A ce rythme là, l’inénarrable Will Oldham va finir par concurrencer sérieusement notre Jean-Louis Murat national. En effet, l’activité du plus célèbre natif de Louisville, Kentucky (OK… après les membres de Slint) ne ralentit pas d’un iota. A tel point que même les indéfectibles, même les plus passionnés des aficionados pourraient finir par se lasser.
A priori, pas de réelle excitation à découvrir son nouvel opus encore paru sous le pseudonyme de Bonnie Prince Billy : Is It The Sea ? Qui plus est lorsqu’on apprend qu’il s’agit encore d’un live. Deux ans après le magnifique Summer In The South East, mais quelques mois surtout après son jumeau maléfique Wilding In The West, paru uniquement en Australie. Et pourtant, Is It The Sea ? mérite mieux que ces conclusions hâtives.
Tout d’abord de part la qualité et l’originalité du backing band : les Ecossais de Harem Scarem (douce folkerie de là-bas) accompagnés par le batteur Alex Neilson (Richard Youngs, Taurpis Taula, Isobel Campbell, Six Organs...). La diversité instrumentale apportée par le sextet (banjo, flûte, violon…) éclaire certaines compositions sous un angle différent souvent intéressant.
Il convient également de noter que l’enregistrement a été réalisé à domicile (Edimbourg) par cette vénérable institution qu’est la BBC – dont on pourrait déplorer la propension à ne pas avoir coupé ces longues plages d’applaudissements.
Enfin, la set-list s’avère à peu près parfaite : entre les pierres angulaires constituées par "Minor Place" extrait de I See A Darkness et "Master And Everyone" de la galette éponyme, Will Oldham revisite évidemment son dernier disque en date The Letting Go ("Love Comes To Me", "Cursed Sleep") puis aléatoirement ses opus précédents (Superwolf ou encore Master And Everyone).
Sur la forme, le choc risque d’être rude pour ceux ayant quitté Will Oldham à l’époque de Palace ; un profond changement s’opérant chez Will Oldham depuis quelques années. Ainsi lors de son dernier passage parisien (au Trianon en mars 2007), nous avions pu découvrir un garçon soudainement incroyablement loquace, jamais avare d’une anecdote. A peu près méconnaissable en fait. Pour le meilleur et pour le moins réussi. Comprendre des titres sublimés par une interprétation plus enjouée et d’autres décevants car débarrassés de cette infinie tristesse et de cette mélancolie qui faisaient leur charme. Mais dans tous les cas reste la voix ahurissante et si singulière de Will.
Au final Is It The Sea ? constitue clairement un must have pour les fans. L’occasion (pas la meilleure attention !) de découvrir un des fers de lance de l’americana pour les autres. Et pour tous, l’occasion de se replonger dans la pléthorique discographie du maître. |