Activiste forcené au sein des fabuleux et incontrôlables Sun City Girls depuis le milieu des années 80, Richard Bishop n’en mène pas moins depuis 1998 et plus régulièrement depuis 2004 une prolifique carrière solo. Laquelle a malheureusement pris un tournant nouveau en février 2007 avec la disparition du percussionniste Charles Gocher, sonnant du même coup la fin prématurée du trio originaire de Phoenix.
Les veinards ayant eu – plusieurs fois même – l’opportunité d’assister à leurs shows savent à quel point les SCG possédaient cette capacité à surprendre leur auditoire, souvent pour le meilleur mais parfois aussi pour le moins réussi. A l’inverse des productions solo de Sir Richard Bishop, lequel ne s’écarte guère d’une stricte ligne de conduite. Se voyant comme un héritier plus ou moins direct de John Fahey et des trublions de son label Takoma. Tout en possédant une palette d’influences nettement plus étoffée.
Pour sa sixième réalisation The Freak Of Arabia, sa seconde sur Drag City, Sir Richard Bishop a choisi de rendre hommage à la musique arabe. Nord africaine plus précisément. Pour un exercice très personnel. De part ses origines libanaises, difficile en effet de ne pas envisager The Freak Of Arabia comme un retour aux sources de son auteur. Ni comme un hommage appuyé à Omar Khorshid, le "king of the arab guitar", mythique musicien égyptien aujourd’hui disparu dont l’ombre plane sur l’ensemble du projet.
Bien qu’ayant assemblé autour de lui un quatuor (guitare, basse, batterie et percussions), Sir Richard Bishop occupe les avant-postes, usant exclusivement d’une guitare électrique. Le répertoire, quant à lui, se répartit pour moitié entre pièces inédites et relecture de morceaux traditionnels (Elias Rahbani, Mohamed Abdel Wahab…).
Première surprise : l’absence quas-totale de soli, comme si le disque consistait en une succession de parties instrumentales sur lesquelles un chanteur devrait venir poser sa voix. Mais point de vocaliste il n’y aura. Deuxième élément notable : les libertés prises dans l’interprétation pour un disque clairement sous influence. Notamment ces versions en mode surf du traditionnel "Kaddak el Mayass" ou de l’antique mélodie corse "Solenzara" semblant directement provenir d’Adieu Philippine de Jacques Rozier.
Pour le reste – et le principal –, Sir Richard Bishop alterne longues transes hypnotiques ("Blood-Stained Sand"), descriptions de paysages cinématographiques ("Sidi Mansour" ou "The Pillars Of Baalbek") ou chamaniques compositions ("Barbary", "Essaouira"…). L’œuvre époustouflante d’un guitariste hors norme. La meilleure introduction à son œuvre avec Polytheistic Fragments paru en 2007. |