A la sortie de leur album 200 Million Thousand, Black Lips est venu faire sa promo à Paris. Ils nous ont donné une interview pour le moins amusante...

Qui êtes-vous ?

Black Lips : Je suis Jo, je joue de la guitare dans Black Lips.
Je suis Col, je joue de la guitare.

Pour ceux qui ne vous connaissent pas, de quoi parlent vos chansons ?

Jo : Elles n’ont pas vraiment de sens, généralement elles n’ont même pas de but, c’est de l’observation des gens et des situations. Et des trucs.

Vous vous décrivez vous-mêmes comme du flower-punk. C’est-à-dire ?

Col : Cela veut dire punk comme baiser les filles, pas comme botter ton cul. On fait de la musique à laquelle les jeunes de 16 ans s’identifient.

Jo : Par la mentalité, cette naïveté, cette absence de responsabilité, juste s’amuser.

C’est votre public principal en concert ?

Jo : Oui.

Col : Notre public a tendance à devenir encore plus jeune. Au début, il était plus vieux, genre des collectionneurs solitaires. Maintenant, on a des skateborders et on a un public qui déborde d’énergie. Et c’est pareil dans toutes les villes, on a tous ces tarés.

Jo : Et les jolies filles.

Pourtant, vous vous embrassez entre vous, entre hommes, sur scène...

Col : C’est juste pour rire.

Jo : Ce qui se passe sur scène reste sur scène.

Vous avez lancé un concours pour votre clip vidéo. Cela a-t-il bien fonctionné ?

Col : On est carrément impressionné. On s’attendait à des vidéos amateur et on a reçu des trucs vraiment professionnels. On avait prévu un petit  prix merdique, maintenant on cherche comment récompenser les gens parce qu’ils méritent mieux !

Donc vous aurez finalement "200 millions de milliers" de vidéos ?

Jo : On y est presque.

Sur la version française de Wikipédia, vous êtes décrits comme sales et chantant faux.

Jo : Cela me va.

Col : Je m’en fous.

Jo : Les gens pensent ce qu’ils veulent, c’est cool.

Col : Mais on ne peut pas faire semblant d’être crade, c’est une chose vraie (ndlr : il regarde ses mains).

Avez-vous déjà joué en Chine ?

Jo : On préparait une tournée de deux semaines mais finalement, juste avant la conférence de presse, Björk a fait son concert et parlé du Tibet. Immédiatement, le gouvernement a tout régulé sur les groupes et les musiciens.

Quelles sont vos influences, vos inspirations ?

Jo : La compilation Back from the Grave.

Col : Le punk américain du début des années 60.

Jo : La chanteuse française Francoise Hardy. C’est pas une influence mais on aime bien. La musique rap.

Col : Toutes sortes de musique.

Parlez-moi de Jacques Dutronc.

Col : Mon musicien français préféré. Comme un Bob Dylan, mais avec une guitare qui joue faux, donc plus punk.

Jo : Il a l’air d’être très heureux d’être français, ce qui ressemble pour nous à du chauvinisme, très fier de qui il est et d’où il vient.

Vous avez joué en Inde et beaucoup s’en souviennent...

Jo : On avait fait 4 concerts là-bas et en Inde, ils préfèrent le heavy metal. Au bout de 4 concerts, on se faisait chier et au dernier, près du Sri Lanka, on a dépassé les bornes. On s’emmerdait donc on s’est bourré et il y a eu ce baiser sur scène. Là-bas, c’est vraiment un "faux pas" (en français). Même un couple marié qui s’embrasse en public risque 3 mois d’emprisonnement. C’est considéré comme obscène, un vrai tabou social. Ce n’est pas le fait de montrer son cul sur scène qui a choqué, mais bien le baiser !

Col : Notre promoteur a flippé, les sponsors ont retiré leur argent et le temps d’y penser, on a pris une voiture pour quitter la juridiction et éviter la prison. Et le lendemain, on est rentré.

Aujourd’hui, cela vous donne envie d’y retourner ?

Col : Yeah !

Jo : Comme touriste, pas comme groupe ou artiste. Ce serait trop dangereux, légalement.

Vous êtes bons amis avec Bradford du groupe Deerhunter. Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Col : Il est d’Atlanta et nous y avons grandi. Il a fait le design de la pochette des deux premiers albums et plusieurs sessions à la batterie. C’est un vrai ami, un membre de la famille.

Savez-vous pourquoi il a annulé son passage en France en février ?

Col : Aucune idée.

On ne vous imagine pas en train de composer enfermés dans un grand studio. Quelle est votre méthode pour écrire vos chansons ?

Jo : On est meilleur sous la pression. Comme à l’école, quand vous travaillez juste la nuit précédant le contrôle.

Quel est le rôle de chacun de vous dans la création ?

Jo : Tout le monde fait tout.

Col : Chacun donne son propre style à la musique.

L’an dernier, le concert à Benicassim était étrange, avec beaucoup moins d’interactivité que d’habitude. Avez-vous apprécié de jouer dans ces conditions "normales" ?

Col : Oui, c’était dingue, une très grande scène, c’était dingue.

Jo : Il était 2 heures du matin, j’aurais aimé qu’on reste plus longtemps là-bas.

Col : On a joué dans beaucoup de petits clubs ces dernières années, alors une telle scène c’est génial.

Jo : On a toujours eu un équilibre dans nos tournées entre les petits concerts et les grands.

Au contraire, votre concert à la Boule Noire en septembre était très différent, dans une petite jauge.

Jo : Ce concert était fou. Avant même qu’on ait commencé à jouer, des jeunes ont sauté sur scène et sur la batterie.

C’est un bon souvenir ?

Jo et Col (ensemble) : Oui !

Col : Je devais faire très attention à ne pas prendre de coups !

Ce n’est pas difficile de continuer à jouer dans ces conditions ?

Col : Si, c’est parfois le bordel dans les petites salles.

Jo : Les gens sont plus proches, ils se sentent libres de faire ce qu’ils veulent. Pas comme sur les grandes scènes. Parfois on peut plus jouer !

Col : On arrive parfois à un point où on peut plus jouer sur scène.

Mais cela fait partie de vos spectacles...

Jo : On aime bien que les gens s’éclatent mais jusqu’au point où on puisse quand même continuer à jouer. Si on doit arrêter de jouer, à quoi ça sert ?

Est-ce que vous êtes punk dans votre quotidien ?

Col : Je ne vis pas dans une poubelle mais dans une maison que je loue.

Que faisiez-vous plus jeunes pour gagner de l’argent ?

Jo et Col (ensemble) : Des sandwichs !

Col : Je faisais les poubelles dans un fast food.

Vous avez des projets parallèles, des side-projects ?

Jo : Parfois. Par exemple, Almighty Defenders, mais la plupart de ces projets sont inactifs car Black Lips est trop occupé.

Vous gagnez beaucoup d’argent avec Black Lips ?

Jo : Non.

Col : Assez pour vivre. Mais on n’est pas riche.