Inévitablement, on se demande comment un pays aussi peu peuplé réussit à produire autant d'artistes internationalement reconnus. A croire que la population de l'Islande n'est constituée que d'artistes.
Quoi qu'il en soit, il faut reconnaitre que, non seulement la proportion d'artistes est élevée mais qu'en plus, ils sont généralement doués et d'une grande originalité.
Ainsi Jóhann Jóhannsson ne fait pas exception et le nouvel album de ce touche à tout est des plus excitants.
Après avoir travaillé sur des projets de musiques de films, de productions de performances en tout genre ou encore organisé des concerts de musique de chambre, entre autres, Johannsson propose un nouveau volet, le deuxième, dans une trilogie consacrée aux grandes marques américaines.
Ainsi, le premier opus s'intitulait IBM 1401, a user's manual. Celui-ci fait donc référence à la célèbre marque automobile. L'idée de ce projet étant, semble-t-il, de montrer que tradition peut s'allier avec technologie, Jóhannsson prendra un malin plaisir à en faire la démonstration en musique. Car la musique de Jóhann Jóhannson n'est autre, finalement, que de la musique classique écrite et arrangée à la mode du jour, à peine pimentée de quelques discrets outils électroniques ou de lointaines guitares.
Fordlandia tient autant de la musique de film que de la symphonie. Une ambiance est rapidement posée et les différents morceaux de l'album offre une constante progression, passant par des phases de douceur et d'apaisement et des phases plus noires et plus tendues.
Les cordes se mélangent joliement au clavier et autres instruments comme sur "Fordlandia" dont l'intensité monte tout au long de ses 9 minutes, comme un titre parfait de Sigur Rós, oscillant sans cesse entre des tonalités pop et des mouvements venus de la musique classique.
On trouve également des choeurs superbes sur certaines parties ("The Great God Pan Is Dead") que l'on pourrait classer dans un registre classique. En tout cas bien loin de la pop musique au format couplet refrain même, si l'electro apporte parfois un modernisme et une colloration plus chaude aux morceaux ("Melodia") comme peut le faire par exemple Arca, Sylvain Chauveau ou Clogs.
Entre la BO de To Have And To Hold de Nick Cave et Blixa Bargel, Sigur Rós et un brin de Hector Zazou, on tient avec Fordlandia un album magnifique de musique contemporaine au sens noble du terme, contemplatif, riche, fort en émotions pour qui saura prêter l'oreille à ce disque tout en subtilité.
A écouter dans des conditions optimales et à forte puissance, cela va de soi. Pour un plaisir intense en toute circonstance. |