"File-moi
cette bouteille, elle est à moi !
- Eh, rends-moi ma vodka, you bloody bastard !
- T’vas voir ta gueule à la fin de la soirée
!"
C’est, grosso modo, en ces termes que se sont rencontrés
Nick McCarthy et Alex
Kapranos, les deux têtes pensantes du nouveau groupe
britannique Franz Ferdinand. Nouvelle
coqueluche du New Musical Express, cette bande d’Ecossais
d’adoption est présentée comme le meilleur groupe
de 2004. N’ayons pas peur de cette arrogance toute anglaise
et voyons voir ce qu’il en est exactement.
Après cette empoignade un soir dans un bar de Glasgow, Alex
Kapranos décide de monter un groupe avec cet allemand qu’il
vient de connaître. En effet, celui-ci a prétendu savoir
jouer de la batterie au beau milieu de la baston ! Evidemment, il
n’en est rien, mais l’arrivée de Paul
Thomson, batteur, et de Bob Hardy,
bassiste, permettra à Franz Ferdinand de prendre son envol.
L’association entre Alex Kapranos, un étudiant en
littérature anglaise plutôt cultivé, et Nick
McCarthy, un allemand aux goûts vestimentaires plutôt
excentriques, était vouée à faire des étincelles.
Le premier concert de ce groupe "arty" (ils faisaient
tous plus ou moins partie d’une école d’art)
a lieu dans l’appartement d’une de leurs amies, en centre
ville de Glasgow. Ils jouent deux fois de suite quatre titres, "Take
me out", "Auf Achse",
"Michael" et "Shopping
for Blood", qui étaient à l’époque
leurs seules compositions. Et là, miracle, les gens de l’assemblée
se mettent à danser. C’est le but de la musique de
Franz Ferdinand : sur des bases de rock, ils arrivent à créer
un style plutôt dansant bien dans l’air du temps (cf
Radio 4, The Rapture,
etc…).
Devant le succès d’estime de ce premier gig, les quatre
compères décident de trouver un lieu adéquat
pour y tenir des expositions, des manifestations artistiques et
des concerts. Ils préfèrent le système D aux
endroits déjà établis et investissent donc
un vieux bâtiment à moitié délabré,
surnommé "Le Château". Ils organisent dans
cette bâtisse des shows et des expositions, et c’est
ainsi qu’ils se font connaître, jouant leur musique
entre quatre murs pelés et au milieu d’anciennes installations
sportives.
Venons-en maintenant à leur debut album. Alex Kapranos et
Herr Superfantastisch ont composé les 11 titres de ce premier
LP, sobrement intitulé Franz Ferdinand. Les titres révèlent
une section rythmique excellente, avec une basse primordiale et
mixée très en avant, et une batterie sautillante martelant
des rythmes binaires assez disco, à la limite de la dance.
Dès le premier titre, on a envie de bouger son corps et
de "headbanguer". Le groove de Franz Ferdinand est imparable,
en particulier sur le début de l’album : les titres
"Tell Her Tonight", le deuxième
single au riff entêtant "Take me
Out" , et "The Dark of the
Matinee", dans leur syle disco-rock, sont tout bonnement
extraordinaires. "Tell her tonight"
fait penser au "Heart of Glass"
ou au "Atomic" de Blondie,
et le son de guitare rappelle parfois Elastica.
Le voix de Kapranos sur "The Dark of the
Matinee" est superbement fragile, et le refrain est
énorme. En fin d’album, "Michael
" et "Come on Home"
ont des mélodies presque aussi bonnes. Et tout le reste de
l’album est excellent, pas de baisse de régime sauf
peut-être pour le dernier titre. Sur "Come
on Home", la voix magnifique et vulnérable de
Kapranos la un petit côté Jarvis
Cocker. (d’autant plus que leur style dandy, un peu
précieux, les rapproche).
A noter que les paroles sont assez marquantes : la scansion "This
fire is out of control, We’re gonna burn this city" issue
de "This Fire", et "You
can feel my lips undress your eyes" , belle phrase provenant
du premier single “Darts of Pleasure”,
trottent dans ma tête depuis la première écoute
de cette petite merveille.
Je qualifierai donc ce debut album de Superfantastisch. Par contre,
je ne sais si ce disque résistera à de nombreuses
écoutes… avec un peu de recul, il me semble que l’album
apparaîtra moins bon. C’est plutôt normal pour
de la musique dansante.
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