Comédie dramatique de Marguerite Duras, mise en scène de Régis Mardon, avec Didier Mérigou et Elodie Sörensen.
Marguerite Duras c'est l'écriture du ressassement des mêmes thèmes et des mêmes motifs, faire revenir les personnages dans les mêmes situations pour répéter ce qui a été à l'origine d'une perte ou d'une souffrance pour tenter une réparation.
Une réparation qui ne viendra pas parce que sa vision de l'amour est celle de l'amour impossible et que les personnages se croisent, se frôlent et se ratent comme mus par une inéluctable stratégie de l'échec. Une réparation elle aussi impossible.
Et tel est le cas de "La musica deuxième" qui met en présence une femme et un homme qui viennent de voir leur divorce prononcé et dont Marguerite Duras donnait les clés en précisant "qu’ils se tiennent toujours dans cette jeunesse du premier amour, effrayés" et que "ce sont des gens qui Ils ne savent toujours pas ce qui leur est arrivé". Le spectateur ne comprendra pas davantage.
Cette courte pièce appartient à ces textes de Duras qui agissent comme des lames de fond surgies du tréfonds de l'âme et apportent chacune ses alluvions mnésiques dont la sédimentation submerge le personnage avant de disparaître, emportées par le reflux. D'où ce ressassement.
Le spectacle proposé par la Compagnie l'Echauguette s'inscrit dans une autre dimension. Lui, incarné par Didier Mérigou, est dans une disposition cyclothymique passant de l'excitation à l'abattement. Elle, Elodie Sörensen, jeune femme à la corporéité très présente, le regard qui pétille ou s'embue de larmes, les mèches de cheveux à replacer, est bien éloignée de la figure féminine durassienne telle qu'elle a été immortalisée par Delphine Seyrig, Jeanne Moreau ou Fanny Ardant.
L'approche de Régis Mardon privilégie donc une représentation réaliste d'une scène de ménage à retardement et un théâtre d'humeur montrant le heurt de deux personnes dans une certaine fébrilité, voire une frénésie violente, ce qui ressemble au crissement de plaques métalliques qui se frôlent brutalement et, fort curieusement, c'est dans les images vidéo de Mathilde Morières diffusées en intermèdes que l'on trouve la fameuse "musica".