes de la paix dans le public, mais ça reste traditionnel pour un concert du genre.
En parlant des traditions ancestrales du garage-punk, les musiciens ont un peu moins craché qu’à l’accoutumée et Jared a parfois fait lui-même la sécurité pour vider certains malotrus de la scène. L’un d’eux a même montré son gros cul dégueulasse ; j’en suis encore fort choqué.
Parmi les bonnes blagues du public, on pourra citer celle du pied de micro qui descend lentement dans les premiers rangs pendant que le bassiste chante, et qui remonte tranquillement à sa place mais sans micro. Le groupe s’arrête ensuite de jouer et demande qu’on rende l’objet du larcin sous peine d’arrêt du concert.
A noter : toujours un nombre incalculable de petites teenages à franges et à slims, mimant le mouvement des vagues avec leurs bras en avant, bref, pétassant juste devant la scène, voire dessus, histoire de se faire remarquer par les rockers car c’est extrêmement valorisant.
Question son et ambiance, on reste donc sur la même lignée que leur concert d’avril à la Maroquinerie, avec cette fois un envahissement total de la scène par le public vers la fin du set, sur "Cold Hands".
Les Black Lips finissent tout même le morceau comme ils peuvent, carrément noyés par le public. D’ailleurs, on ne voit même plus les musiciens.
Ah, au fait, à ce concert j’ai appris un nouveau mot : "slam policier". Définition : un membre de la sécurité déboule des loges et slame depuis la scène sur la foule pour choper un mec par le colback et le foutre dehors.
Une bonne baston entre djeuns bourrés sortant du concert a lieu juste après celui-ci, devant la Boule Noire, au beau milieu du Boulevard de Rochechouart. Les flics raboulent et chopent un des protagonistes. Peu discret, la gueule pleine de sang, il hurle à la mort qu’il va tuer son adversaire ; ce dernier avait pourtant la tête toute gentille d’un "fils de" du 7ème allant danser aux Planches. Et à ce moment-là, Harry Potter débarque sur le boulevard, une bière à la main, et tape la discute avec la foule pas encore dispersée, puis se dirige vers les flics. Curieux tableau, entre totale loose et ambiance déglinguée. C’est peut-être aussi pour ça que j’aime les Black Lips… |